La guerre des goals

Le nouveau venu a piqué la place du titulaire…

Le RWDM a subi un sérieux lifting pour son come-back parmi l’élite. Des joueurs qui furent essentiels dans le dispositif molenbeekois ces trois dernières années doivent aujourd’hui se contenter d’une place dans le dug-out. Après dix ans d’attente, d’abord dans l’ombre de Dirk Rosez puis dans l’antichambre, Wilfried Godart pensait que son heure était venue de prouver ses capacités à l’étage supérieur. Il espérait donner une autre dimension à sa carrière. C’est en tout cas l’état d’esprit qui l’a animé lorsqu’il a paraphé une reconduction de contrat de deux ans.

L’arrivée de Gert Doumen en provenance de l’Excelsior Mouscron ne l’inquiétait pas exagérément. D’ailleurs, à l’issue de la campagne de préparation, c’est bel et bien lui qui a débuté le championnat à Lommel. Malheureusement, son exclusion après vingt minutes de jeu pour avoir commis la faute nécessaire sur Ibrahim Tankary lui a joué un vilain tour. Depuis lors, c’est le nouveau venu qui officie dans les buts du RWDM. Jusqu’à quand?

La concurrence fait évidemment partie du lot quotidien des joueurs de foot. Surtout en D1. Pourtant, Wilfried Godart, qui a tout connu au RWDM, de la Coupe d’Europe à la relégation, ne s’attendait pas à être écarté de sitôt. Aujourd’hui, il sort un peu du k.o. technique qu’il a encaissé lorsque Patrick Thairet l’a écarté lors de la venue de Charleroi.

« Il n’y avait aucun signe avant-coureur », explique Wilfried Godart. « Au contraire, le coach m’avait dit que l’exclusion était imméritée. Lors du match amical qui a suivi contre les Marocains de FAR Rabat, il a aligné Doumen. Je pensais reprendre ma place contre les Zèbres et ne la céder qu’à l’occasion de ma suspension dont la durée n’a pas encore été fixée par l’Union Belge. Me retrouver sur le banc de touche fut un vrai coup de massue. Cela faisait dix ans que j’attendais de saisir ma chance en D1. J’avais disputé un bon tour final et je pensais que mon crédit était plus important. Si j’étais capitaine, cela signifiait quand même que j’étais un pion majeur de l’équipe. Si j’avais été mauvais pendant trois ou quatre matches, j’aurais compris. Ici, c’est tellement rapide ».

Doumen a vécu cette situation à Genk

Si les circonstances sourient actuellement à Gert Doumen, le Limbourgeois n’en tire aucune gloriole. Car il a déjà vécu un épisode identique jadis lorsqu’il avait conquis ses galons de titulaire. Ou du moins le pensait-il. « Je comprends la déception de Wilfried », avoue-t-il. « Elle est légitime de la part d’un sportif. Lors du début de l’ascension de Genk sous la baguette d’ Aimé Anthuenis, j’avais entamé le championnat et même disputé une quinzaine de rencontres consécutives avant que l’entraîneur ne titularise du jour au lendemain le Hongrois Istvan Brockhauser. Croyez-moi, j’en ai souffet même si mes regrets furent atténuées par les incroyables saisons que j’ai vécues. Deux Coupes de Belgique et un titre de champion, cela ne s’oublie pas même si mon histoire d’amour avec le club, surtout avec la direction, a tourné en eau de boudin ».

Pire, la saison dernière, il avait été relégué dans le noyau B de Genk et n’avait pas hésité à sauter sur l’occasion mouscronnoise quand elle s’est présentée. Même si elle ne devait pas déboucher sur une situation nettement plus rose.

« Lorsque Francky Vandendriessche s’est blessé, Hugo Broos m’a contacté alors que je m’enterrais dans le noyau B de Genk. Son discours a été très clair: « Gert, j’ai besoin d’un numéro deux. Kurt Vandoorne est mon titulaire ». C’était à prendre ou à laisser. Mon contrat à Genk arrivait à échéance, j’ai tenté le coup ».

Au bout de la saison, il a disputé… deux matches et une floppée en Réserves. « L’important pour moi était de conserver le rythme de jeu et des entraînements professionnels. J’aurais pu perdre totalement cette saison mais je l’ai mise à profit pour rester dans le coup. Aujourd’hui, j’en retire les fruits ».

A la reprise des entraînements, la hiérarchie des trois portiers (il faut encore compter avec le jeune Tom Meyers) paraissait floue mais, rapidement, Wilfried Godart a quand même semblé se détacher.

« Lorsque j’ai signé mon contrat au RWDM, dans ma tête, c’était pour y être titulaire », affirme Gert Doumen. « Mais la direction m’a rétorqué que Wilfried Godart donnait pleine satisfaction. Et donc que je serais mis en concurrence avec lui. J’étais déçu d’être réserviste à Lommel pour la reprise du championnat. Aujourd’hui, j’ai accompli le premier pas: me retrouver dans le but au départ des matches. Cela ne signifie pas que je suis titulaire mais je possède quand même une légère avance ».

« Je m’attendais à un autre traitement »

Après avoir encaissé l’uppercut qu’il n’avait pas vu venir, Wilfried Godart se remet. Même s’il sait que, sauf blessure ou méforme persistante, il se retrouve à nouveau dans la salle d’attente. Et que celle-ci peut durer longtemps.

« Moi qui pensais avoir du crédit, je dois reprendre tout presque à zéro », affirme le capitaine déchu. « Finalement, même si je n’y avais pas pensé, je me retrouve dans la même situation qu’il y a quatre ans. C’est frustrant. Je considère cette place sur le banc comme un pas en arrière car je viens de disputer trois championnats consécutifs en tant que titulaire. J’ai goûté à la compétition et cela me manque déjà. Je m’imagine déjà devoir rejouer avec la Réserve. Pour l’heure, je n’ai qu’une obsession: oublier cet incident au plus vite et faire tout pour me tenir prêt le cas où. La saison sera longue et cela ne sert à rien de polémiquer, même si cette mise à l’écart ne m’amuse pas. Je m’attendais franchement à un autre traitement ».

Gert Doumen tient son os et il n’est pas disposé à le partager : « Wilfried avait peut-être oublié ce qu’était la concurrence. En D1, elle peut être cruelle. Cela ne signifie pas qu’il n’est pas un bon gardien. Dans d’autres secteurs de jeu, des joueurs titulaires il y a quelques mois en D2 se retrouvent aussi confinés sur le banc ».

Une certitude: le RWDM aura besoin d’un gardien qui prend des points, comme on dit. Jusqu’à présent, malgré des prestations exemplaires, cela n’a pas suffi. Le RWDM doit s’adapter aux vicissitudes de l’élite mais le temps s’écoule très vite. Et il est toujours difficile de se remettre d’un départ loupé.

« J’ose le dire: le RWDM ne possède pas une équipe faible », dit Gert Doumen. « Certes, les points manquent mais le fonds de jeu existe. C’est essentiel pour une équipe qui devra se battre durant toute la saison. Nous ne sommes pas plus faibles que Lommel et même Charleroi ne nous a pas survolés ».

En filigrane, on sent pointer le débat sur l’avant-centre. La fameuse pièce qui manque au dispositif pour qu’il soit efficace. Après de multiples tests, le RWDM a pris langue avec Genk concernant la possibilité de louer David Paas, en disgrâce mais qui dispose d’un contrat très attractif dans le Limbourg.

« Je le connais pour l’avoir côtoyé là-bas », commente Gert Doumen. « Je ne veux pas présager de la décision finale mais ce serait la solution idéale. Dans chaque équipe où il est passé, il a marqué. Sauf à Genk ».

Wilfried Godart attend lui aussi que son équipe prenne des points, même s’il préférerait participer activement à leur conquête. « Le grand désavantage du gardien de but, c’est qu’il ne peut pas jouer back droit et milieu gauche. Il n’y a qu’une place. Et pour le moment, je ne l’ai pas ».

Jean-Marc Ghéraille

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