L’ami de 30 ans

L’avocat liégeois – fidèle parmi les fidèles auprès de Lucien D’Onofrio – représente désormais le Standard au comité exécutif de l’Union belge.

La nouvelle est tombée le 6 août dernier via un communiqué du Standard de Liège :  » Sur proposition de la Ligue professionnelle, Paul Delbouille, administrateur de la SA Standard de Liège, est devenu, ce vendredi, membre du comité exécutif (CE) de l’URBSFA. Notre club dispose ainsi d’un relais supplémentaire auprès de la Fédération. Le précédent membre du comité exécutif affilié à notre club était Michel Preud’homme, lequel avait dû démissionner lorsqu’il avait succédé, en qualité d’entraîneur principal, à Johan Boskamp.  »

Le Standard n’avait plus de membre au CE depuis quatre ans et voilà que la direction envoie à Bruxelles un illustre inconnu du monde du football. Inconnu ? Pas tant que cela. Si Delbouille ne dit rien aux citoyens namurois, hennuyer ou bruxellois, il est bien connu sur la place de Liège. Un peu dans le microcosme footballistique mais surtout en sa qualité de ténor du barreau liégeois.

Delbouille est avocat pénaliste avant toute chose. Port altier, fines lunettes, cheveux noir jais, chemise colorée à col blanc, long manteau noir, écharpe rouge. Dans tous les déplacements, Delbouille promène sa fière, imposante et intimidante stature. Son ultime coquetterie est de ne pas communiquer sur son âge (68 ans)! Souvent aux côtés de Lucien D’Onofrio dont le physique bonhomme contraste avec le côté inflexible qui se dégage de celui qui, à la mort de Robert Louis-Dreyfus, devint le troisième membre du conseil d’administration du Standard pour compléter avec Lucien et Reto Stiffler la trinité dirigeante du club liégeois.

Delbouille transpire Liège par tous les pores. Le monde judiciaire principautaire l’a érigé en porte-drapeau. Une sorte de légende vivante. Le genre de personnages qu’on montre du doigt aux jeunes avocats :  » Si tu veux faire carrière en droit pénal, regarde-le, travaille et un jour tu seras comme lui. « 

 » C’est une très forte personnalité avec une énorme expérience et habileté « , dit l’avocat Luc Misson.  » Dans une salle d’audience, il parle haut. Il sait se faire entendre. Il n’a pas peur de dire ce qu’il a à dire. Vous savez, au pénal, c’est un combat d’hommes et quand on est son adversaire, il est très difficile à contourner. En football, on le comparerait à un Léon Jeck ou un Jacky Beurlet.  »

 » C’est une pointure du barreau de Liège. Tout le monde le sait en ville « , explique Robert Waseige.  » Comme son physique le laisse paraître, il est d’une grande rigueur même s’il est cool dans l’intimité.  »

 » C’est un avocat qui fait peur « , reconnaît Henri Depireux qui a utilisé ses services.  » Il a un charisme tel que quand il ouvre la bouche, tout le monde se met à trembler ( sic). Cela lui a permis de se faire respecter. Or, comme il a mené les plaidoiries les plus lourdes, il lui en faut du respect.  »

Finalement, Delbouille, c’est un peu notre Jacques Vergès à nous, la tentation terroriste en moins. Le genre d’avocats à ne jamais craindre de défendre un truand mal rasé ou à se lancer dans des causes que beaucoup d’autres jugeraient perdues d’avance, voire même indéfendables.  » C’est le propre des avocats pénalistes. Ils ne défendent pas S£ur Emmanuelle « , explique Misson.

L’avocat de Thierry Dalem et Joël Schraenen, deux des accusés du procès Marcel Habran dans le cadre d’un braquage sanglant d’un fourgon à Waremme en 1998, c’est lui. L’avocat de Salvatore Napolitano, mêlé au procès du meurtre d’ André Cools et condamné pour avoir détourné un fourgon à Chaudfontaine en 1997, c’est encore lui.

 » Il suffit d’un procès de Cour d’Assises retentissant à Liège et vous y trouvez Paul Delbouille « , explique un membre du barreau liégeois.  » Pour que sa plaidoirie porte, il lui faut un public. « 

 » On peut le considérer comme un membre de la famille  » (Dominique D’Onofrio)

Et puis, il y a son client le plus fameux et le plus fidèle : Lucien D’Onofrio. Celui qu’il a appris à connaître lorsqu’il était encore joueur à Tilleur et à Winterslag. Celui qu’il a défendu face à la justice française lors du procès des comptes de l’OM. Un ami de plus de 30 ans. Il y a également Dominique D’Onofrio. Une autre amitié. Différente.  » On peut le considérer comme un membre de la famille. Il me donnait cours de législation à l’ICADI (Institut de la Construction des Arts Décoratifs et Industriels) « , relate Dominique.  » Il a ensuite suivi tout mon parcours footballistique. Il fut vice-président à Montegnée, il y a 15 ans, lorsque j’y étais entraîneur et c’est sans doute mon plus farouche partisan comme entraîneur. Il voit davantage Lucien que moi car ils habitent tous les deux à Liège et qu’ils se fréquentent à tous les matches. Mais, il suffit que l’on se voie pour qu’on discute de tout pendant des heures. Avec Paul, on peut parler football, culture, politique, gastronomie.  »

C’est aussi là le secret de Delbouille. Son côté caméléon. Avocat, passionné de football, gastronome averti qui choisit ses voyages en fonction des restaurants étoilés et qui lors de ses diners avec Lucien se concentre sur la qualité des mets pour laisser au vice-président du Standard le choix des vins, voyageur invétéré qui a déjà découvert le Brésil, la Polynésie et qui cultive un amour immodéré pour Paris et la France en général (le portrait du Général de Gaulle orne d’ailleurs son bureau), fin connaisseur de théâtre et d’opéra, spectateur averti du jeu politique, lui qui n’hésite pas à dire  » qu’il a toujours une bonne connaissance des forces politiques en présence lorsqu’il se rend dans un pays « , mais qui recule devant un engagement politique plus sérieux.

 » Je n’aurais pas la patience à passer mes soirées à des ouvertures de magasin « , dit ce Wallon invétéré et chantre d’un front wallon plus fort au sein de l’Union belge. Il est donc prêt à s’engager plus sérieusement dans l’arène footballistique. D’abord, en intégrant le conseil d’administration du Standard lors d’une réunion londonienne en marge du Standard-Arsenal de la saison passée et en acceptant la présidence de l’ASBL centre de formation des Rouches. Et puis en rejoignant la maison de verre comme membre du comité exécutif et en acceptant de faire partie de la commission juridique de l’Union belge présidée par François De Keersmaecker.

 » C’est un chaud personnage et un supporter acharné qui n’aime pas l’injustice dans une rencontre de foot « , dit DD.  » Il n’hésite pas à s’en prendre à un arbitre quand il sait qu’il a raison.  »

 » Il a le sang chaud et lorsqu’il regarde une rencontre, il monte très vite « , corrobore Depireux.

Dans l’arène de Sclessin, Delbouille vient ajouter ses compétences juridiques à celles de Pierre François. Ce qui fait déjà dire à Robert Waseige :  » Lucien a sûrement fait rentrer Delbouille pour un peu contrer François. Il ne fallait quand même pas qu’une personnalité s’affirme trop !  »

par stéphane vande velde – photo: belga

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