La plénitude en 10 étapes

Voici pourquoi le cour du noyau des Zèbres reste aussi bon qu’au deuxième tour. Objectif 5e place ?

C’était une constante : chaque été, le Stade du Pays de Charleroi était temporairement transformé en hall de gare, avec beaucoup de mouvements : que ce soit dans le sens des arrivées ou celui des départs (voir encadré). Des bijoux de famille étaient presque systématiquement vendus, voire soldés lorsque la situation financière du club l’exigeait.

Cette année, la situation est méchamment plus calme. Un mot pour résumer la première partie de la période des transferts chez les Zèbres : stabilité. A l’exception de Cristian Leiva, toute l’équipe type de la saison dernière devrait encore être sur le terrain en août prochain. Seuls Joseph Akpala et Geoffrey Mujangi-Bia semblent encore concernés par un départ éventuel, mais ils resteront Zèbres si la direction ne descend pas la barre pour leur transfert.

Analyse des raisons de cette nouvelle donne.

1. Le club commence à gagner de l’argent

Fini, le temps où le Sporting était obligé de brader certaines de ses plus belles pièces pour combler l’un ou l’autre trou. Depuis près de trois ans, la tendance financière s’est inversée. Le club ne fait pas un bénéfice colossal chaque année mais il ne perd plus d’argent. Cela facilite évidemment les choses lorsque des joueurs toujours sous contrat sont sollicités. Le Sporting est désormais maître du jeu. Il y a quatre ou cinq ans, des pions clés comme Tim Smolders, Akpala ou Mujangi-Bia auraient peut-être été vendus pour une poignée de cacahuètes.

2. La demande pour Camus-Orlando est plate

L’année dernière, à pareille époque, un Carolo était omniprésent dans les conversations de transferts du football belge et on le citait dans divers coins d’Europe : Fabien Camus. Le manager du Sporting avait un accord avec le Steaua Bucarest pour 3 millions d’euros, il ne restait plus qu’à convaincre le joueur et le président. Mais à l’époque, le Français avait encore 2 ans de contrat et une cote d’enfer, après avoir été élu meilleur médian du championnat 2006-2007.

Aujourd’hui, il vaut beaucoup, beaucoup moins : parce qu’il n’est plus lié que pour un an mais surtout parce qu’il se remet d’une grave opération au genou. Pour le club, ce n’est donc pas le moment de le vendre. Et de toute façon, l’intérêt est inexistant actuellement. Les équipes qui suivaient autrefois Camus attendent certainement de voir s’il reviendra à son meilleur niveau.

Dans le même ordre d’idées, il y a aussi le cas Orlando. Il y a un an et demi, le Standard a fait le forcing pour le transférer. Mais il était trop cher. L’année passée, c’est le Club Bruges qui s’y est intéressé. Même problème. Aujourd’hui, le Brésilien doit d’abord retrouver son football avant d’être à nouveau convoité par des clubs du top car il sort d’une saison très moyenne.

3. Le Sporting demande trop pour Smolders-Akpala-Bia

Trois Carolos toujours sous contrat sont convoités, en Belgique et à l’étranger.

Smolders est un modèle de régularité et d’efficacité depuis son arrivée au Sporting, en 2006. Pendant la défunte campagne, il a évoqué ses envies de changer d’air dès cet été. Il a notamment été question de Genk. Mais il n’est pas maître du jeu et aucun club n’a mis beaucoup d’argent sur la table, donc il est toujours Zèbre.

Akpala doit partir maintenant pour rapporter un pactole à Charleroi : son statut de meilleur buteur du championnat est le principal argument de vente. Dans l’histoire du football belge, chaque fois qu’un joueur d’un club moyen termine meilleur réalisateur, il passe immédiatement dans un plus grand club pour une grosse somme. Il y a de l’intérêt pour l’Africain, notamment en France où le Sporting a posté son CV dans plusieurs boîtes aux lettres de Ligue 1. Mais Akpala est toujours Zèbre pour une raison toute simple : on ne veut pas le lâcher pour moins de 5 millions d’euros, et en D1 française, on estime que c’est beaucoup trop pour un joueur qui est resté sous la barre des 20 buts dans notre compétition qui n’a vraiment plus la cote.

Mujangi-Bia est confronté au même problème. Lui aussi est mis en vitrine dans le championnat français, mais lui aussi coûte 5 millions. Le Sporting parviendrait peut-être à en tirer autant d’argent si ce joueur avait éclaboussé notre championnat pendant deux saisons d’affilée, mais ce n’est pas le cas : Mujangi-Bia n’est devenu titulaire qu’en janvier et il doit encore passer par la phase de confirmation.

La direction du Sporting sous-entend qu’un de ces joueurs partira avant la fin du mois d’août, mais il est fort probable que leur prix devra descendre pour qu’il y ait transfert.

4. Le meilleur choix pour Laquait-Defays-Théréau

Il peut paraître incompréhensible qu’un gardien de but comme Bertrand Laquait, libre et gratuit, n’ait pas déniché un contrat dans un club du top. C’est pourtant le cas. On était persuadé qu’il avait fait ses adieux au Sporting en fin de saison dernière. Lui-même le pensait. Mais Laquait est finalement revenu et a signé un nouveau contrat de deux ans. Sans doute davantage aux conditions du club qu’aux siennes. Il a raté plus d’une fois le coche depuis son arrivée en Belgique. Après son prêt à Huelva, ce club était prêt à l’acheter mais il était trop cher. Il a aussi flirté plus d’une fois avec le Standard mais le problème était identique. Pas de chance pour le Français : c’est quand il fut sous contrat pour une assez longue période chez les Zèbres qu’il a joué ses meilleurs matches. La saison dernière, il n’a pas été mauvais mais n’a plus autant crevé l’écran. Conclusion : il a finalement dû se contenter de prolonger dans une équipe du ventre mou. Laquait a déjà connu la vie de footballeur sans club et a préféré assurer pour ne pas retomber dans le même enfer.

La situation de Frank Defays est un peu différente. Il sort d’une saison pourrie, avec des problèmes physiques à répétition. Il a joué moins de 15 matches. Comme il arrivait en fin de contrat, on a craint pour son avenir en D1. Mais il a lui aussi prolongé. Pas sûr qu’il redevienne un cadre de l’équipe type, vu son âge (34 ans) et l’affirmation de jeunes défenseurs ( Mohamed Chakouri, Ibrahima Diallo, Salaheddine Sbai) au deuxième tour de la saison passée. Mais Defays est le vrai patron du vestiaire et cela a certainement joué dans le raisonnement de la direction. On lui a d’ailleurs proposé une place dans le staff technique d’ici un an, voire un peu plus tard s’il retrouve toutes ses sensations de joueur.

Qui aurait osé parier, il y a un an, que Cyril Théréau se retrouverait aujourd’hui lié à Charleroi pour les trois prochaines saisons ? Il était alors le golden boy que l’on s’arrachait : Anderlecht l’avait soufflé au Club Bruges en y mettant le paquet. Mais après son échec à Bruxelles au premier tour et son bilan mitigé à Charleroi au second, Théréau est redevenu un joueur comme un autre sur le marché des transferts. Sa bonne approche de la vie carolo et les bonnes relations entre dirigeants de Charleroi et d’Anderlecht ont permis qu’il signe un contrat synonyme de relance au Mambourg. Pour un salaire qui n’a évidemment plus rien à voir avec celui qu’il encaissait chez les Mauves…

5. La superbe affaire Chakouri

On en parle peu mais c’est un des meilleurs coups des Bayat depuis qu’ils sont à Charleroi : Chakouri, c’est du tout jeune (22 ans), du tout bon et du pas cher ! Il est arrivé chez nous en janvier, sur la pointe des pieds. Un prêt avec option d’achat. Ce défenseur s’est directement imposé et le Sporting a donc levé l’option. Comme Chakouri était dans le trou à Montpellier, on imagine que le prix du transfert définitif n’était pas élevé et que le salaire était en conséquence. Aujourd’hui, Chakouri vaut gros et il est sous contrat jusqu’en 2011. Il était capitaine des Espoirs français au dernier tournoi de Toulon, ce qui fait encore grimper sa cote. Le prochain joueur qui rapportera beaucoup d’argent au Sporting, c’est peut-être lui.

6. Les incontournables départs de Leiva-Ciman

Leiva était incontournable dans l’équipe de base de Charleroi avant la nouvelle réglementation fiscale entrée en vigueur en janvier dernier. Il a subitement moins bien gagné sa vie et a fait la tête. C’était une complication à régler entre Anderlecht (qui le prêtait à Charleroi) et lui. Leiva n’avait pas de problème avec Charleroi, simplement un souci avec la loi belge. Il fallait donc qu’il quitte notre championnat. Mais en rapatriant Sébastien Chabaud, le Sporting ne perd certainement pas au change.

Le seul autre départ important est celui de Laurent Ciman. Depuis l’arrivée de Chakouri, il n’était plus titulaire. Ce joueur a stagné pendant toute la saison. On peut s’étonner qu’il ait reçu un contrat au Club Bruges. Mais à partir du moment où ce contrat lui était proposé, il était logique qu’il s’en aille : une occasion en or pour lui et une bonne affaire pour Charleroi (car Ciman était encore sous contrat jusqu’en 2012, on cite une indemnité de transfert comprise entre 600.000 et 900.000 euros).

7. Les bonnes solutions des seconds couteaux

Outre Ciman et Leiva, l’élagage du noyau carolo touche presque exclusivement des seconds couteaux. Juan Pablo Pino ne s’est jamais imposé. Et les autres partants sont surtout des jeunes. Le contrat de Sébastien Van Aerschot a été rompu à l’amiable. Steve Verelst et Damien Lahaye sont prêtés à Namur. Baptiste Ulens part en prêt à Liège. Et Thibaut Detal, blessé pendant toute la saison dernière, n’a pas été prolongé.

8. Les gros renforts Chabaud-Vandenbroeck

Depuis qu’il avait quitté Charleroi pour la Liga (Tarragone), on n’avait plus guère entendu parler de Chabaud. Il était descendu en D2 avec son club espagnol puis n’a pas réussi à se relancer la saison dernière au Germinal Beerschot. Il était donc devenu bon marché et le Sporting n’a pas laissé filer l’affaire. Un bon coup, probablement, car Chabaud connaît le club, la région et notre compétition.

Un autre nouveau joueur confirmé vient de D2 : le défenseur David Vandenbroeck, qui a encore joué un rôle essentiel dans le récent tour final avec Tubize. Son passage à Charleroi a été ficelé dès janvier, à l’époque où Vandenbroeck n’était encore que joueur de D2. Ce statut a évidemment son importance à la fois au niveau du prix du transfert et du salaire. Encore une bonne affaire carolo.

9. Le staff est stabilisé

Entraîneur principal depuis décembre 2007, Thierry Siquet a un peu ramé au début puis a mis l’équipe dans une bonne avalanche de points. Lui-même s’est longtemps interrogé sur son futur, avant d’être confirmé. Avantage par rapport à ses premiers pas comme T1 : il ne part plus dans l’inconnu.

Deux nouvelles têtes apparaissent dans le staff. Il y a un nouvel adjoint : Serge Gehoulet, ancien T1 d’Eupen en D2. Et un nouveau préparateur physique pour remplacer Eric Roex, parti à Genk : Dominique Henin, qui a bossé pour l’Olympic et Action 21.

10. L’objectif à se fixer est plus raisonné

On imagine que les Zèbres ne se prendront pas deux fois les pieds dans le même tapis ! Il y a un an, les objectifs de la direction faisaient rire : le titre et tout ce qui va avec (Ligue des Champions, stade comble, etc). Ce poids, les Carolos l’ont porté d’un bout à l’autre du championnat. Mais ils ont finalement terminé à une place qui correspondait à leur potentiel : la huitième. Ils avaient fini 13e après le premier tour mais 5e pour le second.

Sauf si une des deux perles noires venait à quitter le club, le noyau qui commencera la prochaine saison aura plus ou moins la même valeur sportive que celui du deuxième tour (sans Leiva et Ciman mais avec Théréau, Chakouri, Bia et Chabaud).

Sur l’ensemble de l’ère Bayat (depuis 2000), le classement moyen de Charleroi est la 10e place. Ce club tourne aussi autour du 8e budget de la D1 et de la 8e moyenne de spectateurs. Mais si on se base sur le deuxième tour de la dernière saison, viser la cinquième place constitue un objectif tout à fait raisonnable.

par pierre danvoye – photos: belga

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