La classe

Ses atouts et comment faire mieux… si c’est possible ?

Depuis des années, la blonde Kim a convaincu tout le monde de son potentiel : elle pouvait briguer les premiers postes. Pour concrétiser ces prévisions, elle a dû accomplir un fameux chemin. Elle l’a fait à une vitesse étonnante. Elle n’a été freinée qu’à une reprise, par un problème à l’épaule et un changement d’entraîneur. En moins de cinq ans, la Limbourgeoise a bouleversé le paysage tennistique. Avec Justine Henin elle a créé un boom en tennis.

Le palais royal s’est empressé de la proclamer ambassadrice de notre pays mais la fille de Lei n’en a pas perdu le sommeil. Le succès ne l’a pas changée. Toujours souriante, spontanée et sociable, elle a conquis tous les c£urs. A 20 ans, Kim Clijsters devient la meilleure de sa discipline. Le monde est à ses pieds.

Son palmarès permet de mesurer l’ampleur de sa progression. Elle a effectué ses débuts professionnels en 1998 pour entrer dans le top-50 par la grande porte. A 16 ans, elle a atteint le quatrième tour à Wimbledon, où elle a pu se mesurer à son idole, Steffi Graf, et gagné son premier tournoi, à Luxembourg. Ce n’est pas donné à tout le monde. L’année suivante, elle a poursuivi sur son élan en remportant deux tournois et s’est implantée dans le top-20.

2001 a été une année d’exception, avec sa finale héroïque à Roland Garros, la victoire de la Belgique en Fed Cup et le top-cinq. Durant la fameuse année de confirmation, elle a affiché toute l’étendue de son talent mais aussi de sa volonté, bien nécessaire à cause de son épaule. Elle a prouvé qu’elle était insatiable. Elle a obtenu son titre le plus prestigieux en fin de saison, dans l’antre même de Serena Williams, devenant championne du monde à titre officieux. Alors même qu’on pense qu’elle ne peut faire mieux, voilà que Clijsters repousse encore ses limites et entame l’année 2003 sur les chapeaux de roues : cinq victoires en tournoi, une finale du Grand Chelem et la place de numéro un.

Une frappeuse bien dégrossie

Son tennis a évolué également, même si le perfectionnement de son jeu n’est pas aussi manifeste que celui de Henin. Il s’agit plutôt d’une progression par étapes qui s’appuie sur un jeu déjà très complet. Puissance, souplesse, toucher de balle, mentalité, physique sont les ingrédients de base pour émarger à l’élite. Clijsters les possède tous. Elle a simplement dû les retoucher. D’excellente frappeuse, elle est progressivement devenue une joueuse qui anticipe, qui réfléchit et qui dispose d’atouts incontestables. Son seul talent lui permet de dominer 80 % des joueuses de tennis. Ses fréquentes confrontations avec l’élite lui ont permis de progresser sur le plan tactique. Elle a pratiquement banni les violentes reprises de son jeu, au profit d’un tennis dûment pensé et usant. Elle change de rythme, exploite les coins du terrain, adresse des services millimétrés, gagne des points décisifs.

Elle a également introduit dans le milieu un jeu de jambes sublime. Les jambes bien plantées, elle a montré des actions jamais vues dans des matches féminins. A la récupération, elle allie explosivité et souplesse et c’est sans doute à cause d’elle que les Williams ont dû s’investir davantage dans leur carrière tennistique. Le jeu peu orthodoxe des Américaines ne suffisait plus. Les voilà obligées de réfléchir un peu, afin d’apporter plus de variété à leurs coups. Ça confère en tout cas plus de profondeur au tennis féminin et accroît son niveau.

Bien dans sa tête

Sa sérénité et son art de relativiser les choses constituent aussi un fil rouge dans sa carrière. Alors qu’on craignait le pire en apprenant qu’elle était touchée à l’épaule, le clan Clijsters ne s’est pas départi de son calme et a suivi les conseils des médecins. Son passage à vide de l’année dernière, sans doute mis en exergue par le départ de son entraîneur, Carl Maes, n’a pas provoqué de turbulences chez les Clijsters. Ils ont bâti une équipe, avec Marc Dehous et une kinésithérapeute, Eveline Coppens, pour travailler de la manière la plus professionnelle possible. Certains observateurs sont sans doute las d’entendre Kim relativiser chaque défaite. Elle donne parfois elle-même l’impression de manquer d’ambition mais cet état d’esprit lui permet en fait d’appréhender le circuit dans son contexte et de conserver son équilibre émotionnel.

Première mondiale à 20 ans, Kim Clijsters est toujours empreinte de la volonté de travailler et de s’améliorer. Si elle veut se maintenir devant la famille Williams, sans parler de Henin, qui a progressé à l’allure d’un TGV, elle devra continuer à progresser.

Prendre des risques au filet

Le jeu de la Limbourgeoise reste un rien trop monocorde. Elle n’a pas la finesse de sa concurrente rochefortoise. En d’autres termes, elle peut ajouter des accents à son bagage technique, aussi étoffé soit-il déjà. Sa blessure à l’épaule l’a empêchée d’améliorer son service l’année dernière. Entre-temps, il y a une nette amélioration mais elle devrait profiter de ses acquis pour rendre son service encore plus performant.

Elle a également une marge de progression au filet. Les Williams, Henin et même Jennifer Capriati ont compris que ces frappes constantes de l’arrière ne sont pas toujours rentables. Plonger d’un coup au filet permet de surprendre facilement une adversaire et marquer un point aussi facilement est toujours bienvenu. Clijsters a remporté cinq tournois en double cette année et y est première mondiale. Elle ne doit donc pas avoir peur de lancer plus souvent des attaques. Ses réflexes, son audace et sa touche de balle doivent lui permettre d’en retirer un profit maximum.

Améliorer son palmarès

Enfin, la vitrine de Kim mériterait de s’orner de quelques coupes de grands chelems. Elle a été à deux doigts de gagner un tel tournoi à plusieurs reprises, surtout cette année. D’aucuns y voient la crainte de l’échec, mais ça n’aurait rien de déshonorant pour une jeune fille de 20 ans… Selon le clan Clijsters, il s’agit tout simplement d’un manque de chance.

Pour se défaire de ces tensions, il n’y a qu’un remède : s’habituer à ces situations et tenter de renverser la tendance en profitant de l’expérience acquise. Elle doit, comme Justine l’a fait à Paris, se préparer plus spécifiquement en fonction de certains objectifs.

La quadruple Sportive de l’Année pourrait commencer par l’US Open. Elle raffole des surfaces dures et sa principale concurrente û Serena Williams û a, blessée, déjà fait une croix sur ce tournoi. Quant à Venus, elle a vu sa préparation compromise à cause de douleurs abdominales récurrentes et, des deux dames noires, elle semble la plus abordable. Justine Henin sera probablement la rivale la plus rude de l’amie de Lleyton Hewitt. Entre-temps, tout le monde sait quelle place du classement mondial la pupille de Carlos Rodriguez ambitionne.

Ne spéculons pas trop. Profitons du moment présent et de ce que Kim Clijsters a déjà réussi. Les problèmes des s£urs Williams n’enlèvent pas ses mérites. Clijsters joue selon les règles du jeu. Le classement ne ment jamais. Il constitue le reflet momentané de la réalité. Il n’est pas donné à tout le monde de porter, devant son nom, le numéro un d’un des sports les plus populaires et les plus exigeants au monde.

Outre les titres prestigieux des Grands Chelems, il y a aussi les Jeux Olympiques ou la Fed Cup. Compte tenu de la concurrence, il est peut-être aléatoire d’espérer une carrière comme celle de Steffi Graf. Pourtant, c’est une évidence : avec le potentiel dont elle dispose, Clijsters va dominer le tennis international au cours des prochaines années. Et sa principale concurrente sera une compatriote, le rêve belge se poursuivant. Nous préférons ne pas être réveillés.

L’analyse par Filip Dewulf

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