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La méthode Sollied

Il y a 22 ans, La Gantoise infligeait une raclée à un Willem II qualifié pour la Ligue des Champions. Le tout grâce à un Trond Sollied qui avait fait d’une tour de Babel une équipe soudée.

Co Adriaanse est furieux. Son Willem II s’est qualifié pour la première (et seule jusqu’à présent) Champions League de son histoire, mais subit une défaite honteuse contre La Gantoise, huitième du championnat belge, pendant la préparation.  » Tous les congés sont annulés « , tranche l’entraîneur.  » Les joueurs se souviendront longtemps de ce que je vais faire.  »

Le dimanche, en principe un jour libre, est consacré à deux sévères séances et ce n’est pas tout. Le lundi, les joueurs doivent se présenter dans un restaurant. Ils doivent y laisser leurs clés de voiture et rejoindre au pas de course le stade de Willem II, à 13,3 kilomètres de là, en moins d’une heure vingt. Après le lunch, Adriaanse leur réserve une autre surprise : ils doivent retourner au même rythme à l’endroit où ils ont laissé leur véhicule.

À l’époque, c’est un miracle que Gand affiche de tels automatismes. Cette saison-là, les Buffalos viennent d’engager onze nouveaux joueurs, parmi lesquels neuf étrangers, et ont pris congé de Marc Degryse. À l’exception du Français Eric Joly, transféré de Courtrai, tous les nouveaux sont de parfaits inconnus. La défense à quatre joue en zone. On s’étonne que la sauce prenne, car ces quatre nouveaux joueurs ne peuvent même pas se parler. Trois d’entre eux sont à l’essai. Le Hongrois Tamasz Szekeres était le seul à figurer sur la liste du nouvel entraîneur, Trond Sollied. Arrivé six mois plus tôt à Gand, il a consacré l’essentiel de ce laps de temps à observer l’équipe.

L’anglais devient la langue véhiculaire du vestiaire, ce qui est inhabituel à l’époque. Les médians axiaux Emil Sterbal et Cédric Carrez ne la maîtrisent pas. Les entraîneurs le savent.  » Mais nous sommes arrivés à la conclusion qu’il est impossible de satisfaire tout le monde et que ça irait plus vite en anglais « , explique l’entraîneur adjoint, Herman Vermeulen. Même si un journaliste parle cinq langues, il lui est difficile de rédiger un article sur la défense. Le médian Eden Ramcic, un Bosnien déjà présent à Gand, qui parle anglais et néerlandais, sert d’interprète. Il est très utile pour communiquer avec les Slovènes Saso Gasjer et Sterbal, qui peuvent à leur tour se faire comprendre de l’arrière gauche serbe Ivica Dragutinovic.

Gand, dont Ivan De Witte est devenu le président quelques semaines avant le début de la saison, dispose d’un noyau qui ressemble à une tour de Babel, mais sur le terrain, il découvre rapidement une équipe rodée, qui évolue systématiquement en 4-3-3, un système simple, basé sur des consignes claires, une tactique qui exige de la vitesse et offre du spectacle. Un jeu fait de nombreuses passes, qui est censé procurer un maximum d’occasions de but et donc de goals, déclare Sollied, qui applique un schéma fixe : pas de jour de congé, une journée avec deux séances, ou alors un seul entraînement long de deux heures. Et le vendredi, le fameux shadowgame, durant lequel les onze titulaires exercent leurs automatismes contre les réserves jusqu’à ce qu’ils les exécutent à la perfection. Sollied n’est pas surpris par sa réussite. Quand on lui demande comment il a pu former un ensemble soudé à partir d’hommes issus d’horizons aussi différents, il répond :  » C’est simple, je suis un football teacher. J’apprends aux joueurs à évoluer ensemble. Comment ? C’est mon métier.  »

Il balaie les excuses telles que les problèmes linguistiques.  » J’ai entraîné des enfants en Finlande alors que je ne parle pas un mot de finnois. Pourtant, ils ont parfaitement exécuté ce que je leur demandais.  »

Le 12 janvier 2000, Sollied aligne onze étrangers contre le Verbroedering Geel. Pourquoi ?  » Chelsea l’a déjà fait.  » C’est exact. Le 26 décembre, Chelsea a affronté Southampton avec onze joueurs non-anglais. C’est une première en championnat de Belgique. Gand achèvera finalement la compétition en troisième position. La joie d’Ivan De Witte sera cependant très vite tempérée, quand Sollied lui annoncera qu’il rejoint le rival de Gand, le Club Bruges.

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