La lâcheté communautaire…

Question : y a-t-il communautarisation de nos dérisoires questions footeuses dans ce pays petit ? Réponse : oui, inévitablement. Parce qu’en foot comme ailleurs, et c’est le B-A-BA de toute vie sociale, nous sommes d’abord proches et potes de ceux avec lesquels nous causons, et nous causons mieux et plus souvent avec ceux qui causent la même langue ! Corollaire, nous râlons plus facilement sur ceux qui sont plus loin, avec lesquels nous causons moins et qui nous comprennent moins quand nous râlons. Exemple : si je souhaite vous expliquer qu’il y a trop de vicelardises sur les terrains de foot, il me sera plus facile de citer comme prototype Marco Materazzi, voire Jérôme Simaeys un jour où il aura eu le malheur de vicelarder en gros plan à la télé, plutôt que le défenseur d’un club wallon : l’adrénaline que je déchargerai me fera du bien par où elle passera, et je risquerai moins les retours de flamme. Une lâcheté somme toute fort naturelle, je ne vous le fais pas dire…

Ce tic de l’enfer-c’est-les-autres-plus-loin se remarque ainsi dans nos analyses quand patauge l’arbitrage : le Club Bruges est souvent favorisé (en ajoutant alors subrepticement que Michel D’Hooghe a été président fédéral…), Wesley Sonck a été très méchant en blessant Marcos, Stijn Stijnen est la version mise à jour d’ Harald Schumacher le keeper-killer, Jacky Mathijssen est beaucoup moins sympa que lorsqu’il coachait les Zèbres, Joseph Akpala aurait pu tuer LoganBailly le Wallon… Que d’ostracisme, et que serait-ce si Bruges était en tête ? ! Le tic se remarque aussi quand nous fulminons sur l’URBSFA : nous fulminons sur François De Keersmaecker qui ne s’exprime jamais en français, davantage que sur Jean-Marie Philips qui s’exprime fort bien. Et il se remarque évidemment dans nos revendications par rapport aux choix sportifs de René Vandereycken : pourquoi pas Jonathan Legear, Sébastien Pocognoli, Guillaume Gillet, Bailly,… Jean-François de Sart ? !

Et les Flamands ? S’agitent-ils itou pour les leurs ? Pestent-ils sur Kevin Mirallas, Daniel Van Buyten ou Emile Mpenza ? Réclament-ils avec virulence Hans Cornelis, Gil Swerts, Bjorn Vleminckx… ou le retour de Karl Hoefkens ? Geheim et boule de gomme, nous ne sommes guère tenus au courant : preuve que nos communautés échangent peu leurs impressions…

Mais ce qui perturbe le plus en ce moment, c’est le F.W.C.C. (Front wallon contre le caca), celui-là je le sens mal ! Que Tubize et Louis Derwa s’offusquent d’avoir été blâmés sans que les supporters de Genk l’aient été, admettons. Que des Olivier Maingain ou des Rudy Demotte surgissent de nulle part au foot pour décider de s’offusquer, ça me paraît déjà plus opportuniste. Et quand le Standard, Charleroi ou Mons estiment nécessaire de monter au créneau pour soutenir Tubize, ils montent en épingle communautaire une lamentablerie footeuse bien plus vaste que ça : ils se posent en victimes pleurnicheuses du sarcasme flamand, dans un contexte mondial de supporterisme footballistique où le sarcasme a toujours été admis, voire folklorisé : chambrer fait partie intégrante de la Culture/Foot. Encourager les siens y a toujours inclus, et je dis mille fois hélas, des initiatives pour décourager les opposants : des huées aux sifflements, de la taquinerie pas si gentille que ça aux ricanements les plus racistes (pas plus tard que voici dix jours, au détriment du Ghanéen John Mensah, lors de Le Havre-Lyon)…

Aussi préférerais-je de loin un F.B.A.V. (Front belge anti-vexatoire), qui réunirait TOUS nos clubs dans un seul engagement, celui d’interdire à leurs supporters toute manifestation qui s’éloignerait d’un soutien positif à leurs couleurs : en faisant serment de s’organiser pour contrôler la chose en interne et sans les flics, en sanctionnant leurs propres indociles sans faiblesse et sans la fédé ! Ça, ce serait adulte ! Et surtout, surtout, qu’on fiche la paix au referee avec ça ! A tout prendre, si le comité exécutif préfère se débiner en intimant aux arbitres de quantifier en son nom le degré d’insanité des gradins, qu’il en donne l’entière responsabilité au quatrième arbitre qui n’a guère à foutre ! Mais l’arbitre principal, lui, a déjà suffisamment de pain sur la planche en devant surveiller 22 tricheurs potentiels à l’aide d’un règlement foireux… sans qu’on lui demande en plus d’ARBITRER LES SPECTATEURS ! Pauvre homme, faut pas charrier.

par bernard jeunejean

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