Là où règne l’abondance…

Rivaldo est en bisbrouille avec Barcelone, parce que le club n’a pas encore daigné porter son salaire à 5,3 millions de dollars par an et Ronaldo est sorti du terrain après vingt minutes, alors qu’il effectuait sa rentrée officielle à l’Inter, dans un match contre les amateurs de Bormiese, match remporté 17-0. Ronaldo a inscrit deux buts.

Bien que ces nouvelles concernent les deux Brésiliens les plus connus et les plus onéreux du monde, ce n’était pas la nouvelle la plus importante du monde ni d’Amérique du Sud. Car le Brésil a été éliminé en quarts de finales de la Copa America par le modeste Honduras, une république bananière d’Amérique Centrale qui a profité du refus de l’Argentine et du Canada de disputer le titre panaméricain en Colombie, un pays aussi dangereux que corrompu.

La honte, l’humiliation et la colère continuent à animer les dirigeants brésiliens, les journalistes et les supporters. Quelques heures après le match, Bandeirantes, la chaîne télévisée brésilienne, a résumé la descente aux enfers de l’équipe nationale en une minute, comme l’a raconté un correspondant de L’Equipe: trente secondes pour montrer comment Cris, le défenseur central, s’est fait démonter par un petit pont de l’attaquant du Honduras en début de rencontre et trente secondes pour montrer comment, en fin de match, le Honduras a gagné du temps en faisant circuler le ballon, encouragé par les olé, olé, olé des spectateurs colombiens en liesse.

La défaite brésilienne, même si elle a été essuyée à 3.000 mètres d’altitude, puisque le stade Manizalkes était le théâtre de la rencontre, n’a rien d’illogique. C’est la meilleure équipe qui a gagné. Luis Felipe Scolari, le troisième sélectionneur du Brésil en moins d’un an, après Wanderley Luxemburgo et l’ancien gardien Leao, a admis que le Honduras avait mieux joué, bien contrôlé le fil du match et marqué deux buts mérités. Voilà résumé tout le drame de la formation brésilienne, qui s’est déjà inclinée, tout aussi logiquement, contre l’Equateur, la France, l’Australie, l’Uruguay et le Mexique. Cette fois, c’était au tour du Honduras, pourtant privé de ses deux meilleurs joueurs, Pavon et Nunez. En plus, on lui a refusé un troisième but parfaitement valable et un penalty.

Suspendu suite au match contre le Paraguay, Scolari a dû suivre la rencontre depuis les places réservées aux commentateurs TV. Il était particulièrement abattu. Il est conscient d’entrer dans l’histoire comme l’entraîneur dont la sélection a été battue par le Honduras. Il a toutefois sous-estimé son adversaire, puisqu’il a permis à Cafu, Roberto Carlos, Rivaldo, Romario et Mauro Silva, décisifs au stade précédent contre l’Uruguay, de se reposer en prévision de… la finale.

Le 15 août, le Brésil va disputer un match décisif contre le Paraguay, dans le cadre des qualifications pour la Coupe du monde. Il est contraint à la victoire, sous peine de devoir faire l’impasse sur le tour final, ce qui ne lui est encore jamais arrivé. Les humiliations se succèdent, d’ailleurs. Pour préparer le match contre le Paraguay, la fédération a invité le Honduras à disputer une revanche à Rio mais celui-ci a décliné l’invitation, comme la Jamaïque et le Guatemala.

Les dirigeants brésiliens s’arrachent les cheveux. Ils ont changé trois fois d’entraîneur pendant la campagne de qualification. Luxemburgo a appelé 67 joueurs, Leao en a essayé d’autres encore et Scolari a voulu sauver les meubles en jouant trop défensivement. Les joueurs, dont 80% évoluent en Europe, ont dû rejoindre leur pays dix fois en un an, avec les problèmes de décalage horaire que ça suppose. En fait, nul ne sait qui mérite encore d’être sélectionné. C’est incroyable, quand on voit que pour la seule attaque, l’entraîneur a le choix entre Rivaldo, Romario, Denilson, Jardel, Elber et peut-être bientôt Ronaldo, même s’il ne sera sans doute pas prêt contre le Paraguay. Là où règne l’abondance…

Mick Michels

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