L’analyse des cadors

Les anciens joueurs références mettent les choses au point.

Pour analyser la saison, nous avons laissé la parole à ceux qui ont marqué l’histoire du club dans un passé proche ou plus lointain. Certains vivent (et vibrent) encore au rythme du Sporting de Charleroi.

OLIVIER SURAY

118 matches pour Charleroi entre 1989 et 1993 et 29 en 96-97

Que retenez-vous de la saison ?

Sous Thierry Siquet, j’ai constaté une très bonne organisation défensive mais cela manquait cruellement de poids devant. Avec John Collins, c’était très mauvais au départ puis la sauce a pris au fur et à mesure. C’est normal, il a dû réinstaller les bases d’un jeu offensif et il a fallu attendre deux mois avant de voir les progrès. Le Sporting a perdu des mois et des mois mais depuis quelque temps, excepté le couac contre Tubize, on a retrouvé une équipe.

Fallait-il se séparer de Siquet ?

Il fallait changer quelque chose. Le seul souci, c’est qu’il a fallu deux mois d’adaptation au nouvel entraîneur. Est-ce que Siquet aurait fait mieux au deuxième tour ? Je laisse le soin à Madame Soleil de répondre à cette question.

Le flop ?

Il n’y a pas de groupe, pas de mentalité d’équipe. Sur le plan collectif, ce Sporting ne vaut pas mieux que son classement actuel. J’ai vu trop de matches lors desquels personne ne s’engueulait quand l’équipe encaissait. Il y avait trop de fatalité et ça, on ne peut pas l’admettre. Quand on voit certains joueurs arriver à l’entraînement ou au stade, cela se remarque tout de suite. Il y a quand même une attitude sportive et professionnelle à garder car les joueurs véhiculent une image. Sur le plan personnel, je dirais Cyril Théréau. Sans être méchant, il n’a impressionné personne même s’il ne manque pas d’envie.

Le top ?

Je retiendrai le retour de Majid Oulmers et le transfert au dernier mercato d’ Adlène Guédioura, le médian défensif. Pour moi, c’est l’homme du second tour. Avec eux deux et Christophe Grégoire, le Sporting peut jouer par le milieu et les flancs. Cela a ramené du football dans l’équipe. Habib Habibou ? Il joue par à coups et n’est pas constant sur 90 minutes mais il s’agit de sa première saison pleine en D1. C’est normal.

Le club est-il à son niveau ?

Le Sporting a affiché des ambitions hors de portée. Cela a mis trop de pression sur les joueurs même si cela partait d’un bon sentiment. Charleroi est devenu un club très médiatique. C’est bon pour le sponsoring mais l’argent amène naturellement plus de pression.

Et la politique des dirigeants ?

On dit souvent que je suis un pro-Bayat mais il faut bien admettre qu’ils ont acheté un chat dans un sac. Leur politique est la meilleure façon de redresser le club. Aujourd’hui, le Sporting s’autogère et est sain alors que cela n’avait plus été le cas depuis des années. Désormais, on va pouvoir un peu mieux cerner leurs ambitions. S’ils veulent les atteindre, il va falloir miser sur le sportif car il n’y a rien à faire, un bon footballeur coûte cher. Tu ne peux pas toujours tout miser sur des joueurs de CFA en espérant réussir un coup à chaque fois. Mais il faut reconnaître que les Bayat ont aussi la pression. Ils ne sont pas aimés des supporters, ni de la presse. Il y a un moment où ils aimeraient un retour. Je les comprends mais pour cela il leur faut changer leur fusil d’épaule.

ERIC VAN MEIR

117 matches entre 1991 et 1996

Que pensez-vous de la saison du Sporting ?

Charleroi est toujours une partie de moi. Je suis récemment retourné à l’Olympic avec le Lierse et ça m’a fait tout drôle de refaire la route que j’ai parcourue pendant cinq ans. Le Sporting a réalisé une saison difficile et je trouve cela un peu bizarre puisque j’ai vu de très bonnes rencontres de Charleroi, notamment contre le Standard, Anderlecht ou à Bruges.

Le flop ?

Il leur manque des buts. Habibou n’en a marqué que huit. Or, pour vivre une saison tranquille, il faut un attaquant capable d’inscrire entre 10 et 15 buts. A notre époque, on avait des joueurs susceptibles de faire la différence dans chaque ligne avec en attaque, Dante Brogno et Neba Malbasa qui avait inscrit 20 buts une année.

Et la politique des dirigeants ?

En Flandre, on entend beaucoup de rumeurs sur l’extra-sportif, comme les problèmes de Mogi Bayat avec la police. Je suis trop éloigné pour donner mon avis. Cela relève de la cuisine interne mais ce sont les seuls échos qui nous arrivent de Charleroi !

Que faut-il changer pour que cela marche ?

Maintenant qu’ils sont un peu plus rassurés, il faut que les Zèbres retrouvent une sérénité. Tout le monde doit se mettre autour de la table et effacer les problèmes. Sinon, la saison prochaine risque d’être une copie conforme de cette celle-ci. En pire !

GEORGET BERTONCELLO

Elu Zèbre du Siècle en 2004, 306 matches en D1

Que retenez-vous de cette saison ?

Le Sporting avait bien débuté. Je trouve qu’on n’était pas moins fort que les autres, non ? Il manquait juste le petit quelque chose du buteur.

Fallait-il remplacer Siquet ?

Oh oui ! ! ! L’entraîneur, c’était pas ça, hein. Il était gentil. Trop gentil. Il n’a pas percé à cause de cela. Celui-ci est valable au moins. C’est le jour et la nuit. Collins fut un grand joueur et il ne rechigne pas au travail. Il dispose de la base et de l’expérience que ses prédécesseurs n’avaient pas.

Les tops ?

Pour moi, Fabien Camus est un grand joueur. Oulmers est bien revenu et puis, je retiens aussi celui qui rate tous les goals. Théréau, oui, c’est ça. Mais il est malheureux ! Il travaille, ce n’est pas un manchot.

Et la politique des dirigeants ?

Tout le monde doit bien mettre dans sa tête que si les Bayat n’étaient pas là, il n’y aurait plus de Sporting. Pour moi, les Bayat, je dis – Chapeau ! Surtout Mogi et Mehdi qui travaillent beaucoup. Car, le vieux, on ne le voit pas souvent. Il gère ça par téléphone.

Retrouvez-vous l’ambiance d’antan ?

Non, pas vraiment. Ce n’est pas la même chose que les dernières saisons. On sent qu’il y a un froid entre les supporters et les dirigeants. Mais si tu fais des résultats canons, comme le Standard, ça va revenir au stade car les Carolos ne sont pas les derniers à mettre de l’ambiance.

Que faut-il changer pour que cela marche ?

Il faut acheter deux à trois bons joueurs. Il n’y a rien à faire ! Une fois que tu auras fait ça, tu peux voir venir. Avec un BertrandLaquait qui est un des meilleurs gardiens de D1, avec Camus, et les renforts, tu es parti !

PHILIPPE MIGEOT

98 matches en D1 entre 1978 et 1988

Que retenez-vous de la saison ?

Cette saison fut chaotique, pas très consistante, à l’image du club. Quand on voit que le Sporting reste le seul club de Belgique à prendre six points sur six contre le Standard mais qu’en même temps, il perd à Tubize et doit à un miracle sa victoire à domicile contre les Brabançons ( NDLR : les Zèbres l’ont emporté 3-2 sur le fil), cela dit tout. Dans les pronostics, les Zèbres ont dû apporter de bons rendements et beaucoup de malheureux ( il rit). On peut s’étonner par rapport aux objectifs de début de saison mais moi, j’ai eu peur dès l’entame de la saison quand j’ai vu qu’ils perdaient Joseph Akpala.

Comment expliquez-vous ces mauvais résultats ?

Par une certaine lassitude. Depuis Mathijssen, les Zèbres étaient davantage habitués à jouer l’Europe plutôt que le maintien. Ils ne se sont pas remis en question.

Que pensez-vous de Collins ?

Comme je ne vais pas tous les jours au stade et que je ne vis pas à l’intérieur du groupe, je ne peux le juger que sur les résultats. Son bilan n’est pas plus impressionnant que celui de ses prédécesseurs. Il dispose d’un matériel avec un certain talent mais celui-ci nécessite de la motivation et de l’envie.

Le top ?

Il n’y a pas beaucoup d’individualités qui m’ont marqué.

Le flop ?

Théréau. J’aime bien sa manière de jouer et sa combativité mais il est en totale perte de confiance. Il a la scoumoune qui lui colle aux pattes et à la tête. Cependant, moi, je le conserverais. S’il reste, je serais curieux de voir sa saison. Il a en lui un tel lot de ranc£ur et de motivation. Là, il a hâte de finir cette saison-ci mais l’année prochaine, tous les compteurs sont remis à zéro. Il est encore capable de belles choses.

Que pensez-vous de la politique des dirigeants ?

Sur le fond, c’est ok mais il y a une politique de marketing qui n’est pas extraordinaire. Afficher des ambitions démesurées pour vendre des abonnements ne correspond pas à mes valeurs et à ma manière d’être. Je n’aime pas trop qu’on prenne les supporters pour des imbéciles. Cela manque d’élégance.

Comment retrouver du monde au stade ?

La recette demeure les résultats. Si vous luttez pour le top-5, vous retrouverez un Mambourg comble. Pour les avoir, il faut parfois prendre plus de risques financiers. Je ne veux pas passer pour un has-been ou être nostalgique mais j’entends beaucoup autour de moi des gens qui regrettent de ne pas retrouver un accroche-c£ur local, des racines. Pour moi, tout cela devient accessoire s’il y a des résultats.

PHILIPPE ALBERT

96 matches entre 1985 et 1989 et 14 en 1999-2000

Que retenez-vous de la saison ?

C’est une saison moyenne. Ils ont gagné contre des grands et perdu contre des équipes moyennes. Il ne manque pas grand-chose. Sans doute davantage d’efficacité. Mais cela aurait pu être pire.

Fallait-il changer d’entraîneur ?

Je pense que oui. Mais le gros problème, à Charleroi, c’est qu’on ne travaille pas dans la continuité. Cependant, au départ, Collins est un bon choix de la direction.

Le top ?

Le collectif. Quand cela fonctionnait, contre le Standard notamment, on pouvait voir un collectif très fort. Et quand cela foirait, on pouvait voir que le collectif ne répondait plus.

Que faudrait-il pour vivre une prochaine saison meilleure ?

Travailler dans la continuité. Que ce soit au niveau de l’entraîneur ou du noyau. Il faut être stable. On ne peut pas toujours transférer à tort et à travers.

DANTE BROGNO

389 matches entre 1986 et 2001

Que retenez-vous de la saison ?

Ce n’est jamais agréable de se sauver en toute fin de championnat. Ce fut une saison difficile avec un changement d’entraîneur et un effectif un peu étriqué. Avoir une forte artillerie offensive aurait permis une plus grande concurrence en attaque. Et puis, le mental a également joué son rôle. Quand tu tombes dans une spirale négative, il n’est jamais facile d’en sortir.

Fallait-il changer d’entraîneur ?

Je ne sais pas car cela dépend de l’atmosphère dans le noyau, de l’ambiance de travail. Mais la direction a pris ses responsabilités.

Le top ?

La révélation de Mboyo Peléet la relative éclosion de Jan Lella. Les jeunes sont l’avenir du club.

Le flop ?

Personne en particulier. On est tous responsable de la situation. Quand ça va mal, tout le monde doit se sentir concerné.

Que pensez-vous des problèmes extra-sportifs ?

S’il y a eu des problèmes en fin de saison, c’est parce que les résultats n’ont pas satisfait les supporters. Cela se passe de la même façon dans tous les clubs du monde. Je pense que la direction fait son possible avec les moyens financiers dont elle dispose.

par stéphane vande velde

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