La fin du chemin de croix

Par respect pour lui-même, John van den Brom n’aurait-il pas mieux fait de conclure un accord avec Anderlecht et de prendre l’initiative de s’en aller au lieu d’attendre que d’autres décident de son sort ? Car ces dernières semaines, comment le Néerlandais a-t-il encore pu entrevoir la moindre lumière au bout du tunnel ? A quelle illusion de redresser le navire a-t-il bien pu se raccrocher ? Semaine après semaine, des joueurs ont clamé qu’il fallait que ça change. Chaque semaine, ils ont promis de jouer avec concentration et passion et chaque fois, ce n’étaient que paroles en l’air. Chaque semaine, John van den Brom, comme samedi à Louvain, affrontait la presse, courageux mais impuissant. Dans ces circonstances, ne vaut-il pas mieux se libérer soi-même de son calvaire ? Cela coûte de l’argent, évidemment, beaucoup d’argent, mais c’est la marque d’une forte personnalité et on évite ainsi de perdre la face.

Jadis, alors qu’il menait avec cinq points d’avance, et qu’une victoire rapportait deux points, Anderlecht a limogé un entraîneur au début de la trêve hivernale. C’était Luka Peruzovic en décembre 1992. La direction trouvait qu’il ne développait pas un football suffisamment attractif. Le Croate a très mal vécu ce renvoi. John van den Brom a obtenu beaucoup plus de crédit. S’il est honnête envers lui-même, il sait qu’un entraîneur qui cherche en vain le bon concept, toute une saison, est responsable de l’impasse actuelle. Si Van den Brom procède à son examen, il ne peut qu’arriver à la conclusion qu’il ne reste plus grand-chose du fameux flair néerlandais. On l’a constaté il y a quelques semaines, quand il n’a aligné qu’un seul avant contre Mons, la lanterne rouge, alors qu’il jouait à domicile. John van den Brom n’est pas un entraîneur méthodique. Les joueurs apprécient généralement les entraîneurs qui ne les étouffent pas et laissent libre cours à leur instinct. Or, ces dernières semaines, le groupe a multiplié les critiques. Par exemple, qu’il n’était pas assez dur. Van den Brom a beau dire que ce serait en contradiction avec sa nature, c’est une qualité essentielle pour tenir le coup dans un grand club et surtout à Anderlecht, où beaucoup de joueurs cultivent une image trop flatteuse d’eux-mêmes. John van den Brom est resté impuissant. En ce sens, son limogeage doit constituer une délivrance.

Si Anderlecht a perdu neuf fois cette saison en championnat, ce n’est pas seulement la faute de l’entraîneur. Le bulletin des transferts est négatif. Le noyau a été mal recomposé après le départ de plusieurs piliers. Il n’y a pas de leaders, seulement des footballeurs fragiles et irréguliers. L’éclosion des jeunes semblait constituer une priorité en début de saison mais ces talents sont en recul. C’est aussi lié au manque de leadership, qui freine le développement des jeunes, qui ne peuvent s’exprimer dans l’ombre d’autres plus chevronnés. Anderlecht semblait soutenir son entraîneur. Il avait insisté : il n’était pas question de le limoger. Le club espérait conserver Van den Brom et s’en séparer normalement en fin de saison. Mais le football minable développé à Louvain et la crainte de rater une qualification européenne -pour la première fois en 50 ans- n’a laissé d’autre choix au champion.

Reste à voir si ça ira mieux avec Besnik Hasi. On prédit un bel avenir à l’Albanais au poste d’entraîneur et tous ceux qui ont travaillé avec lui le comblent de louanges. Ce n’est pas une garantie de succès, surtout pas avec une équipe qui a perdu le nord et est sous l’emprise du stress. Mais Besnik Hasi n’a peur de rien. Il brûle d’impatience de faire ses preuves. Reste à espérer pour lui comme pour Anderlecht qu’il ne se surestime pas.?

PAR JACQUES SYS

Van den Brom n’est pas le seul responsable des neuf défaites.

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