L’autre Ruiz

Le club campinois a le flair pour dénicher de bons attaquants inconnus. Le Colombien est la dernière trouvaille en date.

Le Colombien JaimeRuiz est la dernière trouvaille en date dans la longue liste des attaquants inconnus qui se révèlent à Westerlo. Trouvaille est bien le mot qui convient, car il fallait bien chercher pour dénicher cette perle rare parmi les clubs qu’il a fréquentés et dont la réputation, il faut bien l’avouer, n’a pas vraiment franchi l’Atlantique. Carlos Sàrmiento, Quindío, Cortulua, Deportivo Pasto, Aucas et Alianza Atletico, cela vous dit quelque chose ? Laissons au joueur le soin de conter lui-même son histoire…

 » Carlos Sarmiento, c’est le nom d’une école de football à Cali, ma ville natale. Je m’y suis inscrit vers neuf ans. Ma mère a consenti un gros sacrifice en m’offrant une paire de chaussures pour assouvir ma passion. Elle n’imaginait pas encore que ce pouvait être un investissement en vue d’une vie meilleure. Le football, à cet âge-là, n’était encore qu’un plaisir pour moi. Je ne pensais pas encore à une future carrière pro. Carlos Sarmiento aligne aussi une équipe en D2 colombienne. De là, j’ai été transféré à Quindío, un petit club de division inférieure, puis à Cortulua, un club de D1 où j’ai peu joué la première saison et qui est descendu. Je suis malgré tout resté, et en D2, j’ai eu davantage droit au chapitre. Je suis alors parti au Deportivo Pasto avec lequel j’ai été champion. Si, si, en D1 ! Pasto est une ville du sud-ouest de la Colombie, située à 2.800 mètres d’altitude. Les équipes adverses n’aimaient pas trop venir jouer là-bas. Elles s’essoufflaient rapidement, et cela nous a sans doute aidés. Aucas, c’est un club de Quito, en Equateur. Egalement en altitude, donc. Alianza Atlético – à ne pas confondre avec Alianza Lima qui est beaucoup plus connu – est un club péruvien de milieu de tableau, situé au nord du pays dans une ville appelée Piura. « 

Un microclimat en Campine ?

C’est là que FrankDauwen, l’un des assistants de JanCeulemans, l’a découvert. Un peu par hasard, car il était en réalité venu visionner JohanSotil, le milieu de terrain péruvien qu’il a également ramené dans ses bagages. Comme il avait un peu de temps avant de reprendre l’avion, il s’est rendu à un autre match. Ruiz n’a joué que 60 minutes, mais ce fut assez pour convaincre Dauwen que le garçon avait du talent.

Voilà donc Ruiz qui, à 25 ans, débarque pour la première fois en Europe :  » Ma première surprise, ce fut le froid. Enfin, plutôt la pluie, car c’était l’été lorsque j’ai débarqué. Mais un été qui n’en avait que le nom, je n’avais jamais connu cela en Colombie. Et j’étais encore loin d’imaginer ce qui m’attendait. L’hiver fut terrible. Ce fut, paraît-il, l’un des plus rigoureux qu’ait connus la Belgique. Mais au bout du compte, je ne regrette rien. Au contraire. J’ai mis un pied en Europe, et vous savez ce que cela représente pour un Sud-Américain. En plus, la saison s’est très bien passée. A une journée de la fin, je suis toujours en lutte pour le titre de meilleur buteur. Et ce, malgré une petite polémique. L’un de mes buts, inscrit contre La Gantoise, a été considéré comme un auto-but de JonasDeRoeck. J’ai toujours le sentiment d’avoir marqué, mais je ne vais pas en faire une affaire d’Etat.  » Pourtant, un titre de meilleur buteur pourrait lui ouvrir des portes.  » Oui, c’est clair. Westerlo peut constituer un tremplin. Mais je suis encore sous contrat jusqu’en 2011, et si je dois rester une ou deux saisons supplémentaires, je n’y verrais aucun inconvénient car je me plais ici.  »

Ruiz admet qu’il effectuait un pas dans l’inconnu en optant pour la Belgique :  » Je ne connaissais rien de la Ligue Jupiler, et encore moins de Westerlo. Mais la tentation était trop grande de franchir l’Atlantique ; je n’y ai pas résisté. Au début, j’ai rencontré certaines difficultés. Mais, grâce à l’aide de mes compagnons, de l’entraîneur et de tous les gens du club, je me suis rapidement senti à l’aise, bien que le football soit assez différent : il y a beaucoup de duels, la puissance physique est souvent déterminante et on court beaucoup, alors qu’en Amérique du Sud, c’est surtout le ballon qui circule. J’ai découvert que DanielCruz, du Germinal Beerschot, était également originaire de Cali mais d’un autre quartier. On s’appelle de temps en temps, car pour converser avec d’autres joueurs, la barrière de la langue constitue encore un obstacle. J’ai appris que Ceulemans avait été l’un des plus grands joueurs belges de tous les temps. Pour être franc, je ne le connaissais pas. Mais j’ai découvert un excellent entraîneur et aussi une personne très humaine. Recevoir des conseils d’un homme aussi expérimenté est toujours utile. J’essaie d’en retirer le maximum. Les joueurs qui m’ont impressionné dans le championnat de Belgique ? DieumerciMbokani, MbarkBoussoufa et mon homonyme BryanRuiz. Ce sont des joueurs capables de faire la différence.  »

Jaime Ruiz, l’une des révélations du championnat, n’a pas toujours été aussi prolifique devant le but.  » J’ai eu de bons et de moins bons moments durant ma carrière. Chez un attaquant, la confiance joue un rôle primordial. Pour l’instant, je suis en confiance et j’ose davantage. Je dois aussi ma réussite à mes partenaires, qui m’adressent de très bons services. Au Pérou aussi, j’avais débuté de façon laborieuse avant de tout réussir par la suite. « 

Chaque année, Westerlo déniche un attaquant qui se révèle dans notre championnat.  » On m’avait parlé de ce phénomène lors des premiers contacts, et cela a aussi influencé ma décision. Je me suis dit : pourquoi ne pourrais-je pas être le prochain ?  » Curieusement, beaucoup d’attaquants semblent perdre leur sens du but lorsqu’ils quittent Westerlo. Y aurait-il un microclimat en Campine ?  » Je ne sais pas. Mais pour un attaquant, c’est souvent une question de moment. Il faut mettre à profit les périodes de forme, car elles sont éphémères. Et, lorsqu’on retombe dans le creux, on doit travailler pour retrouver la forme. « 

International chez les jeunes

Ruiz n’a encore évolué que dans des équipes moyennes.  » Je n’ai, en effet, pas encore eu la chance d’évoluer dans un grand club. Cela viendra peut-être un jour, qui sait ? « 

Son idole est FaustoAsprilla.  » Il était attaquant, comme moi, et je me suis beaucoup inspiré de lui. Il avait le sens du but, a secoué les filets tant à Newcastle qu’à Parme. Par un concours de circonstances, je l’ai côtoyé à Cortulua. J’étais encore jeune, il était en fin de carrière. Il m’a beaucoup parlé, m’a conseillé. Les récits de ses aventures européennes me fascinaient. Il a donné une bonne image de la Colombie sur le Vieux Continent,… footballistiquement s’entend.  »

S’il devait choisir entre Newcastle et Parme, Ruiz n’hésiterait pas.  » Newcastle ! Le football anglais est sans doute le meilleur d’Europe. Mais pour y accéder, il faut être international dans son pays. Et je ne le suis pas encore. J’ai disputé un match amical en Corée, mais cela n’a pas été plus loin. Je n’ai pas encore de match officiel à mon actif. En revanche, j’ai fait partie des sélections nationales de jeunes, jusqu’en -20 ans. J’ai même été le deuxième buteur des éliminatoires sud-américaines pour le Championnat du Monde 2003. On s’est qualifié pour la phase finale, et je fus du voyage aux Emirats Arabes Unis, mais une pubalgie m’a écarté des terrains. « 

L’Espagne, comme chez tous les Sud-Américains, constitue aussi un objectif :  » On est naturellement attirés par ce pays en raison de la langue, commune à la nôtre. Mais il faut reconnaître que très peu de Colombiens réussissent à jouer dans la Liga. Et ceux qui y parviennent sont des défenseurs, comme LuisPerea à l’Atletico Madrid et AquivaldoMosquera au FC Séville.  »

par daniel devos

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