La facilité du penalty

L’attaquant bosniaque n’est pas content de son premier tour et essaye de trouver des moyens de rectifier le tir.

Lorsqu’on consulte les statistiques du premier tour, on constate que BertinTomou et AdnanCustovic avaient pris à leur compte 16 des 23 buts inscrits par l’Excelsior Mouscron. Autant dire que le départ de l’attaquant camerounais pour la Coupe d’Afrique des Nations est fortement ressenti du côté de la frontière et que tout le poids offensif des Hurlus repose quasiment sur le Bosniaque. Lors du premier match officiel de 2008, Adi s’était retrouvé seul en pointe à Gand et on s’était un peu demandé qui, en dehors de lui, était capable de trouver le chemin des filets.  » Je ne vais évidemment pas critiquer mes partenaires, et je reste persuadé que tout le monde est capable d’inscrire un but, mais c’est vrai que les chiffres sont révélateurs « , reconnaît l’intéressé.  » Heureusement, on n’affrontera pas chaque semaine une équipe de la qualité de Gand « .

Lors du premier tour, sous MarcBrys, Custovic (auteur de 18 buts la saison dernière) a évolué sur le flanc droit. Une position dans laquelle il lui était plus difficile d’être efficace à la conclusion.  » J’ai obéi aux instructions de l’entraîneur. Brys estimait que, pour l’équipe, il était préférable que je joue à droite. Je me suis donc sacrifié au profit de la collectivité… comme je l’ai toujours fait au cours de ma carrière. Forcément, j’étais moins présent devant les buts, mais, comme les résultats suivaient – dans un premier temps, en tout cas – je ne me suis jamais plaint « .

Arriva cependant un moment où les victoires se sont raréfiées.  » Tout le monde a connu une baisse de régime. On n’est plus parvenu à reproduire le jeu qui était le nôtre en début de saison. On ne fournissait plus les mêmes efforts. Contre Mons et Lokeren, on était parvenu à gagner des matches à dix contre onze, simplement parce qu’on formait un véritable bloc. Dans l’adversité, on s’était serré les coudes et on s’est jeté sur tous les ballons. Ce ne fut plus toujours le cas par la suite. Inconsciemment, on a relâché la pression « .

Inconsciemment, ou parce que les méthodes de Brys commençaient à lasser ?  » Pour moi, inconsciemment, mais je ne peux pas parler pour les autres. On était sur un petit nuage et on a pensé que cela irait tout seul. Grave erreur « .

 » Etre attaquant à Mouscron, c’est difficile « 

Lors du premier tour, Tomou a un peu volé la vedette à Custovic.  » Cela ne m’a pas dérangé. J’étais content pour lui, car c’est un garçon qui a toujours beaucoup travaillé, parfois dans l’ombre. Il s’est toujours donné à fond, même la saison dernière où certains – surtout des gens qui n’y connaissent rien en football – l’avaient critiqué. Déjà alors, il ennuyait beaucoup les défenseurs adverses, mais c’étaient les autres qui en profitaient. Cette saison, il a connu un peu plus de réussite devant les buts, mais c’était la juste récompense de son travail. J’espère toujours qu’il terminera meilleur buteur du championnat « .

Et Adi lui-même ?  » Je ne suis pas content de mon premier tour. J’ai marqué sept buts, mais seulement trois de plein jeu : les quatre autres furent inscrits sur penalty. C’est trop peu « . Heureusement qu’il les a transformés, ces penalties !  » Vous savez, pour moi, un penalty, c’est… facile ! C’est juste une question de confiance. Au moment où je m’élance, je sais que je vais marquer. Je ne regarde pas le gardien et je décide au dernier moment si je vais tirer en force ou en finesse, dans un coin ou au milieu. Je tire sans pression : je sais que les plus grands joueurs du monde ont déjà raté un penalty, même en finale de Coupe du Monde. Alors si Adnan Custovic rate un coup de réparation en championnat de Belgique, combien de personnes vont-elles me le reprocher ? ».

Et ses fameux coups francs tout en puissance et en précision, expédiés des 30 mètres ?  » Puissance, oui. Précision… cela dépend. Parfois ils filent dans la lucarne, parfois ils atterrissent dans le jardin de la villa voisine du Canonnier ! ( ilrit) Cette saison, je n’en ai transformé qu’un : contre Anderlecht. C’était un joli but, mais qui n’a rien rapporté « .

Après le Tunisien HamdiHarbaoui, l’Excelsior pensait engager le Chilien HectorTapia.  » Les attaquants, ce n’est pas ce qui manque à Mouscron. EnzoScifo devra faire des choix. La concurrence sera encore plus féroce qu’au premier tour. Espérons qu’elle incite tout le monde à se remettre en question, comme c’était le cas en début de saison. Comme attaquant, on a un rôle difficile à Mouscron. Même en 4-3-3, sous Brys, les avants devaient aussi défendre. A Gand, où TrondSollied prône également un 4-3-3, je n’ai pas eu l’impression que les trois attaquants avaient reçu beaucoup de consignes défensives. Ils permutaient simplement devant. A Mouscron, cela a toujours été un 4-3-3 en phase offensive et un 4-5-1 en récupération. On perd beaucoup d’énergie à défendre. Mais le succès est à ce prix. A l’Excelsior, la réussite dépend du collectif : il faut que tout le monde attaque et que tout le monde défende « .

 » Broeckaert, que fait-il là ? Et où est Brys ? »

Mouscron est donc reparti en campagne avec un nouvel entraîneur. Le changement s’imposait-il ?  » Pour moi, non. Brys était un bon entraîneur et un homme droit. Manquait-il de charisme, à cause de son passé de footballeur anonyme ? Cela n’a rien à voir. J’ai toujours été à l’écoute de tous mes entraîneurs, quels qu’ils soient. Avec Brys, il y avait d’ailleurs intérêt à obtempérer, puisque c’est un… policier ! ( ilrit) Sérieusement, j’estime qu’on ne peut jamais attribuer les mauvais résultats à un entraîneur. Les premiers fautifs sont toujours les joueurs. Mais la direction a pris ses responsabilités et il faut respecter son choix « .

Custovic a appris le limogeage de Brys de bien curieuse façon.  » Le lundi, qui était notre jour de congé, je n’avais ni écouté la radio, ni regardé le télétexte. Je ne me doutais de rien lorsque j’ai repris le chemin des entraînements, le mardi matin. J’ai croisé GeertBroeckaert au stade, je l’ai salué mais je me suis demandé ce qu’il faisait là. J’ai été étonné de ne pas apercevoir Brys. C’est au moment où le président PhilippeDufermont a pris la parole que mon franc est tombé. J’ai eu du mal à réaliser. Dufermont nous a expliqué que l’éviction du coach anversois n’était pas directement liée aux moindres résultats enregistrés durant la fin du premier tour, mais plutôt au fait qu’il ne cadrait pas avec la politique sportive du club. Voilà, c’est comme cela. Que voulez-vous que je vous dise de plus ? Je ne suis qu’un employé « ..

Arrivé dans la Cité des Hurlus en 2005, à l’époque de RolandLouf, Adi a déjà vécu en deux ans et demi ce que certains footballeurs vivent en une carrière entière.  » Durant cette période, je me suis retrouvé sous les ordres de plusieurs présidents, de plusieurs entraîneurs, de plusieurs directeurs sportifs. J’ai connu une menace de faillite, l’incertitude liée à l’obtention de la licence et, aujourd’hui, je me réjouis de cette sérénité retrouvée. Notez que, même dans les périodes où la situation financière était délicate à Mouscron, on a toujours été payés. Parfois avec quelques jours de retard, mais jamais avec des délais de six mois « .

 » L’Angleterre, c’est un rêve. La Belgique, c’est bien aussi « 

La sérénité retrouvée a incité Adi à prolonger son contrat jusqu’en juin 2011.  » Mouscron est le premier club qui m’a réellement fait confiance et où j’ai pu m’épanouir « .

Certes. DembaBa avait, en même temps que Custovic, également prolongé son contrat (jusqu’en juin 2010), mais trois semaines plus tard, il partait à Hoffenheim.  » La différence avec moi, c’est que Demba est plus jeune. Je vais sur mes 30 ans. Je ne dis pas que ma chance est passée, car je me sens toujours bien physiquement et j’ai appris, la maturité aidant, à mieux doser mes efforts, mais plus les années passent, plus il me sera difficile d’obtenir un beau transfert. Après ma belle saison 2006-2007, j’avais pensé que les propositions afflueraient, mais je n’ai rien vu de très concret. J’ai toujours rêvé secrètement de la PremierLeague anglaise. J’aime la passion des Anglais pour le football. Et lorsque je vois que le public est capable de s’extasier lorsqu’un attaquant tacle un défenseur, je me dis parfois que je me régalerais là-bas. Si je dois terminer ma carrière à Mouscron, je ne m’en plaindrai toutefois pas. Ce n’est pas le top européen, mais je suis titulaire et ma femme est heureuse dans la Cité des Hurlus. La naissance de mon fils Allen (avec deux l, comme AllenIverson, le basketteur de NBA, et pas comme le footballeur AlenBoksic !), aujourd’hui âgé de 16 mois, m’a fait voir la vie d’un autre £il. A la maison, je peux penser à autre chose qu’au football. Je m’apprête à faire construire en Belgique. Après les années de galère que j’ai connues, que demander de plus ? ».

Parmi tous les entraîneurs qu’il a connus à l’Excel, certains l’ont-ils marqué plus que d’autres.  » Certains mettaient l’accent sur la technique, d’autres sur la tactique ou le physique. Certains utilisaient la vidéo, d’autres pas. Chaque entraîneur a ses méthodes, mais ce n’est pas pour cela que l’un est bon et l’autre mauvais. Mais le plus complet, c’était sans doute ArielJacobs. Un grand monsieur, sur le terrain comme en dehors. Il savait comment gérer le groupe. Au niveau de la communication, il n’avait pas son pareil « .

Et Enzo Scifo, où se situe-t-il ?  » Ah ! Enzo… C’est un personnage qui a bercé ma jeunesse. Lorsque je jouais avec les copains, je me prenais parfois pour Scifo. Aujourd’hui, il est en face de moi pour me donner des conseils. Je suis toujours admiratif devant lui. Il n’a rien perdu de sa technique. Lorsqu’il participe à un petit match à l’entraînement, on se dit qu’il ne déparerait pas dans notre équipe « .

Est-il pour autant un grand entraîneur ?  » L’avenir nous l’apprendra. Il vient à peine de débarquer. Mais on voit qu’il est passionné. Le football est en lui « .

par daniel devos- photos: belga

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