José Riga l’explorateur

Vis-à-vis d’un coach qui gagne, tout baigne : s’il aligne sans cesse le même onze, on s’émerveillera des automatismes de son équipe-type ; et s’il gagne en bouleversant fréquemment sa compo, on s’émerveillera de son turn-over. Mais vis-à-vis d’un coach qui perd (ou gagne moins qu’espéré), tout est contestation : s’il maintient sa confiance aux mêmes, on soulignera chaque jour davantage les tares des titulaires, en se demandant à quoi sert d’avoir des réservistes ; et s’il donne au contraire sa chance à tous, la cause des échecs répétés sera que « y’a pas de fond de jeu » (air connu).

En foot, seule la victoire est jolie. José Riga le sait pour l’avoir expérimenté à plusieurs niveaux de la hiérarchie. Le Standard actuel ne pète pas toujours des flammes, et son coach s’est vu récemment accusé d’avoir déjà aligné plus de 25 joueurs en une quinzaine de rencontres officielles. Et alors ? Dans la situation qui est la sienne, je ne vois pas comment rester honnête et faire autrement. Le gars Riga débarque dans un nouveau club, les matches officiels démarrent presque illico, et on lui refile un effectif de 30 bonshommes à crampons, mettons-nous à sa place. Il y en a là-dedans qui vont peut-être partir, mais peut-être pas. Il y en a que José ne connaît ni d’Eve ni d’Adam. Il y en aura même d’autres qui vont encore s’amener.

Et il y a ceux que le nouveau coach n’a guère pratiqué que comme vous et moi, en les ayant vu prester pour d’autres hier. Mais la découverte EN PROFONDEUR de ce qu’un gars pourra et ne pourra pas t’apporter, ne commence que quand le gars doit gagner sous tes ordres : et pour découvrir cela, il faut un certain temps d’une part, et plusieurs vrais matches d’autre part !

Riga qui change pour l’instant beaucoup ses compos n’en est pas de facto un partisan du turn-over à tout crin : il fait tourner parce qu’il cherche encore à savoir qui est qui ! S’il ne le faisait pas, il serait à la fois idiot et malhonnête envers les divers postulants. Son but à terme est certes d’aligner les meilleurs, mais ce n’est pas du jour au lendemain qu’on est convaincu de qui sont les meilleurs,… faut pas croire aux coaches qui voient tout et tout de suite ! A part Sinan Bolat, peut-être aussi Séba Pocognoli maintenant que Abdelfattah Boukhriss est reparti et tant que Jelle Van Damme joue un cran plus haut, qui est évident à son poste ? Personne. Faut donc d’abord faire le tri, voir plus clair, entre les individualités de même profil. Ensuite et seulement, faudra chaque fois opter pour un profil collectif capable de rafler des victoires : sur base des qualités/défauts DÉSORMAIS CONNUS de tout qui compose le noyau ! Sacré boulot.

La concurrence paraît moindre derrière (en gros, huit candidats pour quatre postes), mais rien ne dit par exemple que Daniel Opare, quoique plus technique, a définitivement convaincu son coach qu’il apportait forcément plus qu’un Réginal Goreux ou un Laurent Ciman. Rien ne dit que le duo axial titulaire selon Riga sera Kanu/Felipe pour la saison… allez même savoir si l’on y retrouvera finalement pas William Vainqueur… ou Van Damme si Luis Seijas explosait à gauche ? ! Et à propos de Vainqueur, bien que ce soit toujours chouette un bon joueur en plus, le coach sait-il déjà s’il sera plus efficace, plus costaud ou plus malin qu’un Yoni Buyens qu’il découvre aussi à peine : s’il faut faire jouer les deux, ou s’ils sont en concurrence directe ? Même question de complémentarité/rivalité entre Nacho Gonzalez et Franck Berrier… dans un contexte offensif riche d’une douzaine de candidats pour les quatre postes les plus hauts sur l’échiquier !

Voici un certain temps, j’adorais François Béranger qui chantait  » Plus je me pose de questions, et moins je trouve de solutions ! »… ouf qu’à mon avis, Riga n’est pas comme ça ! Confiance, il aura fait le tri pour la fin des matches/aller de la phase classique : et il n’aura pas accumulé le même retard que l’an dernier au moment où débuteront les play-offs, pour ne pas à nouveau y briller pour des prunes ! Mais d’ici là et pour quelques semaines encore, les questions, faut que Riga se les pose, qu’il teste, qu’il jauge, qu’il se torture les méninges. C’est en ce sens qu’il n’y a pas langue de bois lorsqu’il répète qu’à Sclessin,  » On est encore en reconstruction « . Plus exactement, il devrait dire à propos de lui-même « Je suis encore en exploration ». C’est son droit. C’est son job.

PAR BERNARD JEUNEJEAN

 » Il s’est vu récemment accusé d’avoir déjà aligné plus de 25 joueurs. Et alors ? « 

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