Jestrogoal a du retard

Bruno Govers

Le Yougoslave veut répondre présent sur les terrains en octobre.

Lundi 3 septembre. C’est enfin le jour J pour Nenad Jestrovic qui, pour la toute première fois depuis son arrivée au Parc Astrid, se voit autorisé à s’entraîner avec l’ensemble du noyau professionnel. Lors du grand rassemblement des troupes, au tout début du mois de juillet, il était en effet apparu que la blessure qui avait contraint le buteur yougoslave à faire l’impasse sur la fin de la défunte compétition (une petite fissure au péroné, au-dessus de la malléole, provoquée par un duel avec Wilfried Delbroeck lors de la rencontre entre le Racing Genk et l’Excelsior Mouscron, le 14 avril dernier) n’était toujours pas complètement guérie. Deux jours après la reprise, la nouvelle recrue anderlechtoise passa sur le billard, l’apposition d’une plaque devant favoriser le processus de guérison.

Deux mois plus tard, exactement, l’ancien goal-getter des Hurlus est don appelé à faire sa grande rentrée sur les aires d’entraînement. Le programme concocté par le coach Aimé Anthuenis et son adjoint, Franky Vercauteren, s’y prête tout particulièrement. Car en cette après-midi, le travail avec le ballon n’est prévu qu’au terme de la séance. En guise de préambule, c’est à un exercice de démarquage que les joueurs sont conviés. Tout s’y passe, toutefois, avec les mains et, l’espace d’une demi-heure, Gilles De Bilde et ses partenaires se muent tour à tour en basketteurs puis en rugbymen. Dans ce dernier cas de figure, le jeu au pied est bien sûr autorisé pour transmettre le cuir à un partenaire au prix d’un léger ou d’un vigoureux coup de botte.

Nenad Jestrovic, qui s’était déjà montré très remuant auparavant, en quémandant la ballon tous azimuts, ne demeure pas en reste non plus ce coup-ci. Il saute haut pour récupérer l’ovale et n’hésite pas à le propulser d’un envoi sec vers un partenaire situé au loin. Jan Sergeant, l’un des kinés du Sporting, détaché à sa rééducation, suit la scène de près. A deux reprises, le joueur lui adresse un pouce levé, signe que tout va bien. Après cette mise en jambes, le groupe est réparti en plusieurs cellules. Cinq contre cinq d’un côté, avec Zvonko Milojevic et Zeljko Pavlovic dans les buts, sur un terrain aux dimensions réduites. Plus loin, dans l’un des goals fixes, le portier titulaire, Filip De Wilde, doit faire face à un bombardement incessant du reste de l’effectif.

« Je suis soulagé »

Walter Baseggio, victime d’une fracture de stress au départ de cette campagne, et Nenad Jestrovic s’éclipsent. Sur la partie latérale du terrain, ils effectuent des petites courses en avant, vers l’arrière, puis sur le côté. Par la suite, ils se transmettent le ballon en augmentant tant et plus la distance qui les sépare. Les activités se terminent, pour eux, par quelques séries de passes à vingt-cinq mètres et un footing, après quoi ils délaissent la pelouse de Neerpede. L’international belge n’est guère enthousiaste, car il ressent toujours une gêne à la jambe, qui entrave ses mouvements. Mais Jestrovic, lui, est radieux.

« A ce stade de ma carrière, je n’avais encore jamais dû passer mon tour pour des problèmes autres que musculaires », souligne-t-il. « Et ils ne m’avaient jamais empêché de dormir. Cette fois je redoutais quand même perdre un peu en mobilité à hauteur de la cheville. Car contrairement à Walter, chez qui la fissure est située à mi-hauteur du péroné, la mienne est localisée juste au-dessus de la malléole. Lorsque des vis furent apposées à cet endroit pour fortifier l’os, c’est à la fois la jambe et l’articulation qui étaient bloquées. J’avais donc peur pour la souplesse, à ce niveau. Je suis toutefois pleinement rassuré car les rotations à hauteur de la cheville ne me posent pas de problèmes. En pleine course, il m’arrive toujours de ressentir des élancements, par moments. Mais, aux dires du staff médical, ce n’est pas anormal. Une légère protubérance s’est formée à l’endroit de la fissure et elle provoque des frottements, de temps à autre, avec les tendons. Keureusement, ce phénomène devrait disparaître au fil des jours. Aussi, je suis soulagé. J’ai la perspective de redevenir le même footballeur qu’avant et c’est l’essentiel ».

Le lendemain, 4 septembre, Nenad Jestrovic doit cependant déchanter une première fois. Suite aux efforts accomplis la veille, une petite inflammation s’est faite aux tendons, nécessitant une infiltration au moment de sa visite chez le docteur Marc Martens. A son retour, nous lui tendons une copie du journal Le Soir du même jour. On peut y lire que, contrairement aux prévisions, le come-back du puncheur sur les terrains ne devrait pas avoir lieu avant le mois de janvier. Lui-même se montre pour le moins étonné.

« Le 15 septembre, c’était trop optimiste »

« Vous m’avez vu à l’oeuvre vous-même hier », observe-t-il. « Donnais-je vraiment l’impression d’un footballeur qui est loin de renouer avec le football de haut niveau? Je ne le pense pas. D’accord, entre cette prise de contact et mon entrée en matière en championnat, plusieurs semaines seront sans doute nécessaires. Mais de là à devoir patienter quatre ou cinq mois, il y a une fameuse marge. J’admets avoir été un peu trop optimiste, début août, en prévoyant ma rentrée pour le 15 septembre. Mais j’ai bon espoir d’être opérationnel un bon mois plus tard. L’idéal serait de reprendre le collier en Réserves, dans trois semaines et de retâter en Première passé le même délai. C’est le but que je me fixe désormais. Et tant pis si quelques-uns pensent le contraire ».

Nenad Jestrovic veut s’inspirer de l’exemple de Marc Wilmots. Opéré à la cheville en fin de saison passée, le capitaine des Diables avait repris le collier en avance sur les prévisions les plus optimistes, au point d’être disponible dès ce début de campagne. Le transfuge anderlechtois tient à suivre une démarche similaire, même s’il n’entend pas, non plus, brûler les étapes.

« Ma préoccupation majeure est de revenir à 100% de mes moyens », ajoute-t-il. « Et tel est aussi le souhait du club. Il ne sert à rien de parer au plus pressé, avec le risque d’encourir une rechute. Mais au train où vont les choses, je ne vois absolument pas pourquoi je ne rejouerais pas cette année. Jusqu’à présent, j’ai respecté mon programme: musculation, courses, sauts. S’il n’y avait pas eu ces tiraillements, en raison d’une calcification trop importante, j’aurais déjà été déclaré bon pour le service. Il n’y a donc aucune raison de broyer du noir. Sous peu, je serai là ».

« J’apporterai du réalisme

Quoiqu’il ne soit pas encore d’attaque sur le terrain, l’attaquant yougoslave ne la joue pas discrète dans le vestiaire. Alors que les autres éclopés du début de saison, comme Alin Stoica, Davy Oyen, Oleg Iachtchouk ou Tristan Peersman ne cherchent nullement le contact après un match, Nenad Jestrovic, lui, répond présent comme tout le monde, laissant même entendre clairement sa voix. « Non pas que je veuille marquer mon territoire ou encore que je cherche à m’imposer par toutes les manières », observe-t-il. « Si je suis là, c’est tout simplement par esprit de solidarité envers mes coéquipiers. Après un match, je veux pouvoir les féliciter et partager leur joie, ni plus, ni moins ».

Chez les Frontaliers, Jestrogoal avait rang d’authentique vedette. Au stade Constant Vanden Stock, c’est un statut qu’il lui faut partager avec d’autres, notamment en attaque où l’idole n’est autre que Gilles De Bilde, qui refait petit à petit son trou au RSCA. Les deux hommes sont-ils faits pour s’entendre?

« En dehors des terrains très certainement », souligne Nenad Jestrovic. « C’est normal, il est sympa et moi aussi. La preuve: quand je lui parle en français, il me répond en serbo-croate ( il rit). Entre les lignes, je ne discerne pas le moindre problème non plus. Mais cette remarque vaut pour toutes les associations qui ont été essayées jusqu’ici. D’ Ivica Mornar à Ki-Yeun Seol, en passant par Aruna Dindane, Oleg Iachtchouk ou Ode Thompson, sans compter Gilles De Bilde et moi-même, nous avons tous nos qualités spécifiques, les unes un peu plus développées que les autres. Le tout, c’est qu’elles s’imbriquent harmonieusement. A Metz, autrefois, ce n’était pas le cas. Bruno Rodriguez, Vladan Lukic, Louis Saha et moi-même y étions tous coulés dans le même moule. Ici, c’est complètement différent ».

Dans cet ordre d’idées, en quoi Nenad Jestrovic se distingue-t-il de ses concurrents? « Je fais preuve de davantage de réalisme en zone de vérité », affirme-t-il sans détour. « Jusqu’à présent, le marquoir n’aura pas été le juste reflet de leur domination souvent outrancière. Je songe à la première mi-temps contre l’Antwerp, notamment, voire au match au GBA. Il y a eu trop de déchet à la finition. L’équipe aurait sans doute été un peu plus productive avec moi dans ses rangs. Elle a raté pas mal de demi-occasions depuis le début de la saison. Qui sait si avec moi, elles n’auraient pas été transformées? J’ai bon espoir de le prouver en tout cas. Et le plus tôt sera le mieux ».

« Koller ne manque pas »

La seule chose qui chagrine Nenad est que les premiers rendez-vous de la Ligue des Champions lui fileront sous le nez. Au mieux, selon ses propres prévisions, il devrait être prêt pour les manches retour, à commencer par celle de la mi-octobre face au Real Madrid. « Jouer face à Figo ou Raul, ce serait évidemment le rêve », dit-il. « Mais le plus important, c’est que l’équipe tienne la route. Et les premières impressions sont bonnes. Beaucoup s’attendaient à une mise en train laborieuse suite au départ de Jan Koller. Mais l’équipe a prouvé qu’elle pouvait fort bien se débrouiller sans lui. Pour moi, c’est une aubaine. Car ma propre transition s’en trouvera facilitée. Je devrais débuter de manière idéale… Reste à savoir quand, à présent. C’est ma seule préoccupation ».

Bruno Govers

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