Qu’est ce qui explique l’éclosion furieuse du jeune Brésilien ?

« Ce gars est un phénomène. Comment pourrais-je être jaloux de lui, puisque j’ai conseillé à Milan de l’acheter ? » Ces mots sont ceux de Rivaldo et le phénomène en question a 21 ans et se nomme Ricardo Izecson Santos Leite, alias Kaka. On peut prendre au sérieux les compliments du médian créatif : d’une part il les dispense généralement avec parcimonie. D’autre part, ils ne manquent pas d’objectivité puisque l’arrivée du petit prodige l’a contraint à cirer le banc milanais plus souvent qu’à son goût, jusqu’à son récent transfert au Cruzeiro Belo Horizonte.

Ces derniers mois, nombreux furent d’ailleurs les bons mots à l’égard du très prometteur milieu de terrain. Après le derby milanais remporté 3-1 contre l’Inter en octobre dernier, Pelé lança :  » Il a vraiment très bien joué. Je ne suis pas surpris qu’il ait déjà trouvé sa voie dans le foot italien « . Des propos banals ? Il n’en est rien : la tradition du calcio veut que même les grands joueurs mettent toujours du temps à s’y acclimater. Dans le passé, même Michel Platini ou Zinedine Zidane ont mis six mois à s’adapter. Alors, comment un jeune Brésilien de 21 ans a-t-il fait pour réussir d’emblée alors que Milan ne comptait l’introduire qu’en 2004-2005 dans son noyau A ?

Grâce à son… talent, tout simplement ! En deux mois, il a aussi relégué Rui Costa et la classe pure du cadet des Brésiliens alliée à la présence de ses compatriotes ( Cafu, Dida, Serginho et… Rivaldo) auront sans doute facilité l’éclosion.

Diamant brut

Kaka est relativement grand (1m83) et costaud, grâce aux nombreuses heures passées au club de musculation. Milieu de terrain pur jus, il allie la vitesse et l’équilibre d’un attaquant au physique d’un défenseur. Sa capacité à jouer indistinctement des deux pieds et un très bon jeu de position complètent sa panoplie. Sans oublier que Kaka n’est pas vraiment un magicien du ballon, un dribbleur fou mais qu’il passe et donne des assists avec la précision d’une machine. Ces qualités en font un diamant brut que certains n’hésitent déjà plus à comparer à Platini ou à Francesco Totti. Les plus enthousiastes l’ont déjà baptisé le Phénomène II, allusion au surnom donné à Ronaldo.

En août dernier, le club a déboursé 8,2 millions d’euros pour s’assurer ses services. Adriano Galliani, le vice-président du Milan AC raconte :  » Il y a trois ans environ, notre scout au Brésil nous a mis sur la piste de Kaka. Nous avons visionné une vidéo le concernant et avons décidé de le garder à l’£il. A l’époque, il n’avait que 18 ans mais possédait déjà une classe très rare « . C’est finalement un autre ancien de la maison milanaise, le Brésilien Leonardo, qui persuade Kaka de signer en Lombardie. A São Paulo, il s’était entretenu avec Kaka et, du coup, Milan tenait sa nouvelle star.

Même lorsque le président milliardaire de Chelsea, le Russe Roman Abramovich, tenta de s’accaparer la perle brésilienne en lui promettant un salaire mirobolant, Kaka tint parole.  » Ce geste, le club ne l’oubliera pas de sitôt « , conclut Galliani. Mais l’intérêt de Chelsea et la place accordée à ce feuilleton dans les médias brésiliens étaient si importants qu’ils forcèrent Galliani à anticiper d’un an l’arrivée du prodige en Italie, histoire d’empêcher que l’une des autres puissances du foot européen ne lui vole son prodige.

Pas un enfant des bidonvilles

Ce que Kaka ne partage pas avec Ronaldo, ce sont ses origines. Il a vécu sa jeunesse à Brasilia, dans une famille de la classe aisée. Un père ingénieur, une mère prof de maths, ça change du cliché  » pauvre enfant des favelas qui doit lutter et n’a que le foot pour s’en sortir « . Si le ballon rond ne lui avait pas si bien réussi, Kaka n’aurait sans doute pas eu de mal à trouver un boulot. Sa réputation footballistique, il l’a d’abord forgée avec les Juniors brésiliens et ensuite au FC São Paulo, lorsqu’il y débuta en 2000. Et en 2002, à 19 ans, il fut le plus jeune Brésilien de l’histoire à remporter une Coupe du Monde.

Selon Adriano Galliani, le président milanais faisant fonction, il fait preuve de beaucoup de maturité vu son jeune âge. Son passé l’a aidé à rapidement trouver ses marques dans son nouvel environnement. Plutôt que d’être intimidé par les Shevchenko, Inzaghi, Pirlo, Seedorf, Nesta ou Maldini, il a très vite donné l’impression d’avoir déjà évolué la moitié de sa vie à leurs côtés.

Le  » clan des Brésiliens  » a également escorté le petit nouveau à l’occasion d’expéditions… culturelles à Venise et à Vérone. Des excursions pour un gamin de 21 ans, cela en dit également beaucoup sur la maturité du bonhomme.

En ce début d’année, un fait passé presque inaperçu indique l’importance que Kaka revêt pour l’AC Milan. Sa titularisation en équipe nationale des -23 ans û qui dispute actuellement un tournoi qualificatif en AmSud avec pour objectif les JO d’Athènes û était prévue mais a été refusée par les Milanais. Le club rossonero n’aimait pas l’idée de devoir se séparer de son talent pour une période si longue, sans compter les risques de fatigue ou de blessure.

Enfin, un mot sur son son patronyme, synonyme de beaucoup de railleries au début puisqu’en Italie aussi, il désigne le terme enfantin pour les excréments. Plus jeune, Rodrigo, son frère cadet, n’a jamais pu prononcer entièrement son vrai nom (Ricardo), d’où le diminutif quelque peu incongru. Mais Kaka ne s’embarrasse pas de telles considérations. n

Philippe Etienne

Philippe Etienne

Son petit frère ne savait PAS PRONONCER  » RICARDO  » !

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