» Je reviens toujours « 

À 66 ans, l’ancien sélectionneur de la Belgique ne pense pas encore à sa pension.  » J’ai du mal à me distancier du football et de ses rituels.  »

Dick Advocaat a volé au secours de l’AZ, pendant huit mois, après le renvoi de Gertjan Verbeek. Son enthousiasme contagieux a conduit l’équipe d’Alkmaar aux play-offs pour l’Europe. L’homme qui a dirigé les Diables Rouges d’octobre 2009 à avril 2010 ne semble pas encore rassasié.

Ceci n’est pas l’histoire d’un départ à la retraite…

Dick Advocaat : Non. On ne sait jamais avec moi. Je reviens toujours. Plus à l’AZ mais…

Vous avez souvent déclaré ne plus vouloir entraîner aux Pays-Bas ni vous occuper d’un club mais vous avez coaché le PSV puis l’AZ.

Marcel Brands, le directeur technique du PSV, a insisté alors que j’avais dit non à trois reprises. Nous avions déjà travaillé ensemble à l’AZ puis Mark van Bommel est arrivé. J’avais un bon pressentiment. L’année dernière, j’ai cru que j’allais devenir sélectionneur de l’Irlande mais elle a préféré Martin O’Neill. Alors, en octobre, j’ai laissé parler mon coeur quand l’AZ s’est manifesté. J’ai du mal à dire non.

Marco van Basten a dit, quand il était sélectionneur :  » Qu’est-ce qui stipule que je dois être conséquent ?  »

Il s’agit plutôt des chances qu’on reçoit. On ne sait jamais où on va se retrouver. Je décide moi-même mais j’ai parfois l’impression que les autres veulent le faire à ma place.

Qu’allez-vous faire ?

Peut-être rien du tout. Il me faut quelque chose de chouette. Je suis devenu plus sélectif. J’ai souvent été loin de chez moi et il y a des limites.

Le Maroc aurait été agréable ?

Ça me paraissait être un beau défi et ce n’était que pour un an. Je pouvais travailler depuis les Pays-Bas. L’équipe n’a rien gagné depuis dix ans. En hiver, le Maroc organise la Coupe d’Afrique des Nations, je connais la plupart des joueurs et leur mentalité. Je pensais pouvoir les remuer mais, comme l’Irlande, le Maroc a préféré un compatriote, ce que je puis comprendre.

Profiter de la vie

Vous paraissez très calculateur dans vos choix : il vous faut des perspectives de gloire, ce qui n’était pas évident en Irlande ?

Non, mais j’adore ce pays, l’ambiance qu’y dégage le football, le fanatisme des gens et en plus, l’hymne national est magnifique. Les internationaux évoluent tous en Angleterre. C’est merveilleux… Ça me plaisait vraiment et j’ai vraiment regretté que le deal ne se fasse pas.

Votre carrière ne ressemble-t-elle pas un peu à Alice au Pays des Merveilles ?

J’ai toujours adoré prendre l’avion, quelle que soit la longueur du vol. Je me suis retrouvé dans les airs des centaines de fois et pourtant, il y a deux semaines, mon voyage au Maroc m’a beaucoup plu. J’aime découvrir les gens, voir ce qui les motive, d’où ils viennent. Beaucoup de gens croient que je passe mon temps, jour et nuit, à visionner des DVD de matches. Je ne me déferai jamais de cette étiquette et je ne dis plus rien mais en fait, je profite de la vie. Avant, évidemment, je me suis astreint à ces analyses, je voulais tout savoir sur mes adversaires. J’étais sous l’influence de Rinus Michels, qui était terriblement maniaque. Je n’acceptais pas la moindre surprise car mes adversaires ne pouvaient en aucun cas en savoir plus que moi.

Pourtant, votre perfectionnisme surprend tout le monde.

J’ai appris qu’il ne faut jamais penser qu’on contrôle tout car en un instant, on peut tout perdre.

Vos détracteurs prennent plaisir à rappeler que vous n’avez rien gagné de concret ces dernières années…

Il fallait bien trouver un point négatif… Le PSV avait placé la barre très haut, comme moi. Nous avons loupé le titre, ce qui n’était pas bien mais nous avons atteint le tour préliminaire de la Ligue des Champions, conformément à nos objectifs. Nous avons développé un football attractif et marqué 105 buts. Certains entraîneurs terminent deux fois deuxièmes et sont portés en triomphe. Je vois les choses sous un angle différent. Je pense avoir gagné quinze trophées durant ma carrière. J’ai été sacré champion dans trois pays différents. La vie ne m’a pas fait de cadeau, vous savez. Les gens qui estiment qu’un prix en Écosse ne vaut pas grand-chose n’y sont sans doute jamais allés. On peut toujours tout démolir quand on en a envie.

Vous avez maintenant 66 ans.

Je ne les sens pas.

Jusqu’à quel âge est-il réaliste de continuer ?

Je ne sais pas où Dieu a fixé la limite. En plus, j’ai du mal à me distancier du football et de ses rituels. Je ne suis pas du genre à prendre de longues vacances. Aussi belle soit une ville, j’en ai assez vu après deux jours et je m’ennuie. Un moment donné, je me demande ce que je vais faire le lendemain. En football, tout est programmé. J’ai du mal à imaginer quelque chose moi-même, pour être franc. En fait, je suis toujours d’un naturel agité. Je parviens toujours à toucher mes joueurs, aussi. Quand je n’en aurai plus le sentiment, je prendrai ma pension.

PAR YOERI VAN DEN BUSKEN – PHOTOS :BELGAIMAGE

 » Il ne faut jamais croire qu’on contrôle tout car en un instant, on peut tout perdre. « 

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