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 » L’équipe passe avant moi « 

Le départ d’Alejandro Pozuelo a permis à Bryan Heynen de s’imposer dans l’entrejeu de Genk, seize ans après son affiliation.

Ça n’a échappé à personne : Bryan Heynen a été un des meilleurs lors du bras de fer contre le Club Bruges alors qu’on craignait qu’il ne soit pas assez solide physiquement et mentalement pour notre championnat. L’intéressé n’est pas surpris :  » Juste avant ma déchirure des ligaments croisés il y a un an et demi, j’ai réalisé que j’avais le niveau. Suite à la blessure de Sander Berge, Albert Stuivenberg m’avait offert ma chance et je ne l’avais pas déçu. Le coach et Dimitri de Condé m’ont soutenu pendant ma revalidation. En fait, celle-ci m’a permis de renforcer mon corps. Quand on joue chaque week-end, il est impossible d’aller dans le rouge tous les jours au fitness, comme je l’ai fait pendant ma rééducation. J’ai tout mis en oeuvre pour revenir plus fort.

J’ai pris de la puissance et je joue avec plus de confiance. Ma blessure m’a fait comprendre que ma carrière pouvait connaître une fin abrupte et que je devais prendre soin de mon corps. Je fais des exercices de prévention tous les jours. Bram Swinnen et Philippe Clement mettent davantage l’accent sur la force. J’ai gagné neuf kilos de muscles mais c’est surtout sur le plan mental que j’ai changé. Les critiques ne me blessent plus. Elles sont peut-être justifiées mais je sais que je peux me bonifier.  »

Il se sent plus apprécié.  » L’équipe a changé de regard sur moi. Je suis devenu plus important sans doute parce que j’ai été utile les derniers matches. En début de saison, je faisais souvent banquette et je trouvais ça parfois injuste mais j’ai continué à travaillé en attendant ma chance. Avant ma blessure, le staff m’avait fait remarquer que je donnais l’impression d’être d’accord de ne pas jouer. J’en ai évidemment envie mais l’équipe passe avant moi et je réfléchis avant de parler, pour ne froisser personne, mais désormais, j’exprime mon opinion.

Il m’arrive même de jurer mais pour motiver les autres, pas pour les démolir. J’essaie de traiter les autres comme je souhaite qu’on me traite. Je ne tacle que quand c’est nécessaire et que je pense pouvoir toucher le ballon, par exemple, même si je commets aussi des fautes professionnelles.  »

 » Je n’ai jamais nourri d’ambitions élevées  »

Heynen a commencé à jouer au FC Opitter, où son père entraînait les jeunes. Puis, un été, il a suivi un stage linguistique : football le matin, français l’après-midi. Genk l’a engagé.  » J’ai connu des moments difficiles en U14 et en U15. En U16, quatre équipiers ont obtenu un contrat et se sont entraînés avec les espoirs mais ça ne m’a pas désarçonné. J’aimais jouer et j’ai fait de mon mieux en U17, sous la direction de Dimitri de Condé. Il m’a nommé capitaine et, à 17 ans, j’ai obtenu un contrat de jeune. Après une saison en U19, j’ai été surpris d’intégrer l’équipe première.  »

Dans le noyau A, il a été confronté à Peter Maes, qui n’est pas des plus tendres.  » Il m’a effrayé au début mais je n’ai pas craqué. En fait, je lui suis reconnaissant de m’avoir permis d’effectuer mes débuts et ses méthodes m’ont sans doute endurci. Je ne me laisse pas désarçonner quand on crie sur moi.  »

Il est maintenant international espoir et en juin, il va participer à l’EURO U21 en Italie et on lui prédit un avenir de Diable Rouge. Bryan Heynen ne se laisse pas monter la tête.  » Commençons par réussir quelque chose de beau ici, dans les prochaines semaines. Je n’ai jamais nourri d’ambitions élevées. Je suis réaliste. Bien sûr, gamin, en voyant l’équipe première, je me disais que ça devait être fantastique de jouer devant un tel public. D’ailleurs, les entraîneurs de la Jos Vaessen Talent Academy nous le répétaient : l’objectif était de nous faire jouer de l’autre côté de la rue, un jour. C’était un rêve mais je vivais au jour le jour.

Quand un autre était meilleur que moi, j’y puisais une motivation supplémentaire. Je continue à apprendre, à l’entraînement et en suivant la Ligue des Champions. Je n’ai que 22 ans, je ne suis encore nulle part. En catégories d’âge, j’ai côtoyé d’excellents joueurs qui évoluent maintenant dans les divisions inférieures. J’ai suivi le chemin inverse : beaucoup de gens pensaient que je ne réussirais pas mais je suis resté sur le droit chemin, tranquillement, sans me faire remarquer.  »

 » Mon grand-père serait terriblement fier de moi  »

Au fond, pourquoi a-t-il réussi ?  » Selon moi, ça tient à la personnalité du joueur et à son entourage. On ne m’a jamais poussé. Mon agent, Marcos Pereira, est un conseiller, un ami. Certains sont partis à l’étranger mais j’ai toujours voulu éclater ici. Plus jeune, je manquais de force, de vitesse, de mobilité. Je jouais tout le temps au même rythme. J’ai mûri sur le tard et je manquais d’assurance. Certains ont pourtant toujours cru en moi, comme Michel Ribeiro, qui a été notre coach technique pendant dix ans.

Il s’est démené pour que je puisse rester et je lui dois une grande partie de mon bagage technique. Mon père a joué un rôle important aussi. Combien de fois n’avons-nous pas joué dans le jardin jusqu’à la nuit tombée… Souvent, on jouait avec un ballon de volley, plus mou pour le jeu de tête et aussi pour ne pas faire trop de dégâts chez les voisins quand il nous échappait. Ces beaux souvenirs ont fait de moi ce que je suis.  »

Il a connu des moments difficiles en dehors du football aussi. Son grand-père s’est suicidé il y a dix ans et il y a cinq ans, ses parents se sont séparés.  » Mon grand-père… Nul ne sait ce qui l’a poussé à se tuer car il n’a rien dit. On ne parle pas beaucoup dans notre famille. Il adorait le football et était mon premier supporter. Il me conduisait à l’entraînement les semaines où mon père était assigné à la tranche de nuit chez Ford. Il serait terriblement fier de moi maintenant. Le divorce de mes parents a également été très dur. Il m’a fallu du temps pour l’accepter mais maintenant, ils sont heureux et moi, je vis avec mon amie depuis bientôt un an et tout se passe bien. Leen est un énorme soutien pour moi.  »

 » J’ai changé  »

Bryan Heynen a grandi mais a aussi changé de style grâce à Philippe Clement.  » Il veut que les deux médians défensifs se présentent dans le rectangle. Avant, j’étais un six classique, qui distribuait le jeu devant la défense. J’exerce maintenant ma finition.  » Heynen est un huit, capable de joueur au six et au dix s’il le faut.  » Un box-to-box. J’aime voir le jeu mais je m’adapte. Alors que tout transitait par Alejandro Pozuelo, le danger doit maintenant survenir de partout. Les trois médians peuvent en fait occuper tous les postes de l’entrejeu, en fonction des plans de l’entraîneur.  »

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