L’effet Mathijssen

Le Sporting a repris les entraînements avec une certaine sérénité. L’arrivée de Mathijssen n’y est pas étrangère…

Le printemps s’est installé. Après un très, très long hiver. Et le sourire de revenir sur les visages carolos parce que la lente agonie du Sporting local a été enrayée. Par la grâce d’un retour. Celui du Limbourgeois, fils de mineur, et si à l’aise dans cette autre région qui chercha dans la houille son salut et qui y noya sa détresse à la fermeture des mines dans les années 50 et 60.

Jacky Mathijssen, l’entraîneur qui arracha deux cinquièmes places en trois ans, lui qui flirta avec l’Europe et qui avait placé les Zèbres sur la carte footballistique de la Belgique, est de retour. En sauveur à l’image à peine écornée par ses échecs cuisants à Lokeren (trois mois en place) et relatifs à Bruges (deux troisièmes places, son successeur n’ayant pas réussi à faire mieux).

 » Le Sporting vivotait depuis son départ « , explique l’ancien capitaine Frank Defays, aujourd’hui consultant auprès de l’agent de joueurs Didier Frenay.  » Pour moi, c’est le choix parfait. Quand j’ai quitté le club il y a un an, j’avais discuté avec le président et je lui avais glissé le nom de Jacky comme entraîneur mais à ce moment-là, il n’était pas encore prêt. Mathijssen connaît la maison et la musique. On ne doit pas lui apprendre à gérer un club. Son retour va également ramener de la sérénité. Même si ce choix est, selon Mogi Bayat, strictement sportif, cela va rassurer l’extra-sportif, que ce soit les supporters ou les sponsors.  »

Depuis l’annonce du nouvel entraîneur, les critiques se sont tues. Une forme d’état de grâce. Même au sein des factions les plus critiques.  » Alléluia ! « , clame Sébastien Mascitelli, porte-parole des Storm Ultras, en guerre ouverte avec la direction depuis plus d’un an.  » On était parmi ceux qui réclamaient le plus son retour. Mathijssen reste l’entraîneur qui a obtenu le meilleur rendement. Il peut insuffler un mental de vainqueur à ce groupe. Nous sommes également heureux de voir que la direction a pris la mesure de nos revendications et cela démontre que la mobilisation n’a pas servi à rien.  »

A la reprise des entraînements (après quatre jours de tests physiques, les Zèbres ont retrouvé le terrain ce lundi), les supporters sont donc satisfaits.  » Jacky, c’est mon ami. C’est la phrase qui résume le mieux notre pensée « , ajoute Eric Herbinia, membre fondateur des Zèbres-Unis.  » Il n’y avait pas grand monde sur le marché et il s’agissait clairement du meilleur candidat possible. Il a la carrure pour faire tourner une équipe et il dégage un certain charisme. Ici, personne ne l’a oublié et lui, ne nous a pas oubliés. Récemment, on s’est croisé lors d’un match de volley des Dauphines de Charleroi, lors duquel il supportait l’équipe adverse. Il nous a tout de suite reconnus et nous a abordés comme si on s’était quitté la veille.  »

Le retour de Mathijssen a également remis Charleroi dans le coup. Le club redevient honorable et certains joueurs manifestent leur désir de travailler avec Mathijssen. Cela devrait naturellement faciliter les transferts.

Changement de cap des Bayat

L’arrivée de Mathijssen dénote donc un changement d’attitude. D’abord de la part du président Abbas Bayat. Déçu de ses derniers entraîneurs, il a écouté le lobbying mené par son neveu favorable à un retour du coach à succès. Or, jusqu’il y a peu, Abbas avait toujours dit que Mathijssen ne reviendrait pas au club. Il y a trois ans, le coach avait annoncé qu’il partait à Bruges et Bayat, l’ayant très mal accepté, l’avait viré illico presto à trois matches de la fin du championnat. Les déclarations incendiaires tenues par les deux camps dans les médias n’avaient fait qu’attiser le feu par la suite.

 » Quand on se quitte, c’est qu’il y a une raison. Revenir en arrière ne fait pas avancer un club « , nous avait un jour affirmé Abbas. Cette remarque valait autant pour Enzo Scifo que pour Mathijssen. Cette marche arrière montre premièrement que le président de Charleroi a pris conscience de la valeur du travail réalisé par Mathijssen lors de son premier passage et deuxièmement que les dissensions sont digérées. Cependant, en cas d’échec, Abbas ne fera sans doute pas de cadeaux. Ni à Mathijssen, ni à son neveu, principale caution de ce retour.

 » La personne qui prend le plus de risques, c’est Jacky « , dit Defays.  » Un retour dans un club n’est jamais évident. Il faut oser et cela prouve sa motivation. Même si je suppose qu’il a reçu certaines garanties. « 

Changement d’attitude également dans le chef de l’ensemble des dirigeants. Aujourd’hui, dans le recrutement, on parle de joueurs expérimentés.  » Si on retrace le parcours du club ces dernières saisons, on remarque que l’année où on a réalisé les meilleurs résultats coïncide avec celle où on avait la plus forte moyenne d’âge « , résume Defays.  » Si on veut exploiter le talent des jeunes comme Grégory Lazitch, Hervé Kage ou Pietro Perdichizzi, il faut l’entourer par de l’expérience et de l’intelligence de jeu. Je pense que le club l’a compris.  »

Cela ne s’est pas encore traduit en actes. Que du contraire, puisque Badou Kere et Majid Oulmers n’ont pas été reconduits et que les transferts réalisés portent encore le sceau de jeunes promesses. Mais le Sporting en prend le chemin puisque les noms de Gregory Dufer et de Christophe Grégoire ont circulé. De plus, certains profils de joueurs ont été écartés. La mentalité est désormais prise en compte.  » Cela veut dire qu’Abbas Bayat s’est remis en question et rien que cela est exceptionnel « , ironise Mascitelli.

Changement enfin dans la politique générale, davantage tournée vers la sérénité. En guerre avec une partie des supporters, la direction cherche des solutions.  » On voit qu’ils font des efforts « , admet Mascitelli.  » A la demande de la direction, nous avons été conviés à des réunions. Elle a compris notre message. On ne voulait pas que le Sporting joue le titre chaque saison mais dispose de joueurs qui se distinguent par leur volonté, le respect du métier et l’amour du maillot. Ces réunions rentrent davantage dans notre philosophie de supporters qui consiste à participer à la vie du club. Il y a donc un effort de communication et cela évolue dans le bon sens. « l

par stéphane vande velde

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