la parole à LUC MISSON

L’avocat liégeois Luc Misson, rendu célèbre par l’arrêt Bosman, est à l’origine de l’acquittement de Ludovic Capelle, suspendu pour 18 mois par la Communauté flamande pour dopage à l’EPO. Le Conseil d’Etat a effacé la condamnation pour défaut de procédure tandis que l’avocat plaide en faveur d’un dopage balisé.

Quelles sont les bases de votre argumentation ?

Luc Misson : En prononçant de lourdes peines, les fédérations s’aventurent sur le terrain du droit pénal. Suspendre un sportif professionnel pour deux ans équivaut à le priver de son sport pour la vie. Cela ne peut être fait par des juristes amateurs qui dépendent de leur fédération. J’accepte mal la lourdeur des peines : deux ans lors du premier cas, à vie en cas de récidive. Or, un sportif peut prendre un produit interdit par mégarde. Actuellement, on ne tient pas compte de l’intention. Enfin, les contrôles antidopage constituent une atteinte à la vie privée. J’ai fait condamner l’UE parce qu’elle imposait un test sida à ses candidats fonctionnaires. Seule une loi permet de réguler cela. Or, elle ne prévoit que l’identité de ceux qui peuvent effectuer les contrôles.

Vous vous en prenez aussi à Jacques Rogge, le président du CIO ?

Oui. En pleine période Bosman, le COIB, présidé par Jacques Rogge, voulait mettre sur pied un système interdisant aux sportifs de s’adresser à un tribunal. Et tout participant aux JO doit signer un document par lequel il abandonne ses droits d’image et s’engage à ne s’adresser qu’à un tribunal bien déterminé en cas de problème : le TAS. Or, l’article 6 de la déclaration des Droits de l’Homme stipule que tout citoyen a le droit d’exposer un problème devant un tribunal. Le TAS est composé de juristes des fédérations, en plus…

Prônez-vous le libre recours au dopage ?

Non mais il est facile de stipuler dans les contrats qu’un coureur dopé est immédiatement renvoyé alors qu’on lui dit : – Si tu veux courir le Tour, tu dois être parmi les meilleurs. Si tu veux gagner plus d’argent, tu dois gagner de courses. 95 % du peloton sont dopés. On produit de l’EPO à concurrence de quatre milliards de dollars par an, officiellement. Et 88 % des hormones de croissance vont aux sportifs. Il s’agit d’une industrie. Tout interdire, c’est tout permettre. Il faut permettre aux gens d’en parler, de s’informer sur les produits vraiment dangereux. Il ne faut pas parler de dopage sans les médecins, il faut les rendre juridiquement responsables. Ce ne sont pas les jeunes sportifs qui ont inventé le dopage mais le système les contraint à y recourir.

J. HAUSPIE

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