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La tentation Mmaee

Voici pourquoi l’histoire entre le nouveau  » Batshuayi  » et le Standard a longtemps été tumultueuse. Est-on enfin reparti sur de bonnes bases ?

Sur le coup de 22h15, vendredi dernier, l’arbitre, Frederik Geldhof, a mis un terme à une saison cauchemardesque pour la famille rouche. Rarement dans le coup, souvent épinglé pour des luttes internes en haut lieu ou pour des coaches sans réussite ni résultats, le Standard version 2016-2017 est à oublier au plus vite.

Les trois dernières victoires de rang (Malines, Waasland-Beveren et Lierse) ont, au moins, eu le mérite de boucler cette purge sur une note positive. Les supporters présents face au Lierse ont d’ailleurs tenu à remercier ce sursaut tardif.

C’est dire à quel point Sclessin est prêt à tourner la page et repartir sur de bonnes bases. Mais les irréductibles ne laisseront, à l’avenir, rien passer. Le Standard n’a plus droit à l’erreur. Ses dirigeants et ses joueurs le savent. Ces dernières victoires ont toutefois atténué un climat au fil du temps de plus en plus houleux.

Les restes d’une saison douloureuse pour les nerfs étaient d’ailleurs encore perceptibles vendredi dernier. Il suffit d’observer la sortie frondeuse de Junior Edmilson, remplacé à la 60e minute par Jonathan Legear, pour se rendre compte qu’il était temps que tout ça se termine.

Ambitieux et impatient

Ryan Mmaee, lui, aurait préféré que ça se prolonge. Car face à Malines, surtout, et contre Waasland Beveren, où il a inscrit son premier but en pro, l’attaquant de 19 ans s’est joliment illustré. Face au Lierse, par contre, il a retrouvé le banc au détriment de Orlando Sá, buteur, alors que Renaud Emond était à nouveau titularisé malgré de grossiers ratés tout au long des play-offs 2.

Ryan Mmaee, frère du défenseur Samy, est ambitieux et impatient. Plus question pour lui de lanterner. Après le succès à Beveren, il a d’ailleurs clamé à la presse ses ambitions :  » Mon objectif pour l’a prochain ? M’installer comme titulaire et numéro un.  »

En début de saison, alors que Yannick Ferrera attendait impatiemment des renforts qui n’arriveront finalement que dans les dernières heures du mercato et dont l’actuel entraîneur malinois ne profitera que l’espace de quelques jours, Ryan Mmaee avait reçu à cinq reprises l’occasion de s’illustrer pour deux titularisations, face à Saint-Trond et à Bruges.

Après un déplacement à Lokeren, le 18 septembre dernier, Mmaee n’a plus eu voix au chapitre. Il a même totalement disparu de la circulation. Avant de réapparaître en toute fin d’exercice. Pourquoi un tel vide au coeur d’une saison où on en attendait bien davantage ? La concurrence d’une part, renforcée par les arrives de Orlando Sá et de Ishak Belfodil,l’a relégué au second plan, mais les raisons principales de cette disparition sont d’ordre extra-sportives.

José Jeunechamps, réputé pour sa poigne auprès des jeunes, a d’ailleurs tenu à le mettre une nouvelle fois en garde lors de la conférence de presse d’après-match face au Lierse.  » Pourquoi Mmaee était-il sur le banc ? Il y a une hiérarchie à respecter en fonction des statistiques, du temps de jeu, et de l’implication aux entraînements.  »

Le clash avec Jankovic

Car son attitude n’est pas encore exemplaire. Ryan Mmaee reste très effacé dans le vestiaire des pros et son attitude peut parfois irriter certains de ses équipiers alors que son implication n’est pas toujours nickel : il n’est pas rare de le voir monter sur le terrain d’entraînement dans les derniers.

José Jeunechamps, qui reprendra dès la saison prochaine le poste de coach des U21, a tenté de le bousculer et de lui faire prendre conscience de certaines obligations. Mais les progrès sont manifestes par rapport à il y a plusieurs mois.

Petit retour en arrière. Début septembre, le Standard est chamboulé une nouvelle fois. Nouveau coach et nouveaux joueurs. Le noyau est alors pléthorique : 33 joueurs se retrouvent dans le vestiaire pro pour seulement 30 casiers. Les frères Mmaee, Ryan et Samy, parmi les moins expérimentés du groupe, sont priés de changer de casier et placer leurs affaires dans des nouveaux casiers moins  » spacieux « .

Les frères se vexent et en font état à Aleksandar Jankovic. Quelques jours plus tard, une altercation avec le coach serbe les renvoie dans le noyau  » espoir « . La pilule ne passe pas dans le chef de Ryan qui passe en un peu plus d’un mois du statut de titulaire à Bruges (2-2) à une place parmi les U21.

Lors du mercato d’hiver, le club est prêt à se séparer de celui que l’on présentait comme le nouveau Michy Batshuayi. Six mois seulement après avoir pourtant perdu Landry Dimata, lui aussi de la génération 1997 et partenaire offensif de Mmaee chez les jeunes du Standard.

Lors du stage hivernal, Olivier Renard, se montre pourtant très clair.  » Ryan est un joueur bourré de talent. Mais s’il ne fait plus partie du noyau, c’est qu’il y a des raisons qu’on va garder en interne. Le staff doit garder l’équilibre du vestiaire. Ryan a fait de bonnes et moins bonnes prestations. On a tous vu qu’il avait du potentiel. Il faut garder un équilibre au niveau implication, par exemple. Il a montré des choses positives mais le package total était négatif. S’il y a des clubs intéressés, on verra ce que le Standard fera « , conclut le directeur sportif dans Sud Presse.

Renard vs Ferrera

Alors que l’affaire Adrien Trebel pimente le début 2017, en coulisse on s’affaire également sur le dossier Ryan Mmaee. Il est notamment proposé à Gand par l’intermédiaire de l’agent, Christophe Henrotay qui envoie un message à Michel Louwagie et lui propose le deal suivant : 500.000 euros pour disposer de 50 % du joueur.

Mais le directeur général de Gand ne souhaite pas entamer les négociations avec un élément qui, repéré par Jean-François de Sart, avait quitté le club à l’été 2013 pour rejoindre le Standard. D’autant que la personnalité du joueur semble à l’opposé de ce qu’attend Hein Vanhaezebrouck d’un jeune élément.

Un prêt vers Mouscon est évoqué mais c’est bien Malines qui tient la corde. Le joueur, lui, veut rejoindre le Kavé tandis que Ferrera est très vite tombé sous le charme de cet attaquant complet, capable de jouer dos au but mais aussi de prendre la profondeur et à qui il a offert ses premières minutes de jeu face à Ostende, le 23 août 2015.

 » Avec les qualités intrinsèques qu’il a, c’est impossible qu’il ne devienne pas un grand attaquant « , déclare l’actuel coach malinois. Hormis Utrecht qui montre un semblant d’intérêt, on ne se presse pas au portillon pour un élément dont les qualités sont indéniables mais dont la mentalité pose problèmes.

Après avoir été, tout comme son frère, représenté par Dudu Dahan à l’époque de Guy Luzon, c’est désormais l’agence anglaise, Stellar Group, qui s’occupe de sa destinée. Mais Ryan Mmaee n’est qu’une petite partie de l’édifice bâti par le réputé agent, Jonathan Barnett, qui compte comme clients, Gareth Bale, Grzegorz Krychowiak ou Adam Lallana.

Mmaee n’est donc pas une priorité pour Stellar Group. Au soir du 31 janvier, alors qu’il reste convaincu qu’il va recevoir son bon de sortie, Ryan reste à quai. Pour Olivier Renard, il est hors de question de céder Mmaee à Malines vu les relations houleuses qu’il entretient avec la direction malinoise et Yannick Ferrera.

Rocky et rédemption

Le 2 février 2017, Ryan débarque à l’Académie, furieux de ne pas avoir trouvé de nouvel employeur. Et c’est le malheureux entraîneur des U21, Alex Chteline, qui en fait les frais. Ryan Mmaee s’empoigne avec son coach. La sanction est immédiate : le joueur est exclu pour une durée indéterminée. L’avenir s’assombrit pour ce grand espoir de l’Académie qui semble en totale perdition.

Le lendemain de cette exclusion, Ryan reçoit un coup de téléphone de Gauthier Renders, accompagnateur bruxellois, qui travaille notamment avec le jeune Standardman, Anaxis Dinsifwa. Le jeune Mmaee semble dans une impasse. Renders va l’en sortir. Il lui concocte un programme qui n’a plus grand-chose à avoir avec le ballon rond.

Mmaee quitte la maison familiale de Neupré pour rejoindre le stade des Trois Tilleuls à Boitsfort où Damien Broothaerts, champion de Belgique du 60 m et 110 m haies, le fait suer à coups d’escaliers qu’il grimpe et redescend. Il se retrouve aussi à Bierges où le coach de boxe anglaise et de Jiu-Jitsu, Bruno Djuric lui fait travailler son gauche-droite.

Une sorte de Rocky des temps modernes et donc sans les frappes dans les carcasses de viande… Mmaee passe également entre les mains de Lieven Maesschalck ou participe à du media-training. Ce fils d’une mère marocaine et d’un père camerounais dont le frère aîné, Jack (22 ans), évolue dans la seconde équipe de Roda JC alors que le benjamin, Camil (13 ans), évolue lui aussi chez les jeunes du Standard, semble métamorphosé mentalement et physiquement.

Thierry Verjans reçoit des échos de cette prise de conscience et veut le réintégrer. Ryan se rend, seul, à Saint-Trond pour voir les U21. C’est le début de la rédemption. Suite à plusieurs défections offensives, dont celle de Dimata, Johan Walem fait appel à ses services pour le match face à Malte du 27 mars.

Une sélection qui fera figure de déclic. Mmaee l’apprend alors qu’il s’époumone sous les directives de Broothaerts. L’attaquant du Standard ne laisse pas filer l’occasion puisqu’il inscrit avec les Espoirs l’un des deux buts de la rencontre côté belge (2-1).

Dix jours plus tard, Jankovic, en place pour quelque temps seulement, l’invite à s’asseoir sur le banc face à Saint-Trond. Aujourd’hui, le Standard ne souhaite absolument pas se séparer d’un élément à qui il reste pourtant une seule année de contrat. Ryan Mmaee, lui, ne veut plus se perdre en chemin. Reste à voir s’il a retenu les leçons.

PAR THOMAS BRICMONT – PHOTOS BELGAIMAGE

 » Avec les qualités intrinsèques qu’il a, c’est impossible qu’il ne devienne pas un grand attaquant  » YANNICK FERRERA

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