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La meilleure préparation aux JO de tous les temps

9,95 sur 10. C’est la cote donnée par Olav Spahl, Chef de Mission pour Tokyo 2020, au stage annuel du COIB qui a eu lieu au cours des deux dernières semaines à Belek. Le Team Belgium veut inspirer le pays et la génération suivante.

Welcome to the home of Team Belgium, peut-on lire sur une bannière dans le hall de la Gloria Sports Arena de Belek, une ville près d’Antalya qui regorge de resorts touristiques et dont ce complexe sportif est la perle : un domaine de 105 hectares entièrement clôturé et protégé par des gardes. Le site internet mentionne fièrement que plus de 20.000 athlètes de haut niveau se sont déjà entraînés ici, dont 261 médaillés de tournois ou de championnats internationaux.

Ici, ça transpire la performance : des slogans sur les murs inspirent les athlètes. Au dessus de la réception, d’énormes chronos indiquent l’heure qu’il est à Rio, Tokyo et Paris. Dans les couloirs, on trouve aussi des dizaines de photos des plus grands champions olympiques. Mais surtout, des accommodations permettant la pratique de plus de cinquante sports, dont des piscines olympiques indoor et outdoor (avec des tours de plongeon), une piste d’athlétisme, des terrains de hockey, de beach-volley, de football, un hall avec trois terrains de basket et de volley, un ring de boxe, une immense salle de fitness et une chambre de cryothérapie. Plus un restaurant avec un buffet cinq étoiles uniquement composé de produits sains.

C’est encore mieux que le Club La Santa de Lanzarote, où le COIB se rendait chaque année depuis 1991. Cette fois, le comité olympique a préféré le complexe turc, où la fédération belge d’athlétisme a séjourné au cours des trois dernières années. De plus, il était moins cher que Lanzarote : un budget total de 250.000 euros (voyage en avion et séjour all in pour 64 athlètes, une trentaine de coaches, des kinés, les membres du staff du COIB, les dirigeants des fédérations, …)

L’idéal pour échapper au froid et à la pluie qui règnent sur la Belgique et s’entraîner ou récupérer au soleil, sous une température de 18 degrés, tout en bénéficiant d’une infrastructure de haut niveau. Pourtant, pour la troisième fois d’affilée, ce stage n’était pas compatible avec le programme de Nafi Thiam. Les judokas (en stage/tournoi au Japon), Pieter Timmers (à l’EURO en petit bassin) et Nina Derwael (parce qu’il n’y avait pas de salle de gymnastique) n’étaient pas là non plus.

Fanny Lecluyse et Emma Plasschaert.
Fanny Lecluyse et Emma Plasschaert.© BELGAIMAGE

La condition physique avant tout

Parmi les athlètes de neuf disciplines présents, on retrouvait Emma Plasschaert. Il n’y avait pourtant pas de plan d’eau dans les environs mais elle a travaillé sa condition physique en compagnie de son coach britannique Mark Littlejohn et de son préparateur physique, Ward Vande Cappelle. Souvent accompagnée de la nageuse Fanny Lecluyse, qui partageait sa chambre, elle a fait du spinning, de la musculation et de la natation. Ce nouveau plan de travail doit encore la rendre plus dynamique.

Depuis qu’ils ont repris l’entraînement après leur titre européen, il y a deux mois, les Red Lions suivent également un programme individuel. À Belek, où le terrain de hockey était pourtant en parfait état, ces séances avaient même priorité sur les entraînements.  » Nous voulons profiter de cette période creuse pour travailler les points faibles des joueurs afin de les rendre encore un peu plus forts « , dit le préparateur physique, Mick Beunen.  » On sent d’ailleurs qu’ils ont plus envie de faire ça que de jouer au hockey ou de prendre part à des séances tactiques. Parce qu’ils savent qu’à Tokyo, où il fera très chaud, la condition physique sera cruciale.  »

Vincent Vanasch et Toma Nikiforov en pleine séance d'échanges Panini.
Vincent Vanasch et Toma Nikiforov en pleine séance d’échanges Panini.© BELGAIMAGE

Si le COIB a choisi un complexe où les hockeyeurs peuvent s’entraîner sur un terrain ad hoc, contrairement à Lanzarote, ce n’est pas par hasard. Les Red Lions font figure d’exemples en matière d’esprit d’équipe. Il leur appartient de montrer aux athlètes individuels ce qu’est la culture du sport de haut niveau, a winning environment, comme dit Olav Spahl, le nouveau directeur du sport de haut niveau du COIB, qui sera aussi Chef de Mission à Tokyo 2020. Dans cet environnement, chaque détail compte. C’est ainsi que, dès le début du stage, chaque athlète s’est vu remettre un flacon contenant un gel désinfectant et que Spahl a introduit une nouvelle règle : pas d’alcool pour les accompagnants au restaurant non plus.

Sentiment d’appartenance

La présence des Red Lions devait également consolider le sentiment d’appartenance au Team Belgium. C’est quelque chose dont leur coach, Shane McLeod, parle avant chaque match.  » Un sentiment qu’on ressent de plus en plus depuis Rio 2016 et dans la dernière ligne droite vers Tokyo 2020 « , dit Spahl.  » J’ai très souvent vu des sportifs belges encourager ou féliciter leurs compatriotes sur les réseaux sociaux.  » Ce n’est pas par hasard qu’au cours d’une réunion des athlètes, le COIB a montré la vidéo sur laquelle on voit les Red Lions devenir complètement fous dans leur chambre d’hôtel de Rio tandis que Pieter Timmers décroche la médaille d’argent. Ce sont encore les hockeyeurs qui, à Belek, sont restés scotchés devant la télévision tandis que le golfeur Thomas Detry décrochait une belle quatrième place lors d’un tournoi à l’Île Maurice. Et c’est toujours eux qui ont joué à UNO dans le lobby ou ont participé à des petits matches de foot-tennis avec d’autres athlètes, les perdants ayant un gage : ramper cent mètres, sauter dans l’eau depuis le tremplin de 10 mètres, rester une demi-heure dans l’ascenseur sans GSM, aller manger avec les lacets des deux chaussures attachés ou chanter devant tout le groupe.

Belek et ses infrastructures à la pointe.
Belek et ses infrastructures à la pointe.© BELGAIMAGE

À l’initiative d’Olav Spahl, le COIB a également organisé des réunions et des soirées favorisant l’interaction entre les athlètes. Notamment un quizz olympique et une social sports night au cours de laquelle des équipes mixtes jouaient au basket, au volley ou au bumball (un jeu au cours duquel les joueurs ne peuvent réceptionner la balle que sur la poitrine ou les fesses grâce à des velcro). Le COIB a même commandé 200 albums Panini avec les autocollants de tous les sélectionnés présents. À charge pour eux de se les échanger au cours du stage et de remplir leur album en créant un maximum de contacts spontanés. Un grand succès car les athlètes en ont profité pour échanger leurs numéros et des autographes.

La Tokyo 2020 Home of Team Belgium a également permis d’échanger des idées. Afin de rendre le camp de base japonais à Mito et le village olympique de Tokyo aussi confortables, inspirants et accueillants que possible, plusieurs questions ont été posées aux athlètes. Ils y répondaient en groupe, sur des post-it qu’ils collaient ensuite au mur. Quel est le plus beau moment de l’histoire du sport olympique belge ? Qu’est-ce qui est important dans la loge des athlètes ou dans leur chambre ? Quel plat ou quelle boisson vous fait penser à la Belgique ? Quelles chansons vous donnent de l’énergie ou vous apportent de la sérénité ? Gert Van Looy, olympic games manager du COIB, va compiler les réponses pour se rendre au Japon tandis que Ben Roeges et Benjamin Wery, du service communication, établiront les playlists Team Belgium qui seront lancées sur Spotify avant les Jeux.

Tout cela doit renforcer le sentiment d’appartenance à un groupe, à une nationalité. Au restaurant, les places changeaient constamment mais l’activité qui a le plus renforcé la cohésion du groupe fut l’après-midi de team building au cours de laquelle dix équipes de dix athlètes et accompagnateurs ont dû construire des Formule 1 en bois et confectionner des équipements de pilote sur base de toute une série de modèles. Une course contre-la-montre a ensuite été organisée sur un terrain en herbe, avec un pilote et deux pousseurs. Avec des sorties de route provoquant l’hilarité générale. Johan Bellemans, le chef du service médical, craignait tout de même les blessures. Surtout lorsqu’un kiné est tombé et s’est fait mal à la clavicule. Un petit moment de frayeur au cours d’une séance très amusante qui a permis de voir que chacun avait l’esprit de compétition et que même ceux qui avaient deux mains gauches se donnaient à fond.  » C’est exactement ce que nous attendons de chaque sportif aux Jeux Olympiques « , dit Jef Brouwers, le psychologue du Team Belgium.  » Il faut s’imposer une pression positive pour donner le meilleur de soi-même et se surpasser.  »

Olav Spahl, directeur du sport de haut niveau du COIB avec Pierre-Olivier Beckers (président), Luc Rampaer (Communication Manager) et Philippe Vander Putten (CEO).
Olav Spahl, directeur du sport de haut niveau du COIB avec Pierre-Olivier Beckers (président), Luc Rampaer (Communication Manager) et Philippe Vander Putten (CEO).© BELGAIMAGE

Expertise à tous les étages

Les présences de Jef Brouwers et de la diététicienne Stephanie Scheirlynck ne relevaient pas du hasard. Cela fait des années que Brouwers participe au stage annuel tandis que Scheirlynck a été invitée pour la première fois, à la demande d’Olav Spahl, qui souhaitait mettre encore davantage l’accent sur la nécessité d’une alimentation saine, surtout pour les athlètes qui n’ont pas encore de diététicien.  » Ici, on se côtoie plus facilement et ils n’hésitent pas à venir vers moi, à me demander à partir de quand ils devront faire très attention à leur alimentation ou à me dire qu’ils aimeraient devenir (partiellement) végétariens.  »

Cette expertise vise à perfectionner encore davantage la préparation sur tous les plans. C’est ainsi que deux représentants de l’agence de presse Belga ont donné aux athlètes une séance d’entraînement aux médias d’une heure. L’an prochain, ces séances s’intensifieront et seront très spécifiques. Les athlètes ont également reçu des consignes concernant l’usage des réseaux sociaux, notamment au sujet des messages de remerciement à leurs sponsors personnels. En plus de leur flacon de gel antiseptique, ils ont également reçu un feuillet leur indiquant comment se laver les mains et éviter les nids à bactérie dans les avions.

Johan Bellemans et son équipe médicale ont ensuite soumis chaque athlète à un Functional Movement Screening (FMS).  » Cela nous permet de savoir comment chaque athlète bouge de façon optimale, de lui dire comment éviter les soigner les petites anomalies ou les déséquilibres musculaires afin d’être encore plus explosif, par exemple « , dit Bellemans.  » La différence est minime mais elle peut permettre de décrocher une médaille.  »

À Belek, on a également mis en place de façon définitive la plate-forme Pangea.  » Pangea, c’était le nom du continent originel, avant les fractures « , explique le physiothérapeute Tom Mertens.  » À partir de maintenant, toutes les informations médicales des deux cents participants potentiels aux JO, tous les traitements et toutes les consultations chez le kiné ou le médecin seront regroupées dans un seul dossier en ligne. Tous les accompagnants du sportif et l’équipe du COIB seront ainsi immédiatement au courant, notamment grâce à la fiche que l’athlète devra rendre chaque semaine. À la moindre douleur, au moindre sentiment de malaise, nous pourrons ainsi intervenir et éviter les mauvaises surprises avant les Jeux.  »

Les Red Lions disposaient de plusieurs terrains de hockey.
Les Red Lions disposaient de plusieurs terrains de hockey.© BELGAIMAGE

Olav Spahl veut également accentuer le regroupement et l’échange d’informations entre les coaches via l’ Olympic Coaches Platform. À Belek, l’Anglais Davoud Etminani, coach de l’équipe de taekwondo, a donné une conférence intitulée Achieving world class performances. Mark Littlejohn, l’entraîneur d’Emma Plasschaert, a parlé des deux R (routine et répétition) en tant que ciment de la performance tandis qu’Olav Spahl a dirigé une séance interactive sur la façon dont un athlète doit gérer les attentes de la presse, de sa famille, de sa fédération et des sponsors, un des pièges des Jeux Olympiques.

Des entraîneurs et des représentants de différents sports ont également échangé en dehors de ces séances. C’est ainsi que Koen Umans, team manager de l’équipe de basket féminine, a pris langue avec Wim Vandeven, coach des athlètes, afin de savoir comment améliorer la détente des Belgian Cats et leur permettre de prendre davantage de rebonds grâce à un meilleur timing, comme les sauteuses en hauteur. Ici aussi, chaque centimètre peut faire la différence.

Activité team building : course de F1 en bois.
Activité team building : course de F1 en bois.© BELGAIMAGE

Innovation

Plus que jamais, tous les départements du sport de haut niveau national collaborent. Ces dernières années, ils ont également pu compter sur l’aide d’universités et d’entreprises belges qui ont mis à leur disposition des innovations technologiques. C’est ainsi qu’en collaboration avec Sport Vlaanderen, des experts ont préparé pendant deux ans un plan de lutte contre la chaleur qui a été finalisé à Belek et communiqué aux athlètes et aux coaches. À charge pour eux de le mettre en pratique. Les athlètes belges seront mieux préparés que quiconque à la chaleur et à l’humidité de Tokyo car la préparation n’a jamais été aussi scientifique et aussi détaillée.  » Comparée à celle-ci, la préparation pour les Jeux de Pékin 2008 – il y a onze ans seulement – était préhistorique. Le jour et la nuit « , dit Johan Bellemans, qui n’exagère même pas.

Cela ne veut pas dire que nos athlètes décrocheront plus de médailles (6) ou de places dans le top 8 (19) qu’à Rio, ce qui constitue l’objectif du COIB. Mais ce qui est sûr, c’est que jamais le sentiment d’appartenance, la rage de vaincre et la confiance des membres du Team Belgium n’ont été aussi forts..

Le Néerlandais Rutger Smith, ex-star mondiale du poids et du disque, nouveau coordinateur du sport de haut niveau à la fédération flamande d’athlétisme, s’en rend compte :  » Avant, en matière de culture du sport de haut niveau et de médailles, les Belges prenaient exemple sur les Néerlandais. Mais après les succès de Derwael, Thiam, Plasschaert, des Belgian Cats et des Red Lions, je reçois de plus en plus de messages des Pays-Bas dans lesquels on me demande ce qu’il se passe en Belgique. Et je pense que ce sera encore pire après Tokyo.  »

Chad le Clos : supporter des Belges

À la Gloria Sports Arena, nous avons rencontré Chad le Clos, le nageur/modèle sud-africain qui, aux Jeux de Londres, en 2012, avait battu Michael Phelps sur 200 mètres papillon, pour la plus grande joie de son père. Selon Louis Croenen, finaliste de la même épreuve à Rio, Le Clos passe énormément de temps à Belek. Ils s’y sont d’ailleurs déjà entraînés ensemble.

Pas tellement cette fois car le Sud-Africain décompressait un peu après une manche de l’International Swimming League à Las Vegas. Il a donc surtout passé beaucoup de temps à jouer au poker avec les Belges –  » Ne me demandez pas avec qui « – ou à parler au bar avec les Belgian Cheetahs. Ou avec le hockeyeur Manu Stockbroekx, à qui il a raconté que Phelps, qu’il a battu plus tard, était son idole lorsqu’il a commencé à nager. Stockbroekx lui a alors raconté par le menu le parcours des Red Lions, à qui il ne manque qu’un titre olympique. À Tokyo, les hockeyeurs belges pourront compter sur le soutien du nageur sud-africain.

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