Jeans, photos et belote

Vous faites sans arrêt la navette entre Perwez et Beveren. Vous reste-il des loisirs?

Frédéric Pierre (29 ans): Gamin, de Jodoigne, je me rendais à la gare de Tirlemont pour y prendre le train de Bruxelles, pour les entraînements de l’équipe nationale. J’ai l’habitude des trajets mais, en l’espace de dix ans, le trafic a considérablement augmenté. Je rejoins Beveren par les petites routes, par Louvain et Malines, pour éviter les bouchons Deux jours par semaine, lorsqu’il y a deux séances d’entraînement, je pars à huit heures pour revenir à 18 heures. De toute façon, j’ai envie de jouer. Nous habitons à Perwez depuis huit ans. Nous sommes proches de nos parents, ce qui nous permet de leur confier les enfants. En fait, nous essayons de nous consacrer un jour par semaine, Anouchka et moi. Nous sortons manger au restaurant, voir des amis, nous soufflons. Nous apprécions la gastronomie, les petits plats qu’on ne se prépare pas soi-même, même si Anouchka est un cordon bleu. Sinon, il est clair que Jason (dix ans), Louis (six) et Teo (deux) accaparent notre temps.

Aimeriez-vous que l’un d’eux émerge en football ou pensez-vous que cette voie ne sera plus du tout intéressante à l’avenir?

Le football est en crise, comme les autres secteurs. Dans le passé, j’ai joué à la Bourse mais c’est fini. Même si c’est le moment, puisque les cotes sont au plus bas, j’attends, par prudence. Logiquement, le football devrait rebondir dans quatre ou cinq ans. Le coût de la vie augmente. Les salaires ne peuvent quand même pas baisser éternellement? Si les enfants ont envie de jouer, je les soutiendrai, sans les pousser. Il y a plus de déçus que d’heureux. J’aurais peur mais d’un autre côté, les déceptions forgent le caractère. Jason le prendrait mal, Louis est comme moi, il s’acharnerait.

Songez-vous à l’après football?

Pas encore. J’entraîne déjà l’équipe de Jason mais je ne peux pas encore passer mon diplôme. Je ne veux pas entamer des cours pour les interrompre quelques mois plus tard. J’aimerais retourner à l’étranger, loin. Je pense au Japon, qui enrôle souvent des joueurs expérimentés. Bientôt, je pense que le football nippon rivalisera avec l’européen. Anouchka me suivrait, mais à condition que nous restions un certain temps. Nous avons passé six mois à Nîmes. C’était la belle vie. Les enfants ont été déçus de revenir alors qu’ils venaient de s’adapter.

Avez-vous un regret?

Oui, j’ai commis une grosse erreur en déclarant que je ne jouerais plus au Standard. J’ai toujours dit ce que je pensais et je vois bien le football. Je pense que je ferais un bon entraîneur mais j’ai une trop grande gueule. Dans le milieu, on aime bien les moutons. Cependant, je crois en ma bonne étoile, même dans les moments difficiles.

Parlez-nous d’Anouchka…

C’est une mère idéale. Je sais que je peux lui faire confiance. Peut-être est-elle trop protectrice, alors que je remets parfois les pendules à l’heure. Nous voulions tous les deux des enfants. Elle en désirait quatre mais elle s’est arrêtée à trois…

Quels sont vos hobbies?

J’adore la pêche. C’est une passion. Je suis nerveux mais là, devant ma ligne, je peux rester trois heures sans problème. J’aime la nature. Nous jouons parfois au tennis, en couples. J’aime le shopping. Ma femme est heureuse (il rit). Nous n’achetons pas des marques. On peut très bien aller dans un magasin chic et ne rien trouver. Je suis plutôt jeans-chemise ou t-shirt, avec une préférence pour le bleu. Nous faisons nos achats à Namur ou à Woluwé, quand il pleut.

Vos vacances idéales?

La mer, le soleil, les pays lointains, surtout pour Anouchka. J’aime le ski, sans être un grand skieur: les pistes rouges me suffisent. Je me perfectionnerai plus tard. Nous essayons de prendre quatre ou cinq jours seuls avant de passer une ou deux semaines avec les enfants. Quand ils nous accompagnent, tout tourne autour d’eux. Il faut les surveiller, nous ne pouvons pas sortir. Nous sommes amis avec quelques couples qui ont des enfants du même âge. Les gosses s’entendent bien. En juin, j’ai rejoint Anouchka au Cap d’Agde. Les grands ramassaient des coquillages pendant des heures. Teo, lui, est encore petit. De toute façon, nous ne les laissons jamais sans surveillance au bord de l’eau. Un accident est trop vite arrivé: il suffit de déraper, d’avoir un malaise…

Qu’aimez-vous en Frédéric?

Anouchka Pletincq (33 ans): C’est un bon père. Nous nous sommes bien trouvés. Nous sommes très famille. Il me soulage beaucoup. A part le repassage, il sait tout faire. Je pourrais partir l’esprit tranquille. Frédéric sait s’occuper des enfants et du ménage. Il est optimiste, alors que je suis plutôt pessimiste. Nous nous complétons bien.

Ramène-t-il ses problèmes à la maison?

Oui! Il me téléphone et m’explique tout. Comme il est impulsif, j’essaie de le calmer. Même à la maison, il est comme ça, verbalement uniquement. Heureusement, il se bonifie avec l’âge.

Comment avez-vous fêté la St-Valentin?

Il jouait ce soir-là mais j’ai eu mes fleurs! Nous avons commandé un meuble.

Dans quel esprit éduquez-vous vos garçons?

Nous avons beaucoup de principes. Nous sommes sur la même longueur d’ondes. Par exemple, ils vont au lit à 20 h, ils doivent finir leur assiette pour avoir un bonbon, ils doivent dire où ils vont. Ils peuvent aller voir leurs amis à condition de nous prévenir. Lorsqu’ils rentrent, ils font leurs devoirs, avant d’être fatigués. Pas question de les faire après le souper. L’école est très importante, surtout qu’ils ne manquent pas de capacités, quand ils s’appliquent.

N’aimeriez-vous pas travailler?

Au terme de mes humanités, j’ai suivi des cours d’assistante sociale pendant un an puis je suis tombée enceinte. Dans un mois, Teo ira à l’école. J’ai déjà suivi des stages de peinture murale, j’adore la photographie. Je prends des clichés des enfants. éa se voit, non? (Elle désigne un pan de mur) J’hésite sur ce que je vais faire. Ce sera quelque chose d’artistique. J’ai plusieurs possibilités de formation. (Frédéric: Je comprends qu’elle veuille sortir de ses quatre murs. Comme nous en avons les moyens, elle n’a pas encore travaillé. Avec trois enfants, ce n’est pas évident.)

Vous avez apporté beaucoup de soin à la décoration de la maison!

J’aime ça. Mais je privilégie le classique, avec des touches de moderne dont on ne se lasse pas. Il suffit de changer les tentures pour renouveler la décoration. Nous aimons les choses durables. Frédéric me laisse libre de suivre mes idées. (Frédéric: Elles sont souvent bonnes).

Quels sont vos hobbies?

J’aime cuisiner. Pas les plats quotidiens, plutôt lorsque nous recevons. Et comme Frédéric le disait, nous aimons découvrir des cuisines exotiques. Nous choisissons des restaurants mexicains, japonais… Je joue à la belote sur l’ordinateur, avec Fred ou avec une amie. Outre la photo, j’adore la lecture: des autobiographies, des histoires vraies. Lorsque je me plonge dans un livre, je n’en émerge pas avant la fin. La lecture me captive. Mes ouvrages préférés? (Elle se dirige vers la bibliothèque) La vie de Léopold III m’a marquée: c’est un roi méconnu, une belle histoire d’amour. Il a dû faire preuve de beaucoup de force de caractère et d’amour pour affronter son destin. La Prisonnière raconte la vie d’une femme emprisonnée au Maroc. Jeune, j’ai dévoré L’Herbe bleue, l’histoire dune jeune droguée.

Je regarde aussi le JT de 13 h et des émissions comme éa se discute, C’est mon choix, Des racines et des ailes. Frédéric ne supporte pas ça. (Elle rit et il fait la grimace).

La crise actuelle vous émeut-elle?

Oui. Les attentats du 11 septembre m’ont marquée mais la vie continue. Frédéric est plus optimiste que moi. Je n’ai pas très bien compris la réaction des Belges par rapport à la Turquie, même s’il faut évidemment tout faire pour éviter une guerre.

Pascale Piérard

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