KING KEVIN

C’était le 17 décembre 2014. Dortmund sentait bon la Noël. Chargés de sacs, les habitants procédaient aux ultimes achats pour les fêtes. À quatre kilomètres de là, le Signal Iduna Park accueillait le VfL Wolfsburg de Kevin De Bruyne. Aux portes du stade, on se pressait devant les marchands de saucisses. Schnaps et Glühwein coulaient à flots. Dans le stade, on chantait.

Kevin De Bruyne a vécu un match mémorable. Dans un registre libre derrière le duo d’attaque, il a délivré des passes millimétrées, autant de prouesses techniques. Jürgen Klopp, le coach du Borussia, était debout, bras croisés, empreint d’admiration. Ce jour-là, c’était comme si l’Allemagne découvrait vraiment Kevin De Bruyne.  » Chaque fois que De Bruyne avait le ballon, le Borussia déclenchait l’alarme « , écrivait le journal local le lendemain. De Bruyne lui-même n’a pas bronché. En réintégrant le vestiaire, il a déclaré que l’équipe avait bien joué.

Kevin De Bruyne ne s’est jamais surestimé. Certains Diables Rouges, ces egos enfermés dans un univers dont ils sont le nombril, doivent souvent l’énerver. De Bruyne, lui, se comporte de la plus normale des manières après les matches. Y compris mardi dernier, après avoir aidé Manchester City à pulvériser Barcelone.

Kevin De Bruyne ne donne pas l’impression d’avoir une image surdimensionnée de sa personne. Il est ainsi fait. Du coup, il ne s’intéresse pas particulièrement à l’entraîneur. L’arrivée de Pep Guardiola à Manchester City n’aura pas changé grand-chose pour lui. Toutefois, le style de jeu du Catalan lui convient : combinaisons au sol, possession du ballon, rythme élevé, sprints, coéquipiers démarqués. Guardiola accorde beaucoup de liberté à chacun tout en veillant à préserver l’organisation défensive.

N’est-ce pas, in fine, l’objectif de tout entraîneur ? Mettre du rythme, chercher la profondeur, exploiter les espaces. Roberto Martinez regarde certainement dans la même direction. On ne peut pas encore définir la plus-value réelle que va apporter le sélectionneur. Le match contre les Pays-Bas constitue un nouveau test, sans doute plus important que le match de qualification du dimanche contre l’Estonie.

L’équipe nationale offre un large choix, surtout dans l’entrejeu. Reste à voir les choix qui seront opérés. Kevin De Bruyne est en pleine forme et samedi, Eden Hazard a brillé avec Chelsea contre Everton. Marc Wilmots est rarement parvenu à faire fonctionner les deux hommes de concert. De Bruyne a dû mal vivre son déplacement sur le flanc, pendant l’EURO. C’est un des éléments qui ont mué ce tournoi en déception, pour lui.

Le retour de Vincent Kompany doit offrir plus de possibilités à Roberto Martinez. Sur le terrain et à côté. Le défenseur a parfois été une source d’énervement parce que Wilmots lui octroyait beaucoup de privilèges et qu’il sombrait parfois dans la nonchalance. Mais son leadership ne fait aucun doute. Kompany n’hésite pas à enfoncer le doigt dans la plaie. Sans se soucier des noms.

Roberto Martinez dispose maintenant de tout son noyau pour oeuvrer à l’avenir. Après le match contre l’Estonie, le football international entre dans une longue trêve hivernale. Les Diables Rouges doivent normalement l’aborder avec douze points. Mais les chantiers restent les mêmes. Comment obtenir plus de vitesse et de profondeur dans cette équipe, comment faire fonctionner ces talents ensemble ? Sans faire de promesses mais en apportant la clarté qui a si souvent fait défaut ces dernières années. C’est le premier défi auquel Roberto Martinez doit faire face. La manière dont il a communiqué sur la non-sélection de Radja Nainggolan en a été d’autant plus pénible. Martinez l’a attribuée à une blessure alors que le médian jouait avec l’AS Rome. Ce n’est que dans un second temps qu’il a reconnu qu’il s’agissait d’une mesure disciplinaire.

S’il faut éviter quelque chose, c’est bien les frictions. Comme avant l’EURO quand Marc Wilmots et la fédération ont commencé à discuter du prix des billets. C’était de l’amateurisme pur.

PAR JACQUES SYS

Roberto Martinez doit apporter de la clarté.

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