La responsabilité civile des organisateurs de spectacles sportifs

L’image, insolite, a fait le tour du monde. Le 18 avril dernier, peu avant le coup d’envoi du match opposant Manchester United au Bayern de Munich, en quarts de finale retour de la Ligue des Champions, lors de la séance de photos officielle, l’équipe de Manchester United est apparue composée de 12 joueurs en lieu et place des 11 réglementaires.

Volonté de tricherie manifeste de la part des Mancunians?

Absolument pas, bien sûr. Tout simplement une des plus belles arnaques du football de tous les temps, selon les commentateurs: avec l’aide d’un magazine sportif, un certain Karl Power a réussi le pari fou de poser en compagnie de ses 11 idoles quelques secondes à peine avant le début d’un match de coupe d’Europe et, sitôt la séance de photos terminée, il s’en alla tout heureux regarder la partie en compagnie des photographes de presse massés le long du terrain.

Cette histoire, outre son côté sympathique, pose néanmoins des questions en terme de sécurité des sportifs de haut niveau. Car qu’aurait-on dit et écrit si, à la place de ce gentil supporter en mal de sensations fortes, un déséquilibré mental avait pu habilement pénétrer dans le stade jusqu’à et y compris le terrain de jeu?

Comme toute personne, un organisateur d’entraînement et/ou de compétition sportifs voit peser sur lui l’obligation générale de prudence envers autrui. Et plus le sport organisé est dangereux en soi, plus il appartient à cet organisateur d’entourer son épreuve des précautions nécessaires. A défaut, ses responsabilités civile (articles 1382 et 1383 du Code civil) et pénale (articles 418 et suivants du Code pénal) seront engagées.

Nos Cours et Tribunaux se montrent particulièrement sévères quant au respect du devoir de sécurité par une société ou une personne physique organisant une épreuve sportive, puisqu’il a déjà été jugé que:

Les mentions exonérant de toute responsabilité inscrites sur les tickets d’entrée ne sont pas opposables aux spectateurs.

La gratuité du spectacle sportif est sans aucune influence sur l’étendue de la responsabilité de l’organisateur.

Il incombe parfois à l’organisateur d’une compétition sportive d’obtenir les autorisations administratives préalables nécessaires, lesquelles peuvent en outre être assorties de certaines conditions à respecter. Toutefois, l’obtention de cette autorisation et le respect des conditions y incluses ne suffisent pas à conclure que l’organisateur n’a commis aucune faute ou négligence vis-à-vis des spectateurs ou participants.

Outre sa responsabilité personnelle, un organisateur sportif peut aussi voir engager sa responsabilité civile suite au fait fautif accompli par l’un de ses préposés (personne physique ou morale travaillant sous son autorité) sur base de l’article 1384, alinéa 3 du Code civil. Par exemple, c’est ainsi qu’a déjà été jugée responsable la société organisant une course motocycliste à Francorchamps au cours de laquelle un commissaire de piste (le préposé) avait, de façon totalement imprudente, traversé la piste et avait été fauché par un concurrent, entraînant le décès des deux hommes.

Luc Misson

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