Le bon ego

L’Américaine ne s’intéresse plus qu’à elle-même et ça marche!

Mais le 25 février dernier, alors qu’elle venait de reprendre le chemin de l’entraînement suite à son nouveau succès en Australie, l’Américaine fut détrônée par Venus Williams… Mais plus que jamais, la New Yorkaise de naissance bénéficie toujours d’un énorme capital sympathie auprès de ses concitoyens.

Jennifer, votre deuxième victoire à l’Open d’Australie a prouvé que l’attention autour de votre personne continue de croître. ESPN, la chaîne sportive américaine qui retransmettait la finale, a enregistré son deuxième meilleur taux d’audience pour un match de tennis. Le deuxième succès était-il plus doux que le premier?

Jennifer Capriati: Difficile à dire. Le premier était ma première victoire en Grand Chelem. Et le deuxième, a été obtenu après avoir sauvé quatre balles de match face à Martina Hingis. J’ai vraiment dû me battre jusqu’au plus profond de moi-même pour m’imposer dans une chaleur étouffante. Les pires conditions de jeu que j’ai jamais rencontrées sur un court de tennis.

Après un tel match avez-vous éprouvé un peu de sympathie pour Hingis?

Aucune! Si elle avait été dans ma situation, je suis persuadée qu’elle n’en aurait éprouvée aucune pour moi. Dès lors…

L’année dernière fut incroyablement belle après tous vos problèmes d’adolescente. Comment êtes-vous arrivée à vous concentrer si bien à Melbourne cette année?

J’avais peur en me rendant en Australie, je l’avoue. J’étais fort nerveuse lors de mes premiers matches. Défendre son titre n’est jamais facile. Beaucoup de regards se tournent vers vous. Et je ne veux pas me décevoir. Je ne voulais pas me laisser gagner par mes émotions. Je voulais voir si j’étais capable de les contrôler et, peut-être, d’aller jusqu’au bout. J’avais eu un très long break et cela m’avait fait un bien fou. Lorsque j’ai repris l’entraînement, j’ai ressenti une nouvelle soif de victoires. J’avais l’impression de recommencer ma carrière.

Andre Agassi plaisantait récemment au sujet de vos victoires en Grand Chelem. Il disait notamment que c’était déjà de l’histoire ancienne. Mais il ajouta que défendre un titre majeur représente un pas important dans une carrière…

Je crois que c’est encore plus difficile que de s’imposer pour la première fois. Vous ne devez pas uniquement vous battre contre une adversaire mais également contre beaucoup de souvenirs. Et vous voulez autre chose que les 15 minutes de gloire qui vous ont vu monter sur le podium pour aller chercher le trophée. J’ai effectivement la sensation d’avoir franchi un nouveau pas. Le challenge était énorme et je l’ai relevé.

Le rôle du père

Vous avez souvent répété que votre père est votre entraîneur idéal. Comment parvient-il à séparer son rôle de papa et celui de coach?

Il restera toujours mon père, quoi qu’il arrive. Je crois qu’il parvient très bien à trouver le juste équilibre. Nous avons vécu beaucoup d’expériences ensemble. Vous savez, je suis presque une vieille sur le circuit! Lui aussi, ce qui fait que nous savons comment va la musique. Plus vous vieillissez et plus vous mûrissez. Et on se connaît sur le bout des doigts. Il sait quand j’ai besoin de lui en tant que père et quand je préfère m’adresser à l’entraîneur.

Quel conseil donneriez-vous à de jeunes joueuses coachées par leur père?

La plus belle des choses est d’avoir sa famille à ses côtés pendant toute l’année. Aucun autre soutien ne peut être plus intense. Une bonne et franche communication est importante. Quand on est jeune, on a parfois des difficultés à communiquer. Vos parents vous aiment et c’est ce dont il faut se souvenir le plus. Ils n’essaieront jamais de vous blesser; ils tenteront toujours de faire ce qu’ils croient être le mieux pour vous. Il faut l’accepter parce qu’au moins, leurs intentions ne peuvent jamais être mises en doute.

Vous avez annoncé que vous ne jouerez pas à Indian Wells. Pourtant, Venus et Serena Williams seront absentes, ainsi que Lindsay Davenport. L’occasion aurait été belle d’y prendre quelques points supplémentaires, non?

Comme je l’ai déjà laissé entendre, beaucoup jouer n’a jamais été une très bonne chose pour moi. Pour continuer à m’amuser sur le circuit, pour me maintenir au top pendant longtemps, il faut que je fasse les choses dont j’ai envie. Je ne peux pas jouer, satisfaire mes sponsors et me soucier, semaine après semaine, de mes points et de mon classement. Je pars du principe que si je joue bien les tournois auxquels je participe, mon classement suivra de toute façon.

Les soeurs Williams avaient été copieusement huées à ce même tournoi l’an dernier suite au forfait de Venus annoncé une heure avant son match. Croyez-vous qu’elles chercheront à rendre aux Californiens la monnaie de leur pièce?

Je ne sais pas ce qui s’est passé parce que j’étais absente. J’ai entendu ce qu’on m’en a raconté, sans plus, et je pense que quand on ne connaît pas les tenants et les aboutissants d’une histoire, il faut laisser à chacun le bénéfice du doute. Les huées des spectateurs étaient exagérées.

Y a-t-il également un problème d’adaptation entre Indian Wells et Key Biscayne, disputé la semaine suivante?

Oui. Key Biscayne se joue à Miami, la ville où j’habite. Je l’appréhende donc différemment. Et puis, il y a aussi le décalage horaire entre la Californie et la Floride et surtout d’importantes différences de conditions climatiques. Dans le désert d’Indian Wells, il peut faire très froid si vous jouez en soirée. Les trajectoires de la balle sont très particulières et n’ont rien à voir avec celles de Key Biscayne où il fait très chaud.

La WTA est très exigeante

Cette année, la WTA a ajouté des points au tournoi d’Indian Wells pour tenter de le rendre plus incontournable pour les meilleures joueuses. Cela ne semble pas marcher. Pensez-vous que les responsables du circuit féminin devraient faire autre chose pour attirer ses stars aux grands tournois?

C’est une bonne question. Je crois qu’aujourd’hui, les joueuses font ce que bon leur semble. Le tennis est un sport très dur, très rigoureux. Ce n’est pas de leur faute. C’est juste le jeu qui veut ça. Les responsables de la WTA devraient être au contraire heureux que nous continuions à jouer à travers le monde durant toute l’année. Nous ne sommes pas capables de disputer tous leurs tournois. Peut-être devrions-nous être débarrassées de davantage de petits tournois. Ainsi, nous nous concentrerions probablement plus sur les grandes épreuves. Cela couperait pas mal de temps de jeu et condenserait quelque peu la saison. Ceci dit, je tiens à signaler que les joueuses disputent plus de tournois qu’elles n’en ratent.

La WTA vient de changer de président, Kevin Wulff (un ancien de Nike) a remplacé Bart McGuire. Même s’il est encore fort tôt pour se prononcer, que pouvez-vous nous en dire?

Rien, sauf que beaucoup de choses sont en train de se passer. Je le sais parce que je participe, comme tout le monde, aux réunions des joueuses lors des tournois du Grand Chelem par exemple. Je pense qu’il est en train d’évaluer la situation afin de rendre tout le monde plus heureux. Son souhait est de faire du tennis professionnel une grande famille où tout le monde aurait le sourire. Il va avoir du boulot!

Quels sont les points qui vous tiennent le plus à coeur en ce moment?

Le calendrier pourrait être revu. La manière d’attribuer les points également. Je me sens fort concernée par la situation des joueuses moins bien classées. Elle devrait être améliorée parce qu’elles contribuent également au succès du tennis féminin. Et puis, il y a aussi des petits détails plus internes à la vie du circuit tels que les entraînements en tournois ou les soins, mais je ne tiens pas à en dire plus pour l’instant.

Votre jeu puissant vous rend redoutable sur les surfaces rapides. Mais l’on a vu également que vous pouvez être très forte sur terre battue comme le démontre votre victoire à Roland Garros. Eprouvez-vous beaucoup de difficultés à vous adapter à la saison sur brique pilée?

Vous savez, la messe est la même depuis des années. J’ai eu le temps de savoir comment m’y prendre! Franchement, je me considère comme une joueuse capable de briller sur toutes les surfaces. Pour en revenir à la terre battue, j’entraîne plus mes coups liftés mais la chose la plus importante est de se concentrer sur son déplacement. Sur terre, il est totalement différent qu’ailleurs. Savoir glisser est d’une importance capitale et n’est pas donné à tout le monde. Enfin, je soigne tout particulièrement ma condition physique vu la longueur des échanges.

Ressentez-vous moins de pression cette année grâce à tout ce que vous avez réalisé en 2001?

Pas vraiment. Surtout après ma victoire en Australie. Mais je ne me soucie que de moi-même. C’est mon credo. Je n’ai plus rien à prouver au public. Tout ce que je recherche, c’est de savoir ce que je peux réellement donner et jusqu’où je peux aller. Je ne m’attends pas à gagner chaque tournoi ou à répéter ce que j’ai réalisé l’année précédente. Tout ce que j’exige de moi-même, c’est d’être aussi bonne que lors de mon dernier match. Je les prends un à un. A chaque fois que je monte sur le court, c’est un nouveau départ.

Et votre médaille d’or à Barcelone il y a dix ans, vous vous en souvenez?

Et comment! Ce fut l’un des plus grands moments de ma carrière. Elle m’a procuré une joie presque aussi forte qu’une victoire en Grand Chelem. Lorsque vous montez sur le podium pour aller chercher votre médaille, les choses se bousculent dans la tête. On repense à tout le travail accompli pour arriver là et on se sent la meilleure du monde.

Florient Etienne,

« A Melbourne, les conditions étaient épouvantables »

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