La triathlète

Véritable boulimique de l’activité professionnelle, l’ancienne championne est aussi devenue capitaine de l’équipe de Fed Cup qui jouera la Chine les 14 et 15 juillet à Knokke.

C’est début 2001 que Sabine Appelmans (35 ans) a quitté le circuit professionnel. Son dernier tournoi ? L’Australian Open :  » Plus pour des raisons touristiques que tennistiques « . Six ans et quelques mois plus tard, nous la retrouvons, non pas à Erembodegem où elle a vécu sa jeunesse avec ses parents et son frère mais à Asse, dans une belle maison située Museum Straat. Toujours aussi souriante qu’avant, mais parfois perturbée par les pleurs de son dernier rejeton, celle qui fut un jour 16e joueuse mondiale nous reçoit comme elle l’a toujours fait, avec gentillesse et enthousiasme.

Sabine, qu’avez-vous fait depuis 2001 ?

Sabine Appelmans : J’ai travaillé comme speakerine à la VRT (télévision flamande) et j’ai ensuite animé pendant deux ans des séquences de l’émission Sport Week-end. Après ces deux saisons, l’émission s’est consacrée quasiment uniquement au football et j’ai donc mis fin à ma collaboration. Ce qui ne m’empêche pas d’être consultante tennis sur les tournois et de prendre régulièrement part à des talk shows. Je participe aussi régulièrement à des actions d’entreprises et joue parfois le rôle de relations publiques. Et je viens de signer un contrat pour donner des stages de tennis six semaines par an en Turquie…

Vous avez besoin de travailler ?

Je n’imagine pas ne rien faire de mes journées et j’aime me fixer des objectifs. Et puis, quand on a deux enfants et une grande maison, cela ne fait jamais de tort de gagner un peu d’argent ( rires)…

C’est vrai, vous avez aussi donné naissance à deux petits garçons ?

Oui, Serge (Haubourdin, son mari) et moi sommes parents d’Obi, six ans, et Arnaud, quasi trois ans.

Pendant ces cinq années, vous vous êtes manifestement éloignée du monde du tennis.

Oui et non. Oui parce que je ne jouais quasiment plus et que je ne venais pas souvent sur les tournois. Non parce que j’ai toujours commenté les matches pour la VRT. Ce que je continue d’ailleurs à faire. J’ai également suivi des cours pour passer mon brevet d’entraîneur B à la VTV (fédération flamande). Et, régulièrement, je me suis rendue au centre de Wilrijk pour frapper la balle avec des jeunes espoirs.

Mais c’est réellement il y a quelques mois que vous avez effectué votre grand retour, devenant capitaine de l’équipe belge de Fed Cup. Vous étiez-vous portée candidate pour ce poste ?

Non, pas vraiment, mais les dirigeants savaient que cela pouvait m’intéresser.

Pourtant, vous étiez consciente de prendre en main une équipe orpheline de Justine Henin et Kim Clijsters…

Oui et cela ne me dérangeait pas du tout. Ce qui me plaît, c’est d’être en compagnie des meilleures joueuses d’un pays. Que ces joueuses soient ou non dans le top mondial ne m’influence pas. Ce qui est motivant, c’est d’essayer d’amener les talents à donner le meilleur d’eux-mêmes.

Reste que l’équipe est bien partie pour descendre en Division 2.

Sans doute mais cela ne me pose pas de problèmes. Quand je fais quelque chose, j’essaye toujours de le faire à fond. Que l’équipe soit dans le Groupe Mondial ou en division inférieure ne change rien au challenge d’une capitaine. Mon rôle est de pousser les jeunes vers le haut, sans savoir à quel niveau se situera leur sommet personnel.

Quelles sont-elles, les futures championnes de demain ?

Yanina Wickmayer (WTA 398) a certainement le potentiel pour entrer un jour dans le Top 100 mondial, ce qui est déjà une très belle performance. Quant à Tamaryn Hendler (pas classée en WTA), elle dispose de qualités évidentes mais elle n’a que 14 ans et il est trop tôt pour estimer quel sera son classement maximum. Ce que je peux dire, c’est qu’elle a une accélération de coup droit phénoménale mais, aussi, quelques faiblesses. Elle a une bonne condition physique mais ne bouge pas encore parfaitement. Nick Bollettieri, qui sait tout de même de quoi il parle, affirme que Tamaryn sera au moins dans les 60 premières et sans doute dans le Top 30.

Et que dire d’Aude Vermoezen (WTA 1072), que vous avez appelée d’extrême justesse ?

Il ne faut pas juger Aude sur son classement et les résultats des dernières saisons car elle a été blessée très sérieusement au cours des deux ou trois dernières années. Qui plus est, elle suit toujours des cours à l’école et il faudra donc attendre un peu pour savoir ce qu’elle peut faire sur le circuit pro.

Mais vous ne pouvez nier qu’il y a un fameux trou du côté féminin.

Effectivement, et il faudra sans doute attendre les joueuses qui ont 12, 13 ans aujourd’hui pour combler ce trou.

Comment expliquer ce trou, alors que, depuis les années 80, les deux ailes linguistiques, et surtout la VTV, ont toujours sorti, si pas des champions comme Henin ou Clijsters, du moins des joueurs du top 100 ?

Franchement, je pense que c’est dû au hasard. Quand je vais à la VTV, je constate qu’ils travaillent de manière encore plus professionnelle que de mon temps. Or, il y a quelques années qu’ils n’ont plus sorti des joueurs comme Van Garsse, Goossens, Dewulf ou des joueuses comme Courtois, Feber ou moi. Mais regardez l’Angleterre, malgré l’argent généré par Wimbledon, elle court après des champions et, même, après des joueuses du top 100. Le travail n’est pas tout, il faut aussi avoir un peu de chance.

L’énorme progression globale

Le tennis a aussi beaucoup évolué, non ?

J’ai été voir les Juniores à Roland Garros et j’ai été impressionnée par la qualité de leur jeu et, surtout, par leur professionnalisme. De mon temps, quand on avait 14 ou 15 ans, le tennis était encore un jeu. Nous jouions quelques tournois sur l’année, alors qu’aujourd’hui, les jeunes en disputent une vingtaine. Physiquement, l’évolution est terrible : elles sont toutes très grandes, très puissantes, très fortes.

Ce qui n’était pas vraiment votre cas, ni celui de Dominique Monami….

Non, c’est vrai. Je précise aussi que Dominique et moi avons terminé nos humanités avant de nous lancer réellement dans la vie professionnelle.

Ce qui explique peut-être le fait que, toutes les deux, vous paraissez être en bonne santé alors que l’on sait que les Henin, Clijsters ou autres joueuses de leur génération quittent (ou quitteront) le circuit dans un état physique relatif…

Le tennis étant devenu plus exigeant, les jeunes filles prennent des risques. Et comme les managers sont présents très tôt sur les circuits pour jeunes, elles veulent toutes être repérées le plus tôt possible et, pour être remarquées, elles doivent gagner. Or, pour gagner, il faut être musclée et puissante. La boucle est bouclée mais pas sans danger.

En quelle forme êtes-vous ?

Plutôt bien. Je n’ai pas de bobo. Je me prépare d’ailleurs pour disputer un triathlon. Un huitième de triathlon, mais c’est déjà pas mal, non ? ( rires)

Jouez-vous encore au tennis ?

Oui, je prends part aux interclubs allemands des dames de 30 ans, je suis dans la même équipe que Dominique.

Interclubs allemands qui sont toujours très relevés. Quel est votre niveau tennistique ?

A mon avis, je joue encore largement au niveau des B-15,4 (classement avant la première série).

Ce qui veut dire que vous êtes du niveau des joueuses qui rencontreront les Chinoises …

Disons que je peux facilement les entraîner mais il faudrait voir ce que cela donnerait en compétition.

Selon nos informations, vous avez été tentée de demander à Dominique Monami de faire partie de l’équipe de Fed Cup…

Oui, c’est exact. J’y ai pensé et j’en ai parlé avec elle. Je pensais que Dominique pouvait être un super moteur dans une équipe composée de très jeunes joueuses. Je suis certaine que si elle s’était entraînée pendant un mois, elle aurait pu jouer le double sans problème. Mais finalement, j’ai laissé ce projet de côté.

Juju, entre Wimbledon et la Fed Cup ?

On imagine que vous avez aussi pensé à… Justine Henin.

(Rires). Bien entendu ! J’étais à Roland Garros mais j’ai préféré ne pas évoquer le sujet avec elle car elle avait d’autres chats à fouetter. Par contre, Carlos (Rodriguez, le coach de Henin) et moi avons eu une très longue discussion pendant laquelle il m’a expliqué les raisons pour lesquelles Justine n’avait pas inscrit la Fed Cup dans son calendrier. Il avait laissé le choix à Justine, lui précisant qu’une participation à une Fed Cup coûtait deux ou trois semaines d’autres compétitions. Justine a donc opté pour les tournois. Ce que je peux comprendre car des championnes de ce niveau se fixent au minimum cinq objectifs par an (les Grands Chelems et les Masters) ce qui est déjà beaucoup. Si elle devait ajouter la Fed Cup, je pense que ce serait trop.

La porte est-elle définitivement fermée ?

Non, pas du tout, il est prévu de se revoir en fin de saison.

Vous pensez que Justine jouerait en division inférieure ?

Je ne pense pas que cela influence son choix. Quand Justine s’engage, elle s’engage à fond. Que ce soit en première ou en deuxième division n’y change à mon avis rien. Si elle accepte ma sélection, elle jouera tout à fond. Elle est un exemple incroyable pour toutes les joueuses du monde.

Mais l’année prochaine, il y a aussi les Jeux…

Je sais. Ce ne sera pas simple mais je répète que si je préfèrerais que Justine soit dans l’équipe, ma motivation de capitaine n’est pas influencée par son absence.

Quel est le contrat qui vous lie à la Fed Cup ?

Tant que les joueuses veulent de moi et que je prends du plaisir, je continue. Et si la fédération est satisfaite de mes services, évidemment.

Au moment de lire ces lignes, nos lecteurs sauront si Justine est en demi-finales ou en finale de Wimbledon. Irez-vous à Londres cette année ?

Oui, je m’y rends la deuxième semaine en tant que consultante pour la VRT.

Contrairement à Monami qui nous expliquait la semaine dernière qu’elle n’était pas  » Last 8  » à Wimbledon, vous, vous l’êtes.

Oui, puisque j’ai été en demi-finale du double dames en 1997 en compagnie de ma partenaire habituelle, la Hollandaise Myriam Oremans. C’est d’ailleurs toujours un véritable plaisir de retourner à Wimbledon. Ce stade est vraiment unique au monde. Dès qu’on y entre, on ressent la tradition de plus d’un siècle de tennis et, aussi, le respect réel que les spectateurs éprouvent pour les joueurs et les joueuses.

Pourtant, au début de votre carrière, le tennis sur gazon n’était pas votre tasse de… thé.

C’est exact. Lors de mes premières années sur le circuit, je préférais de loin Roland Garros. Mais, de saison en saison, j’ai mieux apprivoisé le jeu sur herbe qui nécessite une acclimatation plus longue du fait que l’on joue rarement sur cette surface.

Vous sous-entendez donc que plus les années passent, plus Justine a des chances de s’y imposer.

Oui, car elle a été élevée sur terre…

par bernard ashed – photos: reporters

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