Le cri de Leko

On aurait dit que le printemps avait subitement rendu toute leur sève aux joueurs du Club Bruges et desserré leurs freins. Le jeu tout en puissance du champion a fait trembler un KRC Genk stérile, surtout en première mi-temps. Il a montré quel potentiel cette équipe possédait encore. Ivan Leko s’est laissé entraîner dans cette fête de manière touchante. Le Croate reste sur des mois difficiles, voire traumatisants.

Il y a eu sa brève mais humiliante arrestation lors du scandale, puis les premières semaines de l’année 2019, difficiles, le moteur du Club refusant de démarrer. Pendant ce temps, Leko a dû ressentir une certaine méfiance et pas seulement parce que les discussions sur le renouvellement de son contrat se faisaient attendre. Il a continué à imposer sa volonté dans les moments difficiles, souvent contre l’avis des autres.

Cette fois, après la victoire 3-1 contre Genk et la prestation encourageante en Europa League contre le RB Salzbourg, Leko a félicité ses footballeurs et a insisté sur le fait que le staff technique et le noyau restaient très unis. Ça ressemblait à un cri, un appel à la reconnaissance. Celui d’un entraîneur sensible, qui laisse toujours parler son coeur, d’habitude, mais qui, ces dernières semaines, s’était contenté d’analyses plates, comme s’il se réfugiait derrière un bouclier. Cette fois, Ivan Leko a affiché ses émotions. Clairement, devant tout le monde.

Après le titre, Bart Verhaeghe avait déclaré qu’il lui serait difficile de conserver Ivan Leko. Le président avait dit que celui-ci s’était formidablement développé dans le rôle d’entraîneur et qu’il allait encore progresser. Pour Verhaeghe, Leko était destiné à faire carrière en Espagne.

Il ne reste plus grand-chose de cette admiration. Le football par moments faible du Club n’a pas renforcé la position du coach. On n’a plus encensé l’entraîneur qui, durant la saison du titre, avait toujours offert un soutien à ses joueurs et avait misé sur la force de la clarté. On a surtout parlé de choix malheureux. Dans les couloirs, perpétuels foyers de rumeurs, on a cité les noms de successeurs potentiels.

Dimanche, Philippe Clement était à côté d’Ivan Leko. Il a clairement analysé le jeu de son équipe, sans éclipser ses points faibles. Comme Clement le fait toujours. C’est un entraîneur ouvert. Doté d’une grande empathie, une qualité indispensable dans le football contemporain. Clement gère aussi avec une sérénité incroyable le feuilleton Alejandro Pozuelo. Il ne parle jamais des problèmes. Car, dit-il, sa tâche consiste à trouver des solutions. C’est devenu une formule à la mode.

Philippe Clement n’est entraîneur principal que depuis un an et demi. Il a bien établi son plan de marche, en travaillant d’abord comme adjoint. C’est aussi ce qui lui permet de bien jauger son noyau. Les grands footballeurs qui deviennent immédiatement entraîneurs éprouvent plus de difficultés à ce niveau. Jadis, Arie Haan, alors entraîneur d’Anderlecht, a déclaré que les joueurs ne connaissaient pas l’abc du football et Jan Ceulemans a voulu imposer ses normes personnelles à ses joueurs. Il était las d’expliquer des choses qui coulaient de source à ses yeux.

Le Club Bruges recèle toujours un énorme potentiel.

L’essentiel est de relativiser. Est-ce le problème de Gert Verheyen à Ostende ? Ne s’est-il pas trompé sur le niveau de son groupe ? Certains matches semblent être un chemin de croix pour lui. Ça fait partie de l’apprentissage du club côtier, qui aura besoin d’une sérieuse injection de qualité la saison prochaine. Sur le terrain, pas en dehors. Pourtant, c’est là que la situation a bougé, ce lundi. Contre toute attente, le président Peter Callant vient en effet de rendre son tablier. Du coup, le club côtier doit se mettre en quête d’une nouvelle identité.

Ivan Leko
Ivan Leko© BELGAIMAGE

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