» Je peux arriver très haut « 

L’artiste brugeois devrait quitter notre championnat au terme de celui-ci. Le temps donc de mettre les choses au point à l’heure du money-time. Entretien.

Si au sud du pays, c’est Axel Witsel qui recueille tous les suffrages, au nord, Ivan Perisic détient depuis plusieurs semaines la toute grosse cote. Buteur, passeur, bon jeu de tête, pied gauche-pied droit, sur l’aile ou au milieu, le Croate donne l’impression de savoir tout faire. Face à Anderlecht, il y a dix jours, il a crevé l’écran : un but, un assist, et une menace incessante pour une défense bruxelloise aux abois.  » C’était mon match le plus abouti depuis que je suis au Club.  » Mais pas question pour le récent international d’être paralysé par un futur transfert que l’on dit en bonne voie. L’homme est bourré de confiance. Et il nous explique pourquoi.

Comment expliques-tu ta montée en puissance depuis plusieurs mois ?

Ivan Perisic : Je ne sais pas. Je crois que c’est toute l’équipe qui monte en puissance et j’en bénéficie tout simplement.

Dans quels domaines as-tu progressé depuis ton arrivée à Bruges ?

J’ai acquis de l’expérience, dont je manquais cruellement. Bruges et Roulers, c’est incomparable. J’ai aussi disputé pas mal de rencontres européennes, ça m’a permis de prendre confiance. Au niveau physique, je me suis développé. J’ai gagné environ trois kilos de masse musculaire.

Ces derniers mois, on est frappé par ton explosivité. A ton arrivée à Bruges, ce n’était pourtant pas ta principale qualité.

Je suis le premier surpris. Quand je vois les tests réalisés en début de saison, j’étais quasiment premier au sprint. Avant c’était plutôt au niveau endurance que je me distinguais. Le fait que je joue désormais à gauche et non plus au milieu explique peut-être ce changement.

Le flanc gauche est-ce ta meilleure place ?

Non, je pense toujours que c’est au milieu. Et pas vraiment à une place en particulier, je peux me débrouiller n’importe où. Au milieu, je me sens plus libre.

Ton manager dit d’ailleurs que tu es davantage un 8 qu’un 10. Qu’est-ce que tu en penses ?

Je suis capable de faire le box-to-box ; j’aime être devant le but mais je sais également défendre. Aujourd’hui, toutes les grosses équipes cherchent ce type de joueurs très complets.

Dortmund te voit plutôt comme joueur de flanc ou milieu de terrain ?

Je ne sais pas, je n’ai parlé avec personne de ce club. D’ailleurs, je ne peux pas le faire car j’ai encore un contrat de quatre ans ici. Si un club est intéressé il doit s’adresser aux dirigeants brugeois, pas à moi.

D’après le journal allemand Bild, il est même acquis que tu as signé à Dortmund pour six millions. Seuls  » des petits détails restent à régler « , est-il écrit.

Je me répète, je n’ai parlé avec personne. Peut-être que mon manager l’a fait. Moi, je n’ai rien entendu.

Y a-t-il un championnat qui te tente en particulier ?

Pas vraiment. Mais je ne sais pas si j’ai déjà le niveau pour prester en Angleterre. Là-bas c’est le top niveau, il faut être à 100 % à tous les matches. Je préférerais une étape intermédiaire.

Comme le championnat allemand ?

Je crois que ce serait l’étape idéale.

Dortmund, qui devrait être sacré champion, ce n’est pas viser trop haut ?

Non pas du tout. Je sais que si je travaille correctement je peux gagner ma place n’importe où.

Ton sélectionneur, Slaven Bilic a même déclaré que le Borussia serait pour toi l’équipe idéale grâce à ses jeunes et son jeu offensif.

Chacun son opinion. Mais c’est vrai que c’est une belle équipe.

Sortie de crise et sortie en boîte

Comment expliques-tu le fiasco brugeois sur l’année 2010 ?

La saison dernière, on s’est effondré en fin de championnat et on a perdu notre 2e place au profit de Gand lors de la dernière journée. Le groupe a connu des difficultés à passer au-dessus de cette déception. En octobre-novembre, les résultats n’étaient pas bons, les supporters ont fait savoir leur mécontentement. Moi, j’ai été attrapé par cette sortie en discothèque, ce qui n’a rien arrangé. Mais toute cette histoire fut gonflée : je ne suis resté qu’une heure sur place et je n’ai rien bu ; rien de dramatique.

Le timing n’était quand même pas terrible : la veille d’un match perdu au Beerschot 2-1. Le risque était quand même grand que cela te retombe dessus…

J’avais dormi l’après-midi environ quatre heures. Le soir, je n’étais évidemment plus fatigué et j’ai donc demandé à mon ami qu’on sorte une heure, rien de plus. On savait qui était là-bas ce soir-là. Didier Drogba, Nenad Jestrovic. Si on avait gagné personne n’aurait évoqué cette sortie. Au final, je me suis excusé, j’étais en tort mais ce n’était pas grand-chose, d’autant qu’on jouait le lendemain à 20 h 30.

On a beaucoup critiqué cette saison la mentalité du groupe. Y a-t-il trop de fortes têtes à Bruges ?

Beaucoup de joueurs viennent de pays différents, il faut arriver à accepter que les caractères ne sont pas les mêmes.

La presse a aussi épinglé l’incident avec Jeroen Simaeys où en plein match tu lui donnes une petite baffe au visage.

Je sais que je n’aurais pas dû réagir comme ça mais ça ne serait jamais arrivé s’il ne m’avait rien dit. Ses paroles je les garde pour moi. Aujourd’hui le différend est aplani.

Tu te définis comme quelqu’un d’explosif ?

On dit que les Croates de l’Adriatique ont une mentalité un peu chaude ( il rit). Mais je crois que cette personnalité me sert davantage qu’elle me dessert dans le monde du foot. Quand ça ne va pas, il faut parfois hausser la voix.

Pourquoi es-tu parti si jeune de l’Hajduk Split ?

Je voyais que j’étais barré, qu’on ne voulait pas faire confiance. Ou alors il fallait jouer pour moins de 1.000 euros par mois, alors que le club donne des salaires de 300 à 400.000 euros par an pour des joueurs étrangers de 35 ans. Et pourtant il y a un talent monstre dans cette partie de la Croatie. Mais il faut s’exiler si un jeune veut jouer. Même Luka Modric a dû se rendre au Dynamo Zagreb pour avoir sa chance. A Split, on le trouvait trop petit, trop maigre. Aujourd’hui, c’est encore pire qu’avant.

Pourquoi ça n’a pas fonctionné par après à Sochaux ?

A l’époque, j’avais choisi ce club car c’était celui qui me voulait le plus ( NDLR, il avait également été testé à Anderlecht pendant 2 semaines), leurs dirigeants étaient venus à Split en jet privé pour me signer. Le hic, c’est que le coach qui m’avait fait venir (Alain Perrin) est très vite parti à Lyon. Le coach qui l’a remplacé a amené avec lui ses joueurs et je n’ai jamais eu ma chance.

Et le Barça dans tout ça ?

Pendant un match, tu donnes l’impression d’avoir une énorme confiance en toi, tu n’hésites pas à tenter des gestes difficiles.

Quand je monte sur le terrain, c’est avec la gagne. Je crois en mes qualités, je sais que si j’acquière de l’expérience, que je multiplie les matches de haut niveau, que ce soit avec l’équipe nationale ou en Coupe d’Europe, je peux arriver très haut.

Bilic, ton sélectionneur, qui déclare :  » Ivan a été accepté immédiatement par les autres joueurs parce qu’ils ont vu qu’il avait du talent « . Ou Ivan Leko ou Wesley Sonck qui s’étaient dits impressionnés par ton potentiel dès ton arrivée à Bruges. As-tu le sentiment d’avoir ce petit truc en plus ?

Je sais que je peux faire la différence. Si j’ai confiance en moi, je peux faire de très grandes choses. Je n’ai jamais peur, c’est peut-être ma plus grande qualité.

Devenir meilleur buteur du championnat, ça compte beaucoup pour toi ?

Non, sincèrement je ne pense pas à ça. C’est bien pour ma page Wikipedia mais ça ne m’obsède pas. Je ne vais pas changer mon jeu en fonction de ça. Les passes décisives ça me procure toujours autant de plaisir.

T’es mûr pour l’étranger ?

Je crois oui. Il faut penser à sa carrière. L’an dernier, j’avais déjà des propositions d’Allemagne et de Turquie mais avec Luc Devroe, on a décidé qu’il était préférable de rester encore un an. Mais je ne vais pas repousser ma décision moment éternellement. Je crois que c’est le moment.

Des journalistes croates ont même évoqué l’intérêt de Barcelone…

C’est possible, pourquoi pas ? Je sais aussi que des grands clubs comme le Barça ont énormément de scouts. Je ne suis certainement pas le seul qu’ils suivent,… si c’est le cas.

PAR THOMAS BRICMONT

 » Meilleur buteur, c’est bien pour ma page Wikipedia mais ça ne m’obsède pas. « 

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