L’aura grosse comme ça

Le bon mot de la semaine, celui qu’on aurait soi-même aimé trouver, est pour Jean Derycke qui, dans Vers l’Avenir, titre qu’avec Robert Waseige,  » Charleroi passe à Mage 3 « …

Les Zèbres joueront demain plus vite que le son ! Enfin, on l’espère. Car mise à part la grosse personnalité de celui qui débarque au Sporting, ce n’est jamais qu’un épidémique remplacement automnal d’entraîneur. C’est l’éternelle conviction que les joueurs engagés sont meilleurs que ce qu’ils montrent, et qu’un autre coach doit pouvoir faire mieux avec le même noyau : c’est la énième histoire d’une direction qui remplace son coach principal pour manque de résultats, sauf que le limogé d’ici ne s’appellera pas  » limogé  » puisqu’il est content de l’être et qu’il est recasé. Le premier à limoger de la saison en prend toujours pour son grade, c’est la règle du jeu et c’est Dominique Leone qui s’y est collé en 2003 suivi par Eddy Wauters de l’Antwerp. Place maintenant à la banalisation : entre chatouillement et choc psychologique, pour peu que Waseige, Sergio Brio ou Doy Perazic améliorent l’ordinaire de leurs troupes ces prochaines semaines, d’autres menacés vont se sentir portés par l’effet boule de neige : et les défenestrations de Peter Balette ou Paul Put passeront inaperçues…

Deux choses me sautent aux yeux : Waseige est virusé du foot jusqu’à la moelle, et il aime les défis ! Je me disais qu’à 64 ans, avec son palmarès, son pontage, son petit compte en banque et sa grande  » footosophie « , les chances étaient fortes qu’il hume désormais l’air du temps, vive heureux à Rocourt en attendant la mort, dévorant des livres de la grande Histoire, et racontant des petites histoires à ses petits-enfants…

Certes, une ultime expérience exotique hors frontières, histoire de voir d’autres soleils tout en vérifiant peinard, une dernière fois, la vanité des choses du foot, j’aurais pu comprendre ! Mais le plongeon dans le chaudron carolo, là, ça me coupe à la fois le souffle et le sifflet : virus, passion, muscle cardiaque, j’ai tout sous-estimé, Robert est encore vert ! Au point d’expérimenter une nouvelle facette de la profession puisque  » successeur de limogé  » est un job nouveau pour lui !

Sacré défi, les défis véritables étant ceux où l’on a plus à perdre qu’à gagner : l’image du Sporting est plutôt foutoir, tout le monde trouvera normal que Robert l’Ordonné sache y mettre bon ordre… et s’étonnera de son impuissance dans le cas contraire ! J’entends dire que Waseige débarque au Sporting avec une aura grosse comme ça, et que c’est un fameux atout : n’empêche qu’à Sclessin, l’aura grosse comme ça n’a rien empêché du tout.

Je viens aussi de lire l’avis d’un supporter carolo, estimant qu’il aurait mieux valu consacrer ce budget Waseige à l’achat d’un  » véritable attaquant « . Cela a le double mérite de rappeler que le coach n’est pas gratos et qu’il n’est qu’un maillon du bazar… mais l’opinion n’est recevable que si le salaire de Waseige avoisine celui de Pauleta !

Sinon, au départ et en principe, de Stéphane Biakolo à Amidjan Traore en passant par Alex Kolotilko, Eduardo ou Alex Di Gregorio, il s’est toujours agi de  » véritables  » attaquants : c’est seulement le fiasco collectif qui rend  » muet  » l’attaquant qu’on disait véritable. Un buteur dépend de son environnement pour buter, l’attaquant garanti prolifique sur facture est presque une vue de l’esprit…

Pourquoi presque ? Je vous l’expose en conclusion : parce qu’il me semble que, dans toutes les petites divisions, louvoient quelques buteurs garantis sur facture : ils empilent des goals mécaniquement, tellement ils sont plus forts que leur niveau,… mais ils y restent pour le beurre dans les épinards : autant être le Messie du patelin qu’être un attaquant banal dans une équipe qui rame un ou deux échelons plus haut, sans réelle possibilité de refiler plus de beurre à tes épinards ! Tandis qu’à l’autre bout de la hiérarchie, le système de pognon s’inverse : tu gagnes plus à rester attaquant/banquette dans un top-club qu’à être buteur titulaire un échelon plus bas. Je sais, aucun de ces deux exemples extrêmes ne flirte avec l’éthique sportive idéale. Notre foot est ainsi fait.

par Bernard Jeunejean

 » Virus, passion, muscle cardiaque : j’ai tout sous-estimé. Robert est encore vert ! « 

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