Jürgen marche sur l’eau, Roberto sur des oufs

Joueur : 6 clubs, 3 pays, 400 matches (1 bon), 2 buts en Coupe d’Europe. Batteur : 3 groupes, 130 concerts (1 sold out).

J’étais à Marseille la semaine dernière pour OM-Dortmund (3-0). J’y ai vu beaucoup de choses. A Dortmund, il y a le contraste entre le coach et ses joueurs. Jürgen Klopp nous a rappelé que le plaisir est la base de beaucoup de choses. Deux heures avant le match, lui et ses joueurs viennent voir la pelouse. Lui est comme un enfant. Ses enfants sont comme des adultes blasés. Le nez sur la pelouse, le casque sur les oreilles. Isolés du monde. Prostrés comme des automates labélisés pros de chez pros. Pas un regard vers l’essence de leur métier, leurs 3.000 supporters déjà en place et en voix.

Klopp, lui, est émerveillé. Son regard et son sourire sont directement dirigés vers la tribune. Il va vers eux, il a tout gagné avec eux. Il semble fier et heureux mais aussi épaté par tant d’amour donné. Sûr que lui le ressent. Sûr que ses joueurs ont oublié d’y trouver, d’y retrouver ce qui a fait aussi leur force la saison dernière. Car le contraste de cette équipe offre la netteté d’un instantané sur l’évidence de notre sport chéri. Un : il est plus difficile de rester au sommet que d’y parvenir. Deux : ce qui fait la réussite est bien plus que le rationnel.

La saison dernière, Dortmund a vu converger vers lui tous les atouts de la réussite. Le talent, un style, une discipline, une envie qui poussait les impondérables à devenir des alliés vers la consécration. Tous ces éléments qui se mettent au service des audacieux-classieux tant qu’ils n’oublient pas les besogneux. Les petits efforts font les grands détails.

Les poteaux étaient rentrants, les contres étaient favorables, les erreurs n’étaient pas punies. Depuis le début de cette saison, tous ces éléments ont changé de camp mais Klopp n’oublie rien, ne renie rien. Surtout pas les joueurs qui lui ont rendu en lingots ce qu’il avait demandé de sa parole d’or. Il considère que ceux-là, ceux qui ont épaté, méritent du crédit. Une approche géniale, mais jusqu’à quand ? Un titre, un sacre ne doit être que le début. En foot, l’aboutissement ne dure que le temps de le savourer.

Le lendemain du match à l’aéroport de Marseille, les mêmes supporters sont là. Les joueurs arrivent. Grand silence. Ils sont des centaines à scruter leurs idoles. Pas un mot, que des regards déçus mais respectueux. Pas un reproche. Un seul ose sortir du rang, il va vers Klopp qui l’accueille avec un grand sourire, le prend par l’épaule et lui parle. Klopp est un chef de meute qui assume son rôle, qui soulage ses jeunes champions. La classe. Lui aussi apprend à gérer l’excellence. Dortmund est déjà cuit dans la course au titre. Le Bayern ne rate pas deux saisons de suite. Et Dortmund prépare ses succès futurs.

Avec Roberto Mancini, c’est une autre méthode. Normal : l’un a été un bon joueur de Division 2 allemande, l’autre une star mondiale. Mancini a énormément gagné comme joueur. On lui offre tout pour tout gagner comme entraîneur. Il reçoit même ce qu’il ne demande pas. Pas facile, mais le culot aux lèvres, il nous a laissé bouche bée à la fin de son match à Fulham. Score final 2-2 après avoir mené 0-2. Explication :  » Je n’ai pas assez de joueurs « . Surréaliste ! Il a reçu pour 350Meuro de joueurs en trois ans. Que du classieux mais son noyau est trop petit pour gérer trois matchs par semaine.

Et là, on se dit que le surréalisme est dicté aussi par l’opportunisme. Et si c’était un message envoyé à ses dirigeants. Histoire qu’ils comprennent qu’acheter des joueurs c’est bien mais que construire une équipe c’est mieux. On espère qu’ils ne sont pas susceptibles car Roberto prend des risques. Carlos Tevez a refusé de monter au jeu au Bayern. Mancini :  » Tant que je serais coach ici, il ne jouera plus « . Le premier vrai test pour les bâtisseurs d’empire venus d’Orient. Virer l’architecte ou l’ouvrier qualifié ? La décision nous donnera une vraie réponse quand à l’avenir de Manchester City.

Klopp et Mancini font le même boulot mais n’ont pas le même statut. Jurgen marche sur l’eau, Roberto sur des £ufs.

PAR FRÉDÉRIC WASEIGE, JOURNALISTE VOO FOOT – Be TV

Klopp et Mancini font le même boulot mais n’ont pas le même statut

« A Marseille, si tu gagnes, tu ne paies pas ton pain. Si tu perds, tu en prends un  » Roger Propos (ex-préparateur physique de l’OM)

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