La responsabilité du sportif

Pratiquer un sport n’octroie aucune immunité de responsabilité, pénale ou civile, au sportif qui se rend coupable d’une agression, volontaire ou involontaire, sur la personne d’autrui.

Dès lors, ce sportif, outre une sanction disciplinaire, pourra être tenu de réparer les lésions corporelles que son comportement a engendrées.

En droit pénal, porter atteinte à l’intégrité physique d’autrui est érigé en droit belge en infraction. Deux hypothèses sont à envisager : soit les coups ont été portés volontairement; soit le geste dommageable fut totalement fortuit. Selon la jurisprudence, les coups de pied, de poing, de genou ou de tête sont bien des « coups » au sens de la loi. Par ailleurs, l’élément moral de l’infraction (« volontairement ») a été défini comme la volonté indéterminée de nuire, de faire le mal.

Appliqués à l’hypothèse d’un coup porté lors d’un match de foot, ces principes impliquent trois cas de figure :

-Si les coups ont été portés en dehors d’une phase active du jeu, la volonté de nuire est manifeste car elle n’est pas influencée par l’effervescence du jeu. Sera condamné le joueur qui aura frappé un adversaire lors de la rentrée aux vestiaires à la mi-temps ou à la fin du match;

-Lorsque les coups ont été portés juste avant ou juste après une phase active du jeu, le caractère involontaire du geste ne pourra en principe être retenu que si la personne en cause était en compétition directe avec la victime au moment des faits;

-Lorsque les coups ont été portés au cours d’une phase active du jeu, c’est-à-dire à un moment où la précipitation et la fatigue inhérente à la pratique d’un sport annihilent dans une certaine mesure le « libre arbitre » de la personne en cause, il convient de procéder à une analyse casuistique. A titre exemplatif, citons la décision suivante : « Le coup porté entraînant la fracture des deux os de la jambe droite en son tiers moyen, c’est-à-dire à une hauteur où en toute hypothèse le ballon ne pouvait pas se trouver, l’intention d’agresser le joueur adverse est démontrée dans le chef de l’inculpé ».

Le Code pénal punit « toute personne qui a causé le mal par défaut de prévoyance ou de précaution, mais sans intention d’attenter à la personne d’autrui ». Ce critère aboutit à définir comme fautifs les coups portés par un joueur lorsqu’ils ne correspondent pas aux normes générales de prudence sur un terrain de sport, peu importe que le joueur en cause ait ou non respecté les règles du jeu.

Ainsi, un « tackle » a déjà été jugé fautif dans l’hypothèse où il était porté dans les parties génitales de l’adversaire, en raison d’un manque évident de précaution.

Indépendamment des poursuites pénales que le Parquet peut intenter (et qui ont pour objet d’aboutir au prononcé d’une peine figurant au casier judiciaire de l’intéressé : emprisonnement, amende,…) un sportif auteur de coups dommageables peut voir sa responsabilité civile être mise en cause par sa victime.

Pour obtenir des dommages et intérêts, celle-ci doit alors prouver à charge de son agresseur une faute en lien causal avec son dommage. La faute du sportif suppose que le geste incriminé soit divergent par rapport au comportement qu’un sportif normalement prudent et diligent aurait adopté en pareilles circonstances. Selon la doctrine et la jurisprudence spécialisées, le « bon sportif » doit refuser de participer à des compétitions s’il sait (ou devait savoir) que celles-ci excèdent ses forces, s’il s’y est insuffisamment préparé ou ne dispose pas du matériel et de l’équipement nécessaires. Et s’il respecte les règles du jeu, il ne les observe pas aveuglément : il sait se contrôler. Mais il peut parfois se comporter maladroitement et causer un dommage à autrui. En sport automobile, on estime classiquement qu’une sortie de piste ou un dérapage n’est pas fautif car il s’agit d’un phénomène normal, même s’il peut être à l’origine de dommages pour les spectateurs…

Luc Misson

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