La bombe anti-Pavic de Claesen

L’histoire du Standard est riche de coaches charismatiques, inventifs, compétitifs : André Riou, Geza Kalocsay, René Hauss, Robert Waseige, Ernst Happel, Raymond Goethals, Tomislav Ivic, Michel Preud’homme, Laszlo Böloni, Dominique D’Onofrio, Mircea Rednic, etc. Un entraîneur, que je n’ai pas encore cité, a mille fois mérité son surnom. Le Professeur. Michel Pavic. Un homme de classe, le bâtisseur de la défense de fer (rouge) des années 60 – Jean Nicolay, Jacky Beurlet, Nicolas Dewalque, JeanThissen et Léon Jeck. Même si son premier séjour à Sclessin, de 1964 à 1968, fut plus fructueux que les deux autres (1985-1987, 1987-1988), il mérite une belle place dans le livre d’histoire du Standard. En octobre 1985, en plein après-Standard-Waterschei, NicoClaesen (ex-Seraing, Stuttgart), nous reçut chez lui, à Eisden, mon confrère Ben Herremans et moi (photo). L’international attaqua Pavic avec une violence comme on n’en voit pas tous les jours. Pour lui, le Professeur était dépassé, à côté de ses pompes, etc. Le reportage de notre magazine eut l’effet d’une bombe. Nico fut viré sur-le-champ et transféré à Tottenham.

Quelques jours plus tard, Pavic m’invita chez lui, dans le centre de Liège, en compagne de deux journalistes de la DH/ Les Sports, Raymond Arets et Jef Hofmann. Sa compagne avait préparé un succulent dîner. Pavic savait recevoir et à un moment, il affirma : – Je ne sais pas qui a écrit cet article. J’ai lu son étonnement dans sa voix et ses yeux après ma réponse : – Ah, bon, c’est toi. Il y eut blanc vite oublié car Pavic était un seigneur qui comprenait les impératifs de notre métier et Arets détourna diplomatiquement la conversation vers d’autres horizons. Par la suite, j’ai régulièrement interviewé Pavic pour retracer la grande histoire de Sclessin. Personne ne parlait aussi bien que lui de Roger Claessen qui, dans les nuits liégeoises, lui a offert ses premiers cheveux blancs.

Une rencontre reste plus profondément gravée que les autres dans ma mémoire. Au début des années 90, je lui ai rendu visite dans sa ville natale, Valjevo, à 90 km de Belgrade. Là, il m’a parlé des siens, de son passé de résistant (prisonnier en Allemagne durant la Deuxième Guerre) avant de nous attarder dans le meilleur restaurant de la région. Valjevo est réputé pour ses monastères orthodoxes sertis dans des décors accidentés. Pavic m’emmena à la découverte d’un de ces lieux où régnait un calme impressionnant, une sérénité propice à la méditation. J’y ai acheté un cierge que j’ai conservé en souvenir d’un entraîneur pas comme les autres, décédé en 2005, à 83 ans, le Professeur.

PAR PIERRE BILIC

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