» Je n’aurai peut-être plus besoin de quatre occasions pour un but mais de… deux ! »

Après avoir disparu de la circulation la saison dernière, l’ex-attaquant du Standard semble avoir retrouvé tout son peps. Explication d’un retour en grâce.

Comment expliques-tu ces douze derniers mois difficiles ?

Aloys Nong : Quand je suis arrivé à Mons en janvier dernier, je n’étais pas bien physiquement, ni mentalement. Je n’oublierai jamais les bons moments au Standard. J’aimerai toujours ce club pour son public, pour ce qu’il dégage. Mais je n’oublierai pas non plus que j’y ai été traité comme un animal.

Le terme est quand même fort, non ?

Quand on envoie les trois-quatre parias s’entraîner avec un coach des U18 voire U16, on vous manque de respect. Non pas que les coaches nous délaissaient, au contraire, ils nous entraînaient sérieusement, ils comprenaient notre ressenti. J’ai d’ailleurs une pensée émue pour Guy Namurois qui a été super important à cette période. C’était un vrai pro et quand il nous a pris en charge, il nous considérait comme de vrais joueurs du Standard…

Quelles différences pointes-tu entre la période Duchâtelet et D’Onofrio ?

Sous D’Onofrio, il n’y a jamais eu de fausses promesses. Ça n’a pas toujours été facile mais on se sentait soutenu, notamment par Sergio Conceiçao. Il nous faisait passer des messages forts, tout le monde se sentait concerné. Et Dominique ne m’a jamais dit : -Je vais faire de toi mon attaquant, avant de me poignarder dans le dos. Quand il y a eu ce changement de direction, je pensais que j’allais pouvoir continuer sur la lancée de mes play-offs. Je n’ai jamais rien réclamé mais c’est José Riga qui m’a annoncé que je figurais parmi les trois attaquants et que je devais rester. Pierre François m’a parlé d’une offre d’un club turc durant l’été mais m’a dit aussi que le club se refusait à mon départ. Le 16 octobre, quand on prend le 5-0 à Anderlecht, j’étais en tribune. Je n’ai évidemment pas compris pourquoi. J’avais raté un face à face décisif avec le gardien lors d’un match au Beerschot et j’ai l’impression que Riga ne l’a jamais digéré… Il en a parlé dans les journaux, tout comme le penalty manqué de Berrier face à Bruges. Il pointait les joueurs dans les journaux mais n’osait pas vous le dire en face. Je voyais bien aussi que certains joueurs avaient plus de crédit que d’autres. Ça a été une grande déception personnelle car je n’ai pas le sentiment d’avoir réussi dans ce club alors que je pense que j’avais les qualités pour.

 » Riga pointait les joueurs dans les journaux mais n’osait pas le leur dire en face « 

Duchâtelet n’a-t-il pas voulu privilégier les jeunes comme ça a souvent été dit ?

Que ce soit Marouane Fellaini ou Axel Witsel, ils ont été introduits progressivement. Laszlo Bölöni n’a, par exemple, jamais hésité à mettre Axel ou Steven Defour sur le banc. On les préparait sans les brûler. Moi, j’avais 28 ans à mon départ du Standard et j’étais soi-disant trop vieux… Mais on ne m’a jamais donné la véritable raison de mon éviction. Qu’on me dise : – Aloys, t’as pas le niveau. OK. Mais ça n’a jamais été le cas.

Comment décrirais-tu Riga comme coach et comme personne ?

Question foot, on voit que c’est quelqu’un qui a des idées intéressantes, qui aime le beau jeu. Ses entraînements étaient variés, on ne s’ennuyait pas. On sent également que c’est quelqu’un d’intelligent. Et comme homme, il m’a fait une bonne impression au début. Il a voulu parler avec tout le monde en tête à tête. Seulement, c’est impossible de tenir les promesses faites à chacun du groupe. J’ai commencé à me méfier de lui quand je me suis rendu compte qu’il tenait le même discours à tous les joueurs.

Tu prévoyais que le Standard allait connaître une saison difficile ?

La nouvelle direction a voulu couper tout lien avec l’ère D’Onofrio. Tu perds Witsel, Defour, Mangala, Carcela, ça fait beaucoup. Puis tu écartes Leye, Berrier, moi, Camara qui sortait de superbes play-offs. La nouvelle direction a directement parlé de saison de transition et c’est dommage pour un club comme le Standard. Ça ne devrait pas arriver. Sous D’Onofrio, les idées étaient présentes pour figurer dans le top 3 belge pendant dix ans. Malheureusement, on est loin du compte.

 » J’ai trainé mes problèmes personnels pendant trois mois « 

Ton arrivée en janvier à Mons n’a pas marqué les esprits d’autant que Perbet plantait des buts à la pelle…

Et heureusement que Jérémy marquait autant ! Ça m’enlevait de la pression et puis la direction a toujours été très claire : j’ai été acheté en vue de la saison actuelle. En 2011-2012, mes prestations n’ont pas été optimales mais quand on n’est pas bien dans la tête, les jambes ne suivent pas. J’ai trainé mes problèmes personnels pendant trois mois. Quand Enzo Scifo est arrivé, il m’a dit directement qu’il voulait que je me projette vers la saison d’après.

Qu’est-ce qui t’a marqué chez Scifo ?

Quand il est arrivé, il a donné sa chance à tous les joueurs. Il a fait comprendre au groupe que tout le monde était important. C’est stimulant pour la confiance d’une équipe et les joueurs ont pu se rendre compte que Scifo est un homme de parole. C’est ce qui explique nos bons play-offs notamment. On me dit souvent : tu fonctionnes aux sentiments. Mais je ne pense pas être le seul à aimer me sentir concerné… J’ai aussi été impressionné par son côté très pro. Il suffit de voir physiquement comment il est encore aujourd’hui, ça dit beaucoup. Il ne nous lâche pas concernant la récupération, la diététique. Il nous le répète sans arrêt : ton corps, c’est ton arme.

Humainement comment décrirais-tu ton coach ?

L’exemple, c’est Benjamin Nicaise. Je le lui répète souvent que quand j’étais à Malines, Nicaise était pour moi l’un des meilleurs milieux défensifs de Belgique. Mais quand je suis arrivé à Mons, je ne l’ai pas reconnu. Il était à la ramasse que ce soit physiquement ou mentalement. Dès que Scifo est arrivé, il a fait de lui son capitaine, son meneur. Benjamin est très écouté dans les vestiaires parce que c’est un garçon vrai.

Grande gueule aussi…

Oui, il a une grande gueule parce qu’il dit ce qu’il pense mais je crois que c’est quelqu’un de très juste. Dans le foot, on n’aime pas les gens qui disent la vérité. On préfère les girouettes.

 » On sent que Scifo a envie d’aller à la guerre avec toi « 

La méthode Scifo, elle consiste en quoi ?

On travaille beaucoup le jeu offensif. Tout doit être parfaitement maîtrisé, pour lui le hasard dans le foot ça n’existe pas. Le simple fait de faire une passe doit avoir un sens. Il travaille énormément sur la réactivité des joueurs. Et il trouve les mots justes pour te motiver. Il m’a dit qu’au meilleur de ma forme que j’étais physiquement et mentalement parmi les cinq meilleurs attaquants du championnat… Ce genre de remarque vous booste. On sent qu’il a envie d’aller à la guerre avec toi.

Son style se rapproche de quel entraîneur que tu as connu ?

Hein Vanhaezebrouck. Lui comme Scifo sont des coaches qui aiment le beau jeu, qui sont très proches des joueurs et qui sont d’excellents motivateurs. Au niveau de la gestion, Enzo est encore plus strict.

Il lui arrive de taper du poing sur la table ?

Bien sûr même si ça n’arrive pas souvent. En match de préparation face au PAOK Salonique, on est mené 0-1 à la mi-temps. Enzo commence à m’engueuler dans les vestiaires. Je ne comprenais pas car j’avais le sentiment de faire un bon match. Il m’a expliqué après coup qu’il voulait que je tire davantage l’équipe vers le haut. Mais Enzo n’est pas un coach qui aime les gueulantes. Il n’en a pas besoin, il est très respecté et aime le dialogue. Avec Dennis van Wijk, que je peux difficilement juger car je ne l’ai pas longtemps connu, c’était différent. Il ne donnait pas la parole aux autres. C’est un coach monologue. Il me fait un peu penser à Peter Maes.

Les secrets de Perbut

Comment juges-tu ton toujours coéquipier, Jérémy Perbet ?

Ce n’est pas donné à tout le monde de mettre 25 buts sur un championnat dans un club qui ne joue pas le haut de tableau. Jérémy a énormément de qualités. Quand on parle de vrai buteur en Belgique : il y a lui et Jelle Vossen. Je suis sûr que s’il revient dans le parcours, il va encore nous apporter beaucoup. Je respecte ce qu’il a réalisé l’an dernier mais j’ai aussi dit au coach que ma meilleure place, c’était numéro neuf.

Aimerais-tu qu’il reste ?

Pour l’équipe, pour le public, ce serait très bien. Pour Jérémy, c’est différent. Si j’étais à sa place, je régirais de la même façon que lui. Après avoir inscrit 25 buts, on a envie de s’en aller et de monnayer son talent. C’est tout à fait normal que Jérémy cherche à partir.

Pourquoi as-tu signé à Mons alors que tu pouvais rejoindre Genk ou te retrouver à l’étranger ?

Avant de signer à Malines, j’avais déjà failli signer à Mons. Et en janvier, Mons était le seul club qui pouvait accepter Aloys Nong dans l’état de forme dans lequel il était. Quand on est un renfort, on est censé normalement apporter un plus. Mais ici, j’ai pu revenir dans le parcours à mon rythme. A Genk, j’aurais dû être directement opérationnel et je pense que j’aurais eu des problèmes à l’être…

 » Je ne quitterai pas la Belgique par la petite porte « 

Après toutes ces années en Belgique, n’as-tu pas envie de changer d’air et de découvrir un autre championnat ?

Je ne veux pas partir sur une fausse note. Quand j’ai quitté le Standard, c’était par la petite porte. Et quitter la Belgique de cette façon ne m’aurait pas plu. La Belgique, c’est mon deuxième pays, ma femme est belge, mon enfant est né ici. Mais il est clair que cette saison est très importante pour mon futur, je parle évidemment de l’aspect financier car j’ai 29 ans. Si j’apporte beaucoup au club, j’ai la certitude d’être récompensé. C’est pourquoi marquer est très important.

Cette obstination du but doit être compliquée, non ?

Le fait de marquer lors de la journée d’ouverture a été une délivrance. Un but peut conditionner une saison. Face à l’OHL, j’avais raté une très grosse occasion en début de match, j’ai regardé les cieux et me suis dit : -Ç a y est, ça a recommencé ! Ce but doit me redonner confiance pour la suite…

Que réponds-tu à ceux qui disent que tu as besoin de beaucoup d’occasions pour marquer…

Qu’ils n’ont pas tort ( il rit). Mais que les choses vont peut-être changer et j’espère les contredire.

Qu’est-ce qui te différencie d’un Perbet ?

Je bouge davantage, je perfore. Nos styles sont différents. Il est toujours très lucide devant le but, c’est un joueur de surface. Il peut rater sa frappe, elle finit dedans. C’est ça un buteur. Mons en possède un autre qui deviendra le nouveau Roussel : Dylan De Belder. Il doit encore progresser techniquement mais il va très vite et est très fort devant le but. De mon côté, avec ce que j’ai vécu, avec l’expérience acquise, je me dis que je n’aurai peut-être plus besoin de quatre occasions pour un but mais de… deux ( il rit).

PAR THOMAS BRICMONT – PHOTOS : IMAGEGLOBE

 » J’ai commencé à me méfier de Riga quand j’ai vu qu’il tenait le même discours à tous les joueurs. « 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire