LA PEUR CULTURELLE DU FOOT BELGE

On en revient toujours à cette histoire de verre à moitié plein ou vide. D’un côté, on retrouve les optimistes un peu béats pour qui le football belge est bien blotti sur son petit nuage. Si vous en doutez encore, jetez un oeil sur nos derniers résultats internationaux. Nos Diables ont neuf orteils et demi en France alors que nos représentants européens ont fait jeu égal avec leurs homologues français.

Par contre, pour les sceptiques, ou simplement les observateurs les plus mesurés, il n’y a vraiment pas de quoi pavoiser (je vous invite à lire l’éclairant papier de couverture à ce sujet page 20). Car on a beau chercher, on a quand même du mal à trouver une véritable identité offensive et salvatrice chez nos représentants les plus prestigieux.

En tête de gondole, il y a évidemment le cas Marc Wilmots qui divise de plus en plus. Depuis l’été brésilien, notre coach national peine à s’adapter à ce nouveau statut de favori qui a évidemment inversé les rapports de force et les précautions tactiques de nos adversaires. Aujourd’hui, les Diables font face à des murs où, souvent, l’exploit individuel n’est pas suffisant pour les briser.

Car c’est sur ce point que ça coince, ce collectif de façade, l’absence d’automatismes et d’animation. Il est loin le temps d’une campagne qualificative pour la Coupe du Monde 2014 où coach Willy était porté au pinacle grâce à des contres dévastateurs (en Serbie, en Croatie, Ecosse), des changements gagnants ou aux offrandes lumineuses signées KevinDeBruyne.

Désormais, le statut d’équipe à battre a compliqué la donne pour un coaching en mal d’idées. Et ce ne sont pas les premiers concernés, les joueurs, qui vous diront le contraire. Ou alors, comment expliquer notre seul véritable instant de jubilation de ces deux dernières années lors du huitième de finale face à des Etats-Unis décomplexés et naïfs ?

Nos clubs-phares semblent malheureusement souffrir du même mal. Heureusement pour BesnikHasi que la Coupe d’Europe vient oxygéner ses joueurs de temps à autre. On l’a encore vu face à Monaco ou mieux encore lors de la campagne de Ligue des Champions de l’an dernier, les Mauves se libèrent face à meilleurs qu’eux, quand le bloc équipe joue bas et que la reconversion est rapide.

Sur leurs terres, en revanche, l’absence cruelle d’animation offensive fait peine à voir. Dimanche dernier, il fallait être éperdument amoureux des Zèbres ou Mauves, ou alors totalement allergique au tennis, pour s’infliger le lénifiant Charleroi – Anderlecht et ne pas zapper sur le duel homérique entre Belges et Argentins.

MichelPreud’homme est à ranger dans le même sac. L’éclaircie automnale de 2014 a fait long feu. Depuis lors, Bruges passe en force mais aussi à travers et complètement. La faute à qui ? A des joueurs désintéressés, paraît-il, pour une presse du nord étonnamment bienveillante envers son coach préféré.

Quant au Standard de YannickFerrera, on réfléchit davantage à une sortie de crise qu’à toute autre ambition. Plus le temps passe, plus HeinVanhaezebrouck fait figure d’ovni dans ce football belge avec son système précis, quasi scientifique, et ses joueurs dévoués et intelligents pour l’appliquer.

Notre peur serait-elle culturelle ? Serions-nous  » génétiquement  » déterminés par ce malheureusement fameux  » jeu à la belge  » qui consiste à protéger ses arrières et profiter de la moindre faille. RaymondGoethals et GuyThys ont beau l’avoir glorifié, peut-on aujourd’hui imaginer autre chose ?

Faisons-nous preuve, par ces lignes, d’excès de romantisme, et pas assez de pragmatisme dans un business – et le foot en est un important -, où l’adage est la fin justifie les moyens ? Difficile quand même à l’heure où nos talents pullulent chez nous et ailleurs de ne pas imaginer autre chose. Puisse Vanhaezebrouck faire des petits. A défaut, on risque de passer à côté de pas mal de belles choses.

PAR THOMAS BRICMONT

Puisse Vanhaezebrouck faire des petits.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire