Le dernier carré en point de mire

Du 17 au 19 juillet, la Belgique tentera d’arracher son billet pour les demi-finales de la Coupe Davis, ce qui n’est plus arrivé depuis 1999. Notre capitaine de Coupe Davis Johan Van Herck préface ce match face au Canada.

Dans son rôle de capitaine de l’équipe belge de Coupe Davis, Johan Van Herck est bien placé pour constater que le tennis mondial évolue. Le jeu est de plus en plus physique et les joueurs atteignent plus tard l’âge de la maturité. Où en est la Belgique dans ce concert ?

David Goffin est quinzième joueur mondial mais, en Belgique, on a la nostalgie de l’époque où Justine Henin et Kim Clijsters régnaient sur le tennis mondial.

Nous avons été gâtés. Deux joueuses aux deux premières places mondiales, ça n’arrivera plus de mon vivant. Les gens n’imaginent pas les efforts qu’il faut faire pour être dans le Top 200 mais on ne peut rien y changer. Tout ce qu’on peut faire, c’est mettre en place un cadre de travail le plus professionnel possible.

Avez-vous suffisamment de moyens pour cela ?

Avec la structure actuelle, on peut déjà aller loin mais nous n’avons pas les moyens de la France, de la Grande-Bretagne, de l’Australie ou des Etats-Unis qui, grâce aux tournois du Grand Chelem, génèrent d’importantes recettes (Wimbledon rapporte 50 millions d’euros à la fédération anglaise, soit plus de la moitié de son budget annuel, ndlr). C’est pourquoi nous travaillons avec peu de joueurs mais des gens en qui nous croyons vraiment. Il faut pouvoir mettre un entraîneur à leur disposition. Parfois, nous sommes un peu pris de court mais on n’est jugé que sur les résultats.

Choisissez-vous aussi les joueurs en fonction de paramètres physiques, comme la taille ?

On évalue tout cela. La taille est un critère important car, à partir d’un certain âge, les joueurs doivent adapter leur jeu à leurs capacités physiques. Il ne sert à rien de vouloir faire d’un type qui mesure deux mètres un spécialiste de la terre battue. Travaillons plutôt son service. Mais à un certain moment, nous devons faire des choix.

 » Un travail d’équipe  »

Du coup, il y a des laissés-pour-compte. A 12 ans, Kimmer Coppejans a dû quitter Wilrijk. Etait-ce une erreur d’appréciation ?

Nous n’avons pas de boule de cristal. Quand nous laissons partir quelqu’un, ce n’est pas nécessairement parce que nous n’y croyons pas mais parce que nous croyons plus en quelqu’un d’autre. Ou parce que nous estimons que le joueur peut se débrouiller au sein d’une structure privée, quitte à ce que la fédération intervienne. La nuance est importante. Les fédérations ne sont pas les seules à pouvoir former des joueurs.

Depuis 2011, vous êtes capitaine de l’équipe de Coupe Davis. Quels étaient les défis à relever et les pièges à éviter ?

Il était important que les joueurs soient derrière moi. J’ai discuté individuellement avec les joueurs de l’époque – XavierMalisse, SteveDarcis, OlivierRochuset DickNorman, je leur ai expliqué ma façon de voir les choses et je leur ai demandé ce qu’ils attendaient d’un capitaine. C’est un job intéressant car il faut travailler en équipe.

Vous acceptez les coaches privés en sélection. Pourquoi ?

Parce qu’ils connaissent bien leurs joueurs. Je ne peux pas changer leur jeu en une semaine, je dois juste veiller à ce qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes. Avant une Coupe du monde, MarcWilmots dispose de cinq semaines de préparation et de matches amicaux. Si j’avais autant de temps que lui, j’agirais seul également. Mais j’ai quatre jours. Je peux suggérer certaines choses mais je n’ai pas la prétention de dire à ThierryVanCleemputce qu’il doit faire avec David Goffin alors qu’ils travaillent ensemble 50 semaines par an. Le joueur ne l’accepterait d’ailleurs pas.

Les joueurs aiment-ils disputer la Coupe Davis ?

Oui, c’est une de leurs priorités. Ils sont amis, ils veulent réussir quelque chose ensemble et ils espèrent que le stade sera plein. Ça me facilite la tâche car personne ne renonce. C’est pour cela que nous voulons battre le Canada.

Les sélections de Goffin et Darcis vont de soi. Pour les deux autres places, vous avez le choix entre Bemelmans, Desein, Coppejans et Authom. Sur quoi vous basez-vous ?

L’expérience en Coupe Davis, le ranking, le passé, l’attitude en groupe et les forces de l’adversaire. Au tour précédent, par exemple, j’ai opté pour RubenBemelmans car il est plus fort que Kimmer en double.

 » Le Canada n’est pas l’Espagne  »

La Suisse jouait sans Federer et Wawrinka. Est-ce que ça ne dévalue pas la Coupe Davis ?

C’est dommage mais je ne m’occupe pas des décisions de l’adversaire. Je constate seulement que nous parvenons à convaincre nos meilleurs joueurs de représenter le pays.

Quelles sont les limites de l’équipe belge ?

C’est très difficile à dire car je ne les vois pas au quotidien. David est 15e mondial mais il a beaucoup de points à défendre. Il peut devenir top 10 mais, à son âge, ce serait déjà bien de terminer la saison dans le top 30. SteveDarcis était bien revenu après une blessure à l’épaule mais il a de nouveau des pépins d’ordre physique. Ruben et Kimmer ont suffisamment de potentiel pour jouer dans le Top 70.

Oui mais le Canada a Raonic, qui est dans le top 10.

Les Canadiens partent du principe que Raonic va remporter ses deux simples et que leur double est plus fort. Cela signifie que nous allons devoir nous surpasser face à Raonic ou en double. Nous avons opté pour la terre battue parce que nous savons que c’est la surface que Raonic aime le moins. De plus, il a été blessé et on va voir comment il se débrouille à Wimbledon. Le Canada, ce n’est quand même pas l’Espagne avec Nadalet Ferrer.

PAR CHRIS TETAERT – PHOTO : BELGAIMAGE

 » La Coupe Davis est une des priorités des joueurs belges. Ils sont amis et veulent réussir ensemble.  »

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