Le cadre légal des contrats

Un tour d’horizon basé sur des entretiens avec Louis Derwa (avocat, ancien manager de Tubize et membre de la Commission des licences) et l’agent de joueurs, Didier Frenay.

8.675 bruts par an (pour la période allant du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010) ; il est indexé chaque année ; l’an passé, c’était 8.505 euros.

Faut-il exercer à plein temps ?

Non, il existe des contrats de sportifs rémunérés à temps plein ou à temps partiel (80 heures, avec un job professionnel ou d’étudiant en dehors)

Quel revenu faut-il avoir pour être considéré comme professionnel ?

Le minimal légal est 2 x ce montant : donc 17.350 euros bruts par an.

Et pour un extracommunautaire ?

C’est 8x le montant d’un sportif rémunéré, donc 69.400 euros bruts par an. Ce salaire annuel brut englobe tout : fixes, primes et avantages en nature. Si le club gagne peu de matches et que les primes ne suffisent pas pour arriver au minimum légal, il doit faire l’appoint en fin de saison. C’est une obligation notamment pour que le joueur reçoive encore un permis de travail pour la saison suivante.

PS : aux Pays-Bas, pour un extracommunautaire, c’est 524.000 euros ! Beaucoup d’extracommunautaires débarquent d’abord chez nous, le temps qu’on voit ce qu’ils ont dans le ventre. D’où l’impression d’avoir beaucoup d’étrangers de seconde zone.

Les footballeurs ont-ils le même contrat qu’un employé normal ?

Oui, il respecte la loi du 3 juillet 1978. En plus, la loi du 24 février 1978, que les footballeurs utilisent pour rompre leur contrat, règle quelques cas spécifiques aux sportifs comme :

-leur sécurité sociale,

-les parties fixes des salaires ou variables comme les primes (le pourcentage fixe/primes tourne autour des 60/40) et les avantages en nature (comme voiture ou logement ou téléphone, etc. ; ceux-ci ne peuvent pas dépasser 2/5 du salaire brut).

-les modalités de rupture

PS : il n’y a qu’en Belgique que cette loi du 24 février 1978 existe : Steve Defour, Davy De Beule, Marouane Fellaini l’ont soit utilisée, soit brandie comme menace quand ils voulaient se dégager d’un contrat avec un club.

Comment les joueurs sont-ils taxés ?

Tout le monde est sur un pied d’égalité, résident ou non

PS : pour les non-résidents, le régime fiscal plus favorable (raison pour laquelle beaucoup de footballeurs belges habitaient juste au-delà de la frontière…) a été aboli.

-Pour les sportifs rémunérés de 16 à 25 ans, une taxation à 16,5 %, sur le plafond des pros de 17.350 euros bruts par an. A partir de 26 ans, le taux de taxation passe à 33 %.

-Pour les pros, ce sont les barèmes normaux pour la taxation.

Un footballeur gagne-t-il bien sa vie ?

L’échelle, entre les mieux payés de D1 et les moins bien payés de D2, peut aller de 1 à 100. Mbark Boussoufa aurait un salaire supérieur au budget de Tubize… Mais c’est l’ambition de vouloir être compétitif sur la scène européenne qui oblige Anderlecht à offrir des contrats pareils. Les salaires de D1 en Belgique sont comparables à ceux que l’on propose dans des pays comme la Suisse et l’Autriche. Des clubs comme Anderlecht, Bruges et le Standard peuvent encore s’aligner, pour leurs meilleurs joueurs, sur les salaires proposés dans des bons clubs allemands.

PS : c’est surtout grâce à l’exonération du précompte professionnel (un deal entre le monde du football et le ministère des Finances). Une loi permet en effet aux clubs d’être exonérés du paiement de 80 % du précompte professionnel (une avance sur l’impôt à payer par l’employeur) mais ils ont l’obligation de démontrer que ces 80 % ont été réinvestis dans la formation de joueurs de 12 à 23 ans (salaires d’entraîneurs de jeunes, etc). C’est sérieusement contrôlé par le département des licences.

Et l’épargne-pension ?

Pour un pro de D1 (dans les autres divisions, c’est facultatif, et vu la situation financière, peu de clubs de D2 souscrivent une assurance-groupe), le club doit obligatoirement payer le salaire mais aussi un pourcentage du salaire en plus à cette épargne-pension souscrite dans une société, la banque ou compagnie d’assurance.

La somme totale versée sur un compte et les intérêts iront au joueur à 35 ans. Le but, c’est de faire une épargne obligatoire pour les joueurs et éviter qu’ils dilapident leur argent pendant et se retrouvent démunis au moment d’entamer leur reconversion.

Le joueur sera imposé sur cette somme, mais avec un taux d’imposition favorable.

NB : un joueur qui fait une longue carrière en Belgique (par exemple de 20 à 35 ans) ne verra pas les effets de l’imposition fiscale quand il ira retirer l’argent de son assurance groupe car les intérêts couvriront la taxation.

Et les salaires garantis ?

Les clubs qui offrent un salaire garanti (indépendant du nombre de matches joués et des résultats) à certains joueurs leur tiennent ce type de raisonnement :  » On te propose un million dans un autre championnat, et encore 500.000 euros si ton équipe y fait une très bonne saison. Chez nous, tu peux avoir 1,2 million garanti, quel que soit ton parcours et celui de l’équipe.  » Cela fait réfléchir des footballeurs qui se laisseraient aveugler par l’herbe de l’étranger.

Que gagnent les entraîneurs ?

Beaucoup d’entre eux sont rémunérés de la même manière que leurs joueurs : un fixe et des primes par match ou par classement final.

Que touche le joueur blessé ?

Généralement, il touche les primes de victoires pendant le premier mois de son indisponibilité. Ensuite, il n’a plus que son fixe, et après six mois, c’est la mutuelle qui prend le relais du club avec un salaire dégressif.

Les primes à la signature sont-elles intéressantes ?

Elles sont offertes aux joueurs libres qui changent de club mais sont souvent un miroir aux alouettes : si le nouveau club verse ce type de prime, le salaire diminue automatiquement. Elles disparaissent d’ailleurs de plus en plus.

Les commissions des agents font-elles partie des salaires ?

Non, elles sont presque systématiquement payées par les clubs acquéreurs. Selon le règlement de la FIFA, la commission oscille entre 5 et 10 % du salaire annuel brut du joueur et doit être versée durant chaque année du contrat.

En Belgique, la loi stipule ceci :

-sur le territoire flamand, la norme est de 7 % du salaire brut de la première saison de contrat et la commission ne doit être payée qu’une seule fois,

-en Wallonie et à Bruxelles aussi, c’est une commission unique qui tourne autour des 10 %.

Un salaire d’un an, c’est 12 mois ?

Oui, c’est un contrat d’employé et les joueurs sont payés en juin, juillet, août, même s’il n’y a pas de matches.

Qui paye les joueurs prêtés ?

En fait, on ne parle plus de prêt mais de mise à disposition. La saison passée, par exemple, les joueurs de Courtrai ont été mis à disposition par le club où ils sont sous contrat.

PS : Charleroi a mis David Vandenbroeck à disposition de Courtrai, paie le joueur mais envoie une facture avec TVA à Courtrai qui paie la facture. L’employeur reste Charleroi, et c’est un détail important en cas de blessure, notamment.

Il y a des cas où il y a des arrangements triparties – les deux clubs et le joueur – pour que le club où un joueur est mis à disposition paie une partie du salaire.

Les joueurs ont-ils un pécule de vacances ?

Oui, comme tous les employés, ils reçoivent un double pécule de vacances. Ils touchent aussi des primes syndicales, etc.

En quoi consistent les fameuses primes ?

Les joueurs ont généralement une rémunération fixe (le salaire fixe) et une rémunération variable (les primes).

Un club est obligé d’offrir des primes aux joueurs, y compris Coupe de Belgique et, le cas échéant, Coupe d’Europe.

Il y a des minimums légaux pour les primes. On n’est pas obligé de le faire match par match, on peut les englober dans le salaire général, mais ce n’est pas l’habitude en Belgique : on veut un rendement à la prestation.

Ces primes sont variables selon les clubs et peuvent être déterminées en fonction des points obtenus, la place au classement, le nombre de buts inscrits, etc.

Y a-t-il encore beaucoup d’argent noir ?

La licence oblige les clubs à tenir une comptabilité, à faire réviser leur bilan. Lors des visites, le contrôleur prend des contrats au hasard et regarde si tout a été fait légalement. En fait : avant leur contrôle, les contrôleurs annoncent trois contrats qu’ils vont vérifier et en déterminent un quatrième au hasard. C’est donc un peu comme un contrôle antidopage : on peut passer à travers les mailles du filet si le contrat frauduleux n’est pas contrôlé, mais si on est pris…

La D2 paye encore bien ?

Il n’y a plus de droits TV alors que les clubs ont des charges (sécurité, obligation d’avoir 17 sportifs rémunérés sous contrat, etc.) Il y a urgence : il faut faire passer la D2 hors du football rémunéré, car cela n’a plus de sens. Ce ne sont pas les 100 supporters adverses qui nécessitent l’obligation de grands travaux dans le stade.

Actuellement, la convention collective permet – avec l’accord du joueur – de diminuer de 20 % le contrat d’un joueur dont le club descend de D1 en D2, mais souvent, pour ce club-là, le contrat moins 20 % est encore trop lourd à supporter.

Raisonnablement, les joueurs de D2 ne pourraient être que des sportifs rémunérés à temps partiel, c’est-à-dire ayant un job professionnel ou d’étudiant en dehors.

Y a-t-il des abus concernant des joueurs sous-payés ?

Cela peut difficilement arriver dans le football rémunéré, en D1 ou en D2, vu les contrôles auxquels ces clubs sont soumis. Dans les autres divisions, c’est plus difficile à contrôler. On met des joueurs dans des petits appartements et on leur dit -Débrouille-toi. On sait que c’est arrivé, et il y a eu des procès. l

Les footballeurs en Belgique sont-ils vraiment riches?

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