La Suproligue FIBA est morte!

Directeur du bureau responsable de la compétition, il fait le point sur ses aventures et le basket belge.

Une année à peine après sa création, le directeur général de FSO (bureau responsable de la compétition), notre compatriote Léon Wandel, ne sait pas de quoi son avenir sera fait. Il ne s’en formalise pas. Et revient sur une campagne unique pour le basket européen.

Quels sont les premiers mots qui vous viennent à l’esprit quand on vous parle de la Suproligue 2001?

Léon Wandel : Il ne faut pas se voiler la face. Cette compétition ne fut pas la meilleure ligue européenne possible. Mais l’Euroligue dissidente ne l’a pas été davantage.

La qualité des équipes reprises cette saison sous l’égide de la FIBA a souvent été remise en cause par le clan adverse, celui de l’ULEB. Que répondez-vous à ceux qui prétendent que la FIBA a dû se rabattre sur des deuxièmes choix pour parvenir à monter son épreuve?

Je répondrai que, sur le plan sportif, nous avons monté une compétition honorable où seuls deux ou trois clubs n’avaient, en fait, pas le niveau nécessaire. Je pense ici aux Suédois de Lulea, des gens très sympathiques mais trop faibles sportivement, aux Israéliens de Raanana, qui n’ont pas les infrastructures suffisantes pour évoluer à ce niveau, ou encore à Leverkusen. Car, pour le reste, le niveau de jeu montré par les différents protagonistes fut à la hauteur de nos espérances.

Au Final Four, qui débute ce vendredi à Paris, on retrouve le Panathinaikos, Tel-Aviv, Efes Istanbul et le CSKA Moscou…

Le plus important à mes yeux est que les Grecs, les Israéliens et les Turcs étaient déjà au Final Four, voilà douze mois, quand l’Europe comptait une seule épreuve phare. Ces équipes nous avaient réitéré leur confiance malgré la scission opérée. Cela veut quand même dire quelque chose, non? Croyez-moi, Paris va faire la fête au basket ce week-end.

Le conflit ouvert entre certaines grosses écuries et la FIBA n’aura tout de même pas servi les intérêts de ce sport?

Non, cela c’est certain. Il est arrivé au basket européen ce qu’il y a de pire, à savoir une fracture. Mais, aussi paradoxal que cela puisse paraître, on n’a peut-être jamais autant parlé de ce sport que cette année-ci. La presse en a même fait ses choux gras. Comme disait de Talleyrand, qu’on en parle en bien ou en mal, pourvu que l’on en parle… Ce qui me chagrine le plus dans toute cette histoire, c’est que le basket en est ressorti sali.

En tant que directeur général du FSO, le bureau de la Suproligue, vous ne pouvez que constater l’échec de cette épreuve aujourd’hui.

Sportivement, je vous l’ai dit, cette épreuve a été une réussite. Economiquement, par contre, c’est vrai que le produit n’a pas marché.

Voilà douze mois, vous proclamiez qu’ISL, la société centralisatrice des droits télévisuels et de marketing, serait un gage de sécurité. Or, ISL est en faillite…

Il faut être honnête, la FIBA s’est trompée sur le produit parce qu’ISL lui a jeté de la poudre aux yeux. Mais il est important de préciser que l’ATP, l’association de tennis professionnelle, le CIO et même la FIFA sont dans la même galère. La FIBA n’a, donc, pas été la seule naïve dans l’histoire.

Quelles leçons tirez-vous de cet échec?

Tout simplement qu’une compétition, cela se construit un peu comme un club. Comme lui, elle ne repose sur des bases solides qu’après de longues années de travail.

Cet échec est aussi un peu personnel, non?

Je vous vois venir… Si vous voulez m’entendre dire que j’ai commis une erreur, vous allez être déçu. L’an dernier, Monsieur Stankovic m’a demandé de m’occuper de la Suproligue. J’ai accepté. Et mon mandat arrivait à terme en même temps que le Final Four. Aujourd’hui, il s’avère que la compétition cessera ce mois-ci. Il est, donc, logique que mon poste disparaisse en même temps. Je ne vois pas en quoi il s’agit d’un échec personnel.

Les autres instigateurs du produit Suproligue ont quand même retrouvé une fonction dans l’Euroligue réunifiée. On a un peu le sentiment que vous êtes le seul à rester sur le carreau…

Soyons clairs, je ne sais effectivement pas de quoi mon avenir sera fait. J’ai la chance de ne pas avoir besoin d’un poste à la FIBA pour vivre. Cela dit, j’adore le basket et j’ai encore envie de responsabilités. Mais, sincèrement, ma situation personnelle n’est pas importante par rapport à ce que le basket va gagner avec ce retour à la normale. C’est la seule chose qui compte vraiment. Je me souviens que lors de la première retraite de Michael Jordan, David Stern, le patron de la NBA, avait proclamé -Nobody is bigger than the game. En français, cela veut dire que personne n’est plus grand que le jeu. Il répondait à la question d’un journaliste qui se demandait si la NBA aurait les moyens de se remettre du départ de son porte-drapeau numéro un. Dans le cas du basket européen, c’est la même chose. L’important n’est pas de savoir qui dirige. Stankovic, Wandel ou Portela? Parce que ces gens-là passent alors que le jeu continue. Reste que ces gens que je viens de citer sont peut-être juste plus puissants que moi.

Monsieur Stankovic et vous sembliez très unis. On est en droit de se demander s’il ne vous a pas un peu lâché aujourd’hui.

( un peu agacé) Ecoutez, je suis membre de la FIBA depuis 1968 et je n’ai pas l’impression d’avoir le moindre problème relationnel avec lui. D’ailleurs, si je n’avais pas été à ce point son ami, je crois que je serais passé du côté de l’ULEB. Je pense d’abord à l’intérêt des clubs.

Votre discours est un fameux contre-pied. On reprochait à la FIBA de ne penser qu’à elle et voilà que maintenant vous estimez d’abord penser aux clubs.

Je vais vous en apporter la preuve. En 1995, j’avais déjà soumis à la FIBA un projet de ligue fermée. Un projet vers lequel on se dirige désormais avec la réinstauration d’une seule et vraie compétition.

Vous voulez dire que, bientôt, l’accès à l’Euroligue sera impossible pour un nouveau club?

Ce sera sans doute le cas, oui. C’est inévitable. D’ailleurs, l’Euroligue qui vient de voir le jour il y a quelques semaines s’en approche fortement. Mais pour mettre sur pied une compétition fermée, il faut convaincre les fédérations nationales. La plupart d’entre elles craignent que, dans ce cas, les clubs engagés dans ce championnat européen ne prennent plus part aux compétitions nationales. Mais il n’est pas utopique pour une formation aux reins solides de combiner les deux.

Comment? Leur calendrier est déjà démentiel comme cela.

Il suffit de le concevoir autrement. Les mois d’août et de septembre peuvent être réservés aux équipes nationales. Qui ne mobiliseraient -mais totalement- leurs membres que pendant six à huit semaines. D’octobre à février, on pourrait, dès lors, disputer les épreuves nationales et rien que celles-là. Ce qui permettrait aux joueurs de ne pas quitter leur pays durant tout l’hiver. Enfin, en mars, une fois que les championnats auraient rendu leur verdict, les compétitions européennes prendraient le relais. Evidemment, pareille formule obligerait les fédérations nationales et la FIBA à ne sortir de l’ombre que certains mois de l’année. Bien sûr, ce projet n’est pas parfait mais il permettrait à chaque instance organisatrice de valoriser son produit.

A peine mise sur pied, l’Euroligue, dans sa nouvelle mouture, fait grincer quelques dents. Il semblerait que la gronde soit forte en Espagne et en Lituanie, notamment.

Quoique vous entrepreniez, il y aura toujours des mécontents. C’est inévitable et il faut vivre avec. Je crois que la formule mise sur pied pour la saison à venir est sur la bonne voie. Vous savez, la FIBA a eu un tas d’ennemis au cours de l’année écoulée. On lui reprochait, entre autres, de trop nombreuses erreurs. Je tiens juste à préciser que tant que l’on ne tente rien on ne peut en faire.

Vous voulez dire que l’ULEB va également devoir faire face à ce genre de critiques…

Bien sûr, pourquoi échapperait-elle à la règle. Quand l’ULEB a créé son Euroligue l’été dernier, on a dit que le projet ne comportait pas la moindre faille. Aujourd’hui, même ses créateurs se rendent compte que des choses doivent être améliorées voire corrigées. Cela aussi, l’ULEB l’apprend à ses dépens avec la volée de bois vert que lui lancent les clubs que la création de l’Euroligue a laissés sur le carreau.

Que l’Euroligue soit un peu contestée vous rassure?

Non. Cela donne juste un visage plus humain à l’ULEB. Je me souviens que quand ses dirigeants montèrent au créneau voilà un peu plus d’un an, on me les avait présentés comme des extraterrestres.

Jean-Paul Van de Kepelaere

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