L’avenir du club

L’ancien international n’a disputé que cinq rencontres : il veut sa revanche avant d’être prêté.

On l’aurait presque oublié et pourtant, trois ans après avoir constitué le feuilleton de l’été par son transfert ; deux ans après s’être occasionné une grave blessure (déchirure des ligaments croisés du genou), il est toujours là. Toujours à Anderlecht où il ne sait plus s’il est international, deuxième ou troisième gardien. Dimanche, face à la Gantoise, lors de la finale de la Coupe, Silvio Proto pourra prendre sa revanche, en remportant un nouveau trophée, lui qui n’a disputé que cinq rencontres cette saison (toutes en Coupe de Belgique). A bientôt 25 ans (il les fêtera le 23 mai), l’ancien gardien des Diables Rouges, ex-future grande star belge, perd son temps. Cette finale sera peut-être son dernier match sous le maillot mauve avant un prêt désiré par ses dirigeants.

Vous serez dans les buts, dimanche, pour la finale de la Coupe ?

J’espère que je vais la jouer mais je n’ai reçu aucune garantie. Il s’agit d’un match à enjeu. Tout le monde veut y être.

Il ne s’agira que de votre sixième rencontre de l’année…

Oui, c’est vrai.

Si. Evidemment.

Pourquoi rester à Anderlecht alors ?

Car je sais que j’ai les qualités pour Anderlecht. Je pourrais partir dans un autre club pour retrouver du temps de jeu mais je ne vois pas ce que j’ai à y gagner.

Tout simplement car vous perdez votre temps ici…

Non, je continue à progresser. Mon niveau est élevé et contrairement à ce que tout le monde pense, je ne suis ni dans le trou, ni dans le doute. Parfois, mieux vaut être deuxième gardien à Anderlecht que premier dans un autre club.

Mais vous n’êtes pas venu ici pour être deuxième gardien ?

Attention ! Je ne suis pas content de mon statut. Je ne suis pas un deuxième gardien.

On parle de deuxième gardien mais depuis les bonnes prestations de Davy Schollen, n’avez-vous pas l’impression d’être encore descendu dans la hiérarchie ?

Non. Que cela soit clair. Je suis maximum deuxième gardien. Davy a joué car j’étais blessé. Sinon le coach m’aurait choisi. Je ne suis pas descendu. Que du contraire quand j’entends comment la direction et l’entraîneur me parlent.

C’est-à-dire ?

Ils me disent que je suis l’avenir du club. On ne dit pas à cela à un troisième gardien sur lequel on ne compte pas vraiment.

Pourtant, le président Roger Vanden Stock a déclaré la semaine passée que si vous constituiez bien l’avenir, il comptait vous prêter la saison prochaine…

Oui, je l’ai lu.

Ce n’est pas un signe de confiance, cela ?

C’est vrai que si le club veut me prêter, c’est qu’il ne compte pas sur moi à court terme. Si on veut le faire, je devrai m’y résigner.

Vous vous attendiez à de tels propos ?

Oui. Herman Van Holsbeeck m’avait tenu le même discours. Cependant, mon sort est encore flou. Dans ma tête, je me focalise sur la Coupe et puis on verra.

Si vous êtes réfractaire à un prêt, c’est parce que vous considérez cela comme un pas en arrière ?

Ce n’est pas de l’orgueil mais si c’est un club en Belgique, c’est clair que c’est un pas en arrière.

C’est pour cette raison que vous avez décliné l’offre carolo en son temps ?

Finalement, cela aurait pu être une bonne chose. Mais je ne compte pas aller n’importe où. Je préférerais un club qui joue la tête mais ils ont tous des bons gardiens.

Pas le Standard ?

Mais je ne crois pas que cette option soit envisageable.

Les réussites des prêts de Pär Zetterberg, de Roland Lamah et de Cheik Tioté ne vous font pas réfléchir ?

La situation n’est pas la même. Moi, j’ai déjà joué à Anderlecht ! A choisir, je préférerais être prêté à l’étranger car le niveau est plus élevé. J’aurais l’impression de ne pas faire de pas en arrière.

 » Je n’ai retrouvé mon niveau que cette saison « 

Jusqu’il y a peu, l’ambiance était très bonne entre les trois gardiens…

C’est pas facile de vivre à trois. Mais on sait qu’il n’y a qu’une place et on s’est fait à cette idée. Tiens, pourquoi avez-vous dit jusqu’il y a peu ?

Car, on sent une plus grande nervosité. Schollen a expliqué par voie de presse qu’il aspirait à un meilleur statut et Daniel Zitka a répondu en mettant les choses au point…

Ouais ( il sourit). On est pourtant obligé de se soumettre à notre sort. Les déclarations dans la presse ne changent rien. Moi, non plus, je ne suis pas content d’être deuxième gardien. A moi de travailler tant et plus.

Cette saison, la hiérarchie a été respectée, Zitka reprenant sa place après sa blessure. Pas frustré que cela ne se soit pas passé comme cela la saison passée ?

Si mais ma blessure était plus longue et Daniel avait réalisé de bons matches dans l’intervalle. L’entraîneur avait dû faire un choix et depuis lors, je n’ai plus reçu la chance d’être titulaire.

Vous en voulez à Frankie Vercauteren ?

Non. J’avais de bons rapports avec lui. Avec le recul, je savais aussi bien que lui que je devais retrouver mon niveau. Or, je ne l’ai retrouvé que cette saison. J’espérais, en début de championnat, être mis sur un pied d’égalité avec Zitka. Ce ne fut pas le cas. Or, s’il part toujours avec une longueur d’avance, comment voulez-vous que je le rattrape ?

Vous avez demandé des explications à Vercauteren ?

Non. J’avais les réponses. On ne met pas sur le banc quelqu’un qui vient d’être élu gardien de l’année.

 » Si Anderlecht est en finale, c’est un peu grâce à moi « 

Ce n’est pas difficile d’être passé du statut d’international à celui de deuxième gardien ?

Si, c’est difficile de passer de tout à rien mais c’est la vie. Un jour, on côtoie les sommets et le lendemain, on n’est plus rien.

Vous n’avez plus que les matches de Coupe pour vous montrer…

Oui mais je ne prends pas cela comme une pression supplémentaire, plutôt comme une chance. Il vaut mieux pouvoir se montrer sur six matches que rester sur le banc.

De votre campagne en Coupe, on ne retiendra malheureusement que le but encaissé contre le Germinal Beerschot…

Là, vous êtes négatifs. Ce n’est pas ce que les gens me disent. J’ai quand même sauvé deux ballons et on ne peut toujours pas prétendre que le ballon est bien rentré dans le but.

Vous prenez cela avec philosophie mais sur le coup, on avait l’impression que le ciel vous était tombé sur la tête…

C’est vrai que je n’ai pas beaucoup de matches pour me montrer. OK, j’ai fait une erreur et je l’assume. J’ai relevé la tête même si je sais pertinemment qu’il ne s’agissait pas du bon moment pour commettre une bourde. Mais tu ne sais pas revenir en arrière. Anderlecht est quand même en finale et c’est un peu grâce à moi aussi.

Jouer la finale constituerait une revanche sur celle que vous n’aviez pas disputée avec La Louvière en 2003 ?

Oui. Il s’agissait d’une grosse déception mais je venais d’être blessé aux quadriceps et Jan Van Steenberghe avait réalisé une bonne saison. J’avais disputé les deux derniers matches de championnat et je savais que Jan serait aligné en finale. Si je ne joue pas dimanche, il s’agira d’une plus grosse déception.

Vous ne considérez pas vraiment la Coupe de 2003 comme la vôtre ?

Si, j’avais joué d’autres matches mais ce n’est pas la même chose que quand tu la gagnes toi-même, en étant sur le terrain. Dans le même ordre d’idées, le titre d’Anderlecht, la saison passée, n’est pas vraiment mon titre.

 » On peut sauver notre saison « 

Cette finale, Anderlecht la prend-il comme un lot de consolation ?

Quand on regarde notre saison, on peut avoir des regrets. On revient de loin. On finit vraiment en force. A la trêve, tout le monde s’est dit que cela allait être une année noire. Maintenant, en terminant deuxième et en remportant la Coupe, on peut sauver notre saison.

Pourtant…

(Il coupe) Aucune année ne peut être considérée comme bonne pour Anderlecht quand on n’est pas champion.

Comment expliquez-vous votre premier tour médiocre ?

Toute équipe connaît un creux dans une saison mais notre creux fut profond. Et puis les arrivées de janvier ont fait du bien. Elles ont beaucoup apporté.

Est-ce que cela signifie qu’avec le groupe du premier tour, vous n’auriez pas réalisé ce deuxième tour excellent ?

Non car il y avait déjà assez de qualités dans le noyau. Il fallait ajouter un peu de fraîcheur.

Au premier tour, Anderlecht n’allait pas bien mais Proto est resté sur le banc. Ce n’était pas frustrant ?

On se dit qu’on va peut-être recevoir sa chance. J’ai pensé la même chose à l’arrivée d’Ariel Jacobs. On se dit – Que faut-il pour que je sois aligné ? Mais d’un autre côté, Zitka n’avait rien à se reprocher.

Autant on vous sent ambitieux, autant vous paraissez serein. Est-ce dû à votre bonheur familial ?

C’est sûr. Sur le plan familial, j’ai vécu des supers moments ces deux dernières années. Mon fils Kenzo est né et grâce à cela, le fait que je ne joue pas est passé quasiment inaperçu. Je me dis – Ok, je ne joue pas dans mon boulot mais je suis heureux chez moi. Etre bien en famille est sans doute la chose la plus importante.

par stéphane vande velde – photos: reporters

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