Le cimetière des coaches

Les coulisses du tournoi jour après jour.

Lundi 23 juin

Quelques mots avant de boucler les valises et de reprendre l’avion : Roberto Donadoni est un homme éminemment contesté au moment de quitter Vienne, moins de 12 heures après l’élimination italienne par l’Espagne. Il s’exprime une dernière fois sur le sol autrichien. Depuis, il est viré et remplacé par son prédécesseur Marcello Lippi, qui a conduit la Squadra au titre mondial en 2006. Il y a encore des pays où on vire très vite un coach qui s’est planté… Cet EURO est un cimetière d’entraîneurs – comme la majorité des grands tournois pour des raisons diverses.

Groupe A.

Köbi Kuhn (Suisse), Luiz Felipe Scolari (Portugal) et Karel Brückner (Tchéquie) quittent leur poste, Fatih Terim (Turquie) a annoncé son départ avant de faire marche arrière.

Groupe B.

Joseph Hickersberger (Autriche) s’en va. Joachim Löw (Allemagne), Slaven Bilic (Croatie) et Leo Beenhakker (Pologne) restent.

Groupe C.

Marco van Basten (Pays-Bas) part, Donadoni (Italie) est viré, Victor Piturca (Roumanie) reste. Le sort de Raymond Domenech (France) semble scellé, même si on doit encore attendre la confirmation officielle de son C4.

Groupe D.

Luis Aragones (Espagne) se retire. Otto Rehhagel (Grèce) et Lars Lagerbäck (Suède) continuent. Guus Hiddink (Russie) devrait poursuivre mais son nouveau contrat n’est pas encore signé.

Mardi 24 juin

Unis contre les préjugés. Le Libérien George Weah (ex-Milan, Monaco, Chelsea, PSG, Manchester City et Marseille notamment), meilleur footballeur du monde en 1995 et footballeur africain du siècle dernier, est en Autriche pour promouvoir la Coupe du Monde 2010 en Afrique du Sud. Il est accompagné d’un autre fer de lance médiatique de ce Mondial, le Ghanéen Abedi Pelé.

Le but de leur démarche est clair : casser le préjugé selon lequel l’Afrique du Sud est un pays dangereux. On est curieux de voir car les statistiques sur la criminalité mondiale ne sont quand même pas encourageantes et Johannesburg toujours considérée comme un coupe-gorge.

Mercredi 25 juin

La Turquie joue sa demi-finale contre l’Allemagne à Bâle, à 800 km, mais Vienne est en fête : ici, la communauté turque est forte de 75.000 têtes. Des milliers de Turcs assistent au match depuis la fanzone, aménagée dans l’un des plus beaux quartiers de la capitale, où se concentrent la majorité des musées. On n’y compte plus les écrans géants.

Boucan d’enfer garanti car les supporters espagnols et russes ont déjà débarqué pour leur affrontement du lendemain et participent à la fête. La nervosité et les décibels des Ibères se mélangent à la beauté des poupées venues de Moscou et environs. Ça n’existe pas, les moches, chez les Russes ? Ou alors, ils n’envoient que des tops à l’EURO ? La fiesta se termine subitement, en plein match. Un orage terrible éclate, le ciel de Vienne est lézardé d’éclairs, le vent souffle à 100 km/h. En quelques minutes, il faut évacuer les 35.000 personnes présentes : une partie de la fanzone se trouve dans un parc et les risques d’accidents étaient élevés.

Jeudi 26 juin

La religion à l’EURO… Sur le parking du stade de Vienne, deux journalistes musulmans originaires de Singapour cherchent un endroit tranquille pour l’une de leurs prières du jour. Ils se calent derrière une boutique ambulante, sous 35 degrés. Calme non garanti !

Quelques jours plus tôt, peu avant le coup d’envoi du quart de finale Turquie-Croatie, les écrans du stade ont montré en gros plan deux supportrices turques voilées, présentes dans les tribunes. Le public croate a sifflé à en faire trembler le stade. Pas la meilleure idée de la journée pour ce réalisateur !

Vendredi 27 juin

Les Suisses ne sont plus concernés depuis jeudi et le tout dernier match sur leur sol (Allemagne-Turquie à Bâle). Déjà depuis l’élimination de leur équipe dès le premier tour, ils n’étaient plus vraiment dans le coup. A moins qu’ils l’aient jamais été, car l’enthousiasme n’a jamais été débordant dans la population. Par contre, dans la presse, on reste bien chaud. Comme à propos de la désignation de l’arbitre italien Roberto Rosetti pour la finale.

Cet homme, qui avait déjà sifflé le premier match des Suisses (défaite contre la Tchéquie), a laissé un mauvais souvenir au pays du fromage pour ne pas avoir sifflé un hands tchèque. Concernant sa nomination pour la finale, on peut notamment lire dans les médias suisses :  » C’est un choix géopolitique et d’amitié, indépendant des compétences intrinsèques des candidats « . Un autre quotidien parle de  » super scandale  » et soupçonne l’influence énorme de l’ex-arbitre Pierluigi Collina dans la commission qui effectue les désignations. Qui les médias suisses auraient-ils voulu pour diriger l’apothéose ? Leur Massimo Busacca, évidemment.

Samedi 28 juin

Nous nous baladons, le soir, dans le centre historique de Vienne. L’ambiance est torride. Les supporters allemands sont extrêmement bruyants, ils ont organisé un véritable cortège qui traverse le quartier : tambours, trompettes et des centaines de personnes pour suivre les meneurs.

Les Espagnols sont plus calmes. Etonnant. Au milieu de cette foule, nous apercevons une tête connue, coiffée d’une casquette rouge. L’homme ne semble pas se soucier des réjouissances des fans de foot, marche tranquillement puis s’arrête, sort son trousseau de clés et ouvre une porte. Il habite ici. C’est Niki Lauda !

Dimanche 29 juin

Dans notre hôtel, nous tombons sur un Français qui réside à deux pas de Mouscron et a un abonnement à l’Excel. Il a fait le voyage pour la finale. Sans ticket. Sûr de son coup.  » Je fais cela à chaque tournoi et je finis toujours pas trouver une place. Hier, j’en ai déniché une à 550 euros, ça reste raisonnable « .

Cette place valait 500 euros, son vendeur n’a donc pas fait le casse du siècle. La bonne tactique, c’est d’attendre le dernier moment car les prix s’écroulent le plus souvent – dès que les pros du marché noir comprennent que l’offre dépasse la demande. En semaine, nous avons croisé les inévitables cartons aux abords du stade : I need tickets. Nous avons discuté avec l’un de ces hommes à la recherche d’un billet. Aussi un Français. Il proposait 2.000 euros pour une place.

– » Vous mettez 2.000 euros pour voir un match ? C’est de la folie « .

– » Oui, mais je m’en fous, du foot. Ce n’est pas pour moi. J’ai des commandes venant de gars qui mettent 2.500 euros. Si je trouve une place à 2.000, la différence est pour moi. Je fais ça à chaque Championnat d’Europe et chaque Coupe du Monde : mes commissions me permettent de payer mes voyages et ça me fait des vacances bon marché « ..

par pierre danvoye et peter t’kint

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