La vie à 2 A la rencontre des Thans Maison rouge et gamins.

La maison rouge des Thans se dresse, à Embourg, sur les hauteurs de Liège. Les nombreuses baies vitrées offrent un coup d’oeil magnifique sur les alentours et… sur les superbes terrains de jeunes du REV Chaudfontaine, dont Benoît s’occupe.

Quelles sont vos activités, en-dehors de votre carrière professionnelle?

Benoît Thans : Je gère les activités de 6.000 jeunes par an. Foot 2000 a pris beaucoup d’ampleur. Grâce à l’aide de la Province de Liège, nous offrons un complément d’entraînement aux jeunes, à raison de deux séances par semaine. Nous aidons aussi les clubs. En plus, nous organisons des stages à des prix démocratiques. A leur terme, les enfants reçoivent des cadeaux liés au foot. Certains stages ont lieu à l’étranger. Jean-François Lecomte s’occupe des gardiens. Un entraîneur s’ocuupe de 3, 4 ou 5 enfants maximum. A Pâques, ils étaient 800. Mon objectif ultime serait de finaliser une véritable école avec les gens qui m’entourent. Pas seulement pour le football, pour tous les sports, toujours avec un encadrement de qualité: des théoriciens qui ont un vécu, car il faut montrer les bons gestes aux enfants. Mon projet vise les écoles primaires car ce n’est pas à douze ans qu’on apprend à tenir sa cuiller de la main droite. Je veux communiquer ma passion du beau foot aux jeunes. J’ai repris le tournoi Sljivo avec un ami, Jacobi, et la Province. Et puis, j’aide un peu le REV Chaudfontaine, en voisin. Il y a aussi la RTBF. C’est un hobby, une expérience qui m’apporte beaucoup.

Vous prolongez votre carrière d’un an?

Oui. C’est ma passion. J’arrêterai le jour où mon corps me lâchera.

Vous avez déjà votre diplôme d’entraîneur, vous parlez couramment le néerlandais… De quoi sera fait votre avenir?

J’ai de nombreuses possibilités mais qu’en adviendra-t-il? Je pourrais travailler pour un club ou m’investir dans un projet privé. Je me suis toujours battu pour mon image et je peux retourner dans tous mes clubs. Je sais ce que je veux. J’ai du caractère. Je me suis battu pour émerger, après des blessures, de la D3. Malheureusement, pour les joueurs de ma génération, la reconversion reste difficile. Il faut s’investir énormément

Vous occupez-vous beaucoup de vos enfants?

Je ne pipe pas un mot quand je les vois jouer. J’entends tellement d’âneries au bord du terrain… Les gens ne pensent qu’au résultat. C’est tout le temps Lâche ta balle!. Ça me rend fou car il faut que les gosses apprivoisent le ballon. Les équipes de jeunes du REV sont en tête parce qu’elles jouent bien mais au début, elles ont pris des casquettes.

Et vos enfants?

Maxime est très calme, très poli. Il ne vit pas toujours très bien ma médiatisation. Anne est d’ailleurs très discrète aussi: c’est sa première interview en vingt ans! Matthieu est fidèle en amitié, il est très volontaire. Martin est un mélange des deux. Ses aînés le gâtent et lui apprennent des tas de choses.

Anne joue un rôle très important.

Elle m’épaule et elle est la garante de notre vie familiale. Elle a beaucoup de personnalité. Nous nous sommes rencontrés à l’âge de 17 ans. C’est la première qui a refusé de prendre un verre avec moi. La réussite d’un sportif dépend souvent de sa femme. Fille d’indépendants, elle a eu elle-même un commerce, elle sait ce que travailler signifie.

Vous faites tout à deux?

Oui. Nous avons peu de loisirs. J’aime le bon vin et j’essaie de m’y retrouver, nous allons de temps en temps au restaurant mais surtout, nous adorons recevoir des amis. Notre maison est un vrai foyer. Ce n’est pas une question d’argent: notre villa est simple et vivante.

D’où vient cette association de moderne et d’ancien?

De Suisse, où l’influence architecturale est très forte. C’est pour ça que la maison est rouge. Nous nous sommes aussi inspirés du Maroc. Nous voulions de grandes fenêtres pour que la maison soit lumineuse.

La famille d’Anne Debruge exploite une boucherie extrêmement réputée dans la région liégeoise. Lorsqu’il le faut, elle n’hésite pas à retrousser ses manches pour y donner un coup de main. Dynamique, Anne s’occupe également de ses trois fils, Maxime (12 ans), Matthieu (10) et Martin (2), sans oublier l’administration de Foot 2000.

Benoît a une secrétaire mais je l’aide à enregistrer les inscriptions, à gérer l’administration. Je m’intéresse au football mais autant à celui des jeunes qu’à celui des adultes. Je rate peu de matches de Benoît, sans être fanatique. D’ailleurs, à la fin de la saison, je commence à en avoir ras-le-bol.

Vous arrive-t-il de déconnecter?

Rarement! Benoît ne sait pas dire non et on n’en sort plus. Le téléphone n’arrête pas de sonner. Nous menons une vie très décousue, sans jamais rien prévoir.

Vous possédiez un superbe salon d’esthétique, que vous avez remis pour suivre Benoît à Lens puis en Suisse. Vous ne le regrettez pas?

Je le suivrais encore si c’était à refaire. J’avais 21 ans lorsqu’il est parti à Lens. En Suisse, nous avions déjà les deux aînés. Je n’avais pas la maturité nécessaire pour apprécier pleinement ces moments, pourtant fantastiques. Nous avons beaucoup visité le pays, étudié l’italien. Enfin, comme Benoît se moquait de moi, j’ai arrêté. Savez-vous que nous sommes restés en contact avec des familles suisses? Nous y organisons un stage chaque année, d’ailleurs. Ceci dit, je regrette mon salon. J’aurais dû trouver une autre formule, bien qu’avec les enfants et la maison, mes journées soient déjà bien remplies.

Vous avez trois fils. N’avez-vous pas été déçus que le petit dernier soit aussi un garçon?

(Elle rit) Autant que Scifo avec ses trois filles! Nous avons eu un bref moment de déception, vite éclipsé car l’essentiel est qu’il soit en bonne santé. En fait, Martin rentre dans le circuit. Avec une fille, j’aurais sans doute été déboussolée…

Quel genre de parents êtes-vous?

Je suis exigeante, Benoît est un papa gâteau, par manque de présence, mais ce n’est pas à moi de toujours jouer les gendarmes. Nous essayons d’inculquer des valeurs à nos enfants: le respect, l’attachement familial, le fait qu’on n’a rien sans effort dans la vie. Ils doivent se rendre compte qu’ils sont privilégiés. Maxime a assisté à France-Paraguay, pendant la Coupe du Monde. Il nous accompagne aux matches. Combien d’enfants n’en rêvent-ils pas?

Avez-vous votre mot à dire lorsque Benoît envisage un transfert?

Il suit sa première idée. J’ai adoré Westerlo. C’est un club sympathique, familial, il y règne une ambiance formidable. C’est là que j’ai retiré quelque chose du football, pour la première fois. Pas en tant que femme de joueur car j’ai eu peu de contacts avec les autres: je suis souvent accompagnée de mes enfants et de ma famille. Je n’aime pas ce que racontent les femmes du football ni les cancans.

Comment vivez-vous votre statut de femme de joueur?

Ça n’a rien d’exceptionnel. Le stress est intense pendant le match mais le football apporte une richesse sociale, un piment, à la vie. On y fait la connaissance de beaucoup de gens, nous avons quelque amis. Toni Brogno est un garçon exceptionnel, par exemple. Nous essayons de mener une vie équilibrée. Ça représente 50% du succès. Normalement, être femme de joueur, c’est attendre. Tout le temps. Si nous allons au restaurant, ou boire un verre, ce qui est rare, il se trouve toujours quelqu’un qui vient lui parler. Et moi, j’attends. Encore que je ne reste pas muette. Je me lance, au feeling. Qu’il s’agisse de l’entraîneur ou d’un réserviste, je lui adresse la parole si j’en ai envie, et de la même façon. D’ailleurs, je ne reconnais pas les gens. Une fois, j’ai entamé la conversation avec Paul Van Himst et je lui ai avoué avoir l’impression de l’avoir déjà vu quelque part! Il l’a très bien pris.

Pascale Piérard.

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