Les explications de la percée du nouveau numéro 1 belge.

K imClijsters a rompu avec LleytonHewitt, le demi-dieu australien. JustineHenin a dû déclarer forfait en dernière minute, pour DownUnder. Puis ClaudeEerdekens s’est fait mousser aux antipodes. La semaine dernière, en Australie, mieux valait taire ses origines belges, sous peine de s’attirer des regards torves. Un homme a essayé d’inverser la tendance : OlivierRochus. Petit et courageux (1m65), il signe son meilleur début de saison en six ans de professionnalisme. Il a entamé sa saison par une demi-finale à Adélaïde, et une victoire en double avec XavierMalisse. Une semaine plus tard, en Nouvelle-Zélande, il a atteint la finale. Vous connaissez son parcours à l’Open d’Australie.

Olivier Rochus prouve qu’il a progressé. Il s’est défait du tennis flegmatique qui lui jouait parfois des tours et a balayé les doutes qui le hantaient comme la peur d’attaquer des stars. A 24 ans, Rochus connaît à présent la musique. Sa maturation personnelle se reflète sur son tennis. Oli trouve maintenant l’équilibre idéal entre l’attaque et la défense. En se postant loin derrière le filet, avant, il obligeait ses petites jambes à parcourir trop de kilomètres. Il ose désormais jouer plus intelligemment et le gabarit de ses adversaires l’y contraint de toute façon. Sa victoire sur GaëlMonfils illustre ce changement. On compare le Français de 18 ans à YannickNoah. La semaine passée, il a signé un contrat fabuleux avec Nike et BradGilbert lui prédit le Top 10 avant la fin de l’année. Dans le passé, ces éléments auraient déstabilisé Rochus. Cette fois, soutenu par huit victoires en deux semaines, il a aisément dominé le Français. Concentré, convaincant, il a laissé Monfils se fatiguer sans dépenser lui-même trop d’énergie. Cela s’appelle l’expérience.

A Auvelais, on sait depuis longtemps que les frères Rochus sont très doués. Il y a quelque 20 ans, ils jouaient aux billes en bord de Sambre. Ils vivaient déjà dans leur petit monde, unis comme les doigts de la main. Christophe, l’aîné de trois ans, était le meneur et conserve une grande influence sur son frère. Oli, lui, était le génie du tennis, le chouchou de la fédération francophone, avec Justine Henin. Un produit de l’école de mini tennis, aussi. Sur un demi-court, les enfants peaufinent leur technique sans devoir puiser trop dans leurs forces. Olivier Rochus semblait tout assimiler comme un jeu. Contrairement à Henin, il ne se focalisait pas sur un objectif, mû avant tout par l’amour du tennis.

Nul ne semblait en mesure de freiner Olivier en Belgique. Il a raflé les titres belges en catégories d’âge et même sur la scène internationale, il a connu le succès, à l’instar de Xavier Malisse, d’un an son aîné. Comme son ami RogerFederer, il s’est distingué sur le circuit Junior en 1997. Des demi-finales à Roland Garros et Wimbledon l’ont propulsé à la 11e place du classement mondial des Juniors. Pas mal pour quelqu’un qui souffrait déjà de sa petite taille. Handicap au service, des mètres à courir en plus, moins d’amplitude, sans oublier l’impact psychologique engendré par cette différence de gabarit. Ses débuts sur le circuit professionnel ont d’ailleurs été entourés de doutes, avant tout dans sa propre tête, d’ailleurs.

La grande percée en 2000

Sa carrière a débuté cahin-caha. Quelques victoires dans des tournois peu cotés l’ont encouragé à travailler. Surtout, Olivier s’est appuyé sur la présence de son frère, classé dans le Top 100. Les frères s’entraînant toujours ensemble, le cadet a pu constater qu’il n’était guère éloigné du niveau professionnel. Christophe ne mesure que cinq centimètres de plus et devait donc surmonter le même handicap. Tout cela a insufflé confiance à Olivier. Sa grande percée s’est produite en 2000.

Cette saison-là, il a été élu Rookie de l’Année par ses confrères. Un titre mérité pour quelqu’un qui avait amélioré son classement de quelque 300 places en un an. A Wimbledon, le public a découvert sa classe. Au deuxième tour des qualifications, il a éliminé MagnusNorman, qui n’est certes pas un spécialiste du gazon mais était alors le deuxième mondial. Il n’est pas anormal que Rochus ait fêté ses premiers grands succès sur le gazon. Cette surface se prête admirablement à son tennis fluide et technique, il peut exploiter sa bonne volée, son jeu de jambes rapide et son centre de gravité bas. Au troisième tour, en revanche, il s’est incliné face au vétéran italien Gianlucca Pozzi.

Cette irrégularité allait lui jouer des tours les années suivantes. Une performance n’était jamais suivie d’une autre : en 2002, il a battu MaratSafin à Wimbledon mais un tour plus tard, ArnaudClément l’a vaincu. A l’US Open de l’année dernière, il a surpris CarlosMoya, mais n’a pu ensuite se défaire de DominikHrbaty. Souvent, quand il perdait, il se crispait au moment clef du match. Davantage que d’un passage à vide physique, il était victime du stress. Car ne vous y trompez pas : malgré son bagage technique, Rochus est un travailleur discipliné à l’entraînement. Ses premiers matches de l’année semblent indiquer qu’il a vaincu son stress.

Toutes les pièces du puzzle paraissent donc en place. Celui qui est capable de gagner le tournoi de Palerme avant ses 25 ans, sans oublier trois finales en simple et le titre en double à Roland Garros, peut déjà se targuer d’un beau palmarès. Parfois, la poisse l’a empêché de donner la pleine mesure de son talent û toute la saison dernière, il a souffert d’une inflammation de la gaine osseuse. D’autres fois, il n’a pas assez cru en lui. Son début de saison doit l’avoir convaincu de son talent et l’aider à acquérir la régularité qui lui a fait défaut dans le passé. Alors, Olivier Rochus jouera dans la cour des grands.

Filip Dewulf

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