» JE PRÉFÉRAIS LA BOXE « 

En 2011, on le croyait perdu pour le football. Pour survivre, Maxime Chanot a travaillé comme serveur et comme déménageur. Aujourd’hui, c’est dans la défense de Courtrai qu’il fait le ménage.

« Je suis hyperactif, je ne tiens pas en place. Je vais au fitness, je vais courir et je tape sur un sac de boxe mais c’est très difficile à vivre pour les autres. J’ai déménagé parce que les voisins ne supportaient plus le bruit que je fais. J’ai essayé de suivre des cours de néerlandais à l’Université de Lille mais je suis parti après une heure. Pareil si je vais au cinéma avec ma femme. Mon père est mort quand j’avais cinq ans. J’ai eu une enfance et une adolescence très difficiles. Le foot, ma femme et la foi m’ont sauvé.  »

LA BAGARRE

 » Quand j’étais petit, j’aimais bien la bagarre. Il me manquait un père pour me remettre à ma place. Heureusement, le sport m’a aidé à canaliser mon énergie. J’ai fait du foot et de la boxe. Je préférais la boxe mais j’étais meilleur au foot. Quand j’ai pu intégrer le centre de formation de Nancy, mes problèmes de comportement à l’école ont diminué. Je me tenais à carreau car j’avais peur de ne pas pouvoir jouer le week-end. A 14 ans, Nancy n’a plus voulu de moi et je suis allé à Reims. C’est là que tout a vraiment commencé pour moi.

Au début, pourtant, ça n’allait pas. J’avais besoin qu’on m’encourage, pas qu’on me lance des défis. Plusieurs fois, j’ai été à deux doigts du renvoi mais je ne voulais pas décevoir ma mère. La deuxième année, Antony Ramel, mon coach, m’a appris la rigueur, le professionnalisme. Et la troisième saison, j’ai été appelé dans l’équipe de D4. L’arrière droit s’est blessé, j’ai joué et un scout de Sheffield United qui était venu voir un joueur de Sedan m’a repéré. Deux semaines plus tard, je signais un contrat de trois ans en Premier League.  »

PREMIER LEAGUE

 » Le fossé était trop grand. Mon anglais était si mauvais que, même quand je disais Good morning, la seule chose que je connaissais, ils ne me comprenaient pas. On m’a dit qu’on allait me préparer pour que je puisse jouer en équipe première la troisième saison mais on m’a prêté à des petits clubs et j’ai perdu la tête. Je sentais que je n’étais pas prêt.

Aujourd’hui, je me dis que je n’ai pas été bien entouré. Je faisais n’importe quoi, mes seuls exemples étaient Christian Nadé et David Sommeil, qui roulaient en Lamborghini.

Après deux ans, on m’a dit qu’on ne croyait plus en moi. J’ai passé un test à Leeds mais je me suis tordu la cheville. Des agents m’ont dit de rompre mon contrat pour être libre, j’ai fait l’erreur de les écouter : je n’avais plus de revenu et plus d’assurance. Or, je devais aider ma mère et payer les études de droit de ma copine.  »

 » J’ai retrouvé du boulot au Mans puis à Gueugnon mais je me suis cassé le pied. Je suis resté trois mois et demi à l’hôpital, je ne voulais plus entendre parler de football. Ma copine était désespérée et est allée travailler dans un restaurant pour payer ses études. Nous habitions dans un tout petit studio à Montpellier, avec un divan et une table. Mon cousin dormait sous la table. Quand je suis sorti de l’hôpital, j’arrivais à peine à marcher. Puis, petit à petit, j’ai refait du sport et je me suis dit que c’était quand même la seule chose que je savais faire. Je n’avais plus rien : je travaillais comme serveur ou comme déménageur pour gagner un peu d’argent.  »

SMS DU DÉSESPOIR

 » Un soir, en encodant des numéros dans mon GSM, je suis tombé sur celui de Michel Farin, le président du White Star. Je l’avais rencontré quand je jouais à Sheffield et nous avions échangé nos coordonnées. Ma femme m’a dit de lui téléphoner mais je ne voulais pas : il était 22 heures et il avait sans doute oublié qui j’étais. J’ai envoyé un SMS. Cinq minutes plus tard, il me rappelait. Le White Star venait de monter et cherchait des joueurs.

J’ai débarqué à Woluwé dans une maison insalubre. Il y avait même de la pisse sur les murs. L’argent gagné au cours des trois premiers mois, je l’ai consacré à rembourser mes dettes. Ma femme a gagné un prix de 2000 euros à l’Université, ça m’a permis d’acheter un frigo. Ma chance a été de tomber sur Felice Mazzu, qui a cru en moi. Après, tout s’est enchaîné : le Beerschot, Courtrai, l’équipe nationale du Luxembourg… J’ai même inscrit un but à Buffon.

A Sheffield, je dépensais tout mon argent. Aujourd’hui, je suis très économe. Il y a quatre ans, je n’avais plus rien. Aujourd’hui, je possède plusieurs appartements. Ma femme a connu un parcours identique. Elle est de Madagascar. Nous nous sommes rencontrés il y a dix ans à Reims. Aujourd’hui, elle est avocate à Paris. C’est ma princesse. Je l’ai épousée en 2011. Un mariage très modeste parce que nous n’avions pas d’argent. Les 4, 5 et 6 juin, nous organiserons une grande fête avec 150 invités à Montpellier.

A chaque fois que je monte sur le terrain, je repense à tout ce que j’ai vécu. Ça m’aide à me dire que personne ne passera. Je connais mes qualités. Et je sais que je ne suis pas seul. Avec l’aide de Dieu, on se sort de toutes les situations difficiles. J’ai commencé à prier quand j’étais dans le trou. A l’hôpital, une infirmière m’a amené une Bible. Aujourd’hui, je sais que les épreuves m’ont changé. La foi, c’était le chaînon manquant.  »

PAR CHRISTIAN VANDENABEELE – PHOTO KOEN BAUTERS

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