« Je joue mal au golf, mais je suis douée »

18 mois après sa retraite sportive, l’ex-neuvième joueuse mondiale a résolument tourné le dos au tennis.

C’est le 15 juillet que le club de golf près de Bornem de Bart Van Roost et Dominique Monami est officiellement inauguré. Fidèle à son habitude, Bart préfère laisser à son épouse le soin de communiquer. Lui, il monte une armoire, vérifie les nouveaux tracteurs et s’assure que le driving range ( l’espace d’entraînement aux longs coups) est tip top. « Vous savez très bien que Dominique fait cela mieux que moi », nous sourit-il, reconnaissant qu’il n’a pas changé en 18 mois.

La championne non plus n’a pas changé. Physiquement, du moins. Elle est toujours aussi mince. Mentalement, par contre, elle semble plus sereine. Pourtant, le défi qu’elle se lance alors qu’elle aurait pu couler des jours heureux et sans soucis pourrait la tracasser.

Vous avez arrêté il y a un peu plus d’un an et demi. Depuis, vous avez donné naissance à la petite Ines et, alors que vous pourriez couler des jours tranquilles, voilà que vous et votre mari vous vous lancez dans une aventure golfique. On aurait pu croire que vous alliez rester trois ou quatre ans sans rien faire…

Dominique Van Roost: Au milieu de l’année passée, alors que l’on terminait l’année sabbatique que l’on s’était octroyée après plus de cinq ans passés ensemble sur le circuit, on s’est rendu compte que l’on avait besoin de faire quelque chose. Or, comme nous ne désirions pas investir dans le tennis, nous nous sommes tournés vers le golf.

Vous n’avez pas imaginé vous lancer dans une entreprise tennistique qui aurait tout de même été plus simple?

Si, on a bien envisagé d’ouvrir une école de tennis ou autre chose mais on s’est dit que cela ne servait à rien de retomber dans le même circuit, avec des têtes que l’on connaissait. De même, nous voulions absolument rester indépendants et ne pas dépendre d’une hiérarchie. Comme on est tous les deux passionnés de golf, surtout Bart, nous avons donc décidé de nous lancer dans ce projet. Dans un premier temps, nous avions pensé établir notre club près de Roulers, pas loin de notre ancienne maison mais, par la suite, nous avons réussi à conclure un accord avec la ville de Bornem où dans un premier temps nous avons un driving range en attendant un six trous. La pension à 50 ans

Financièrement, vous auriez sans doute pu vivre de vos rentes? Or, ici, vous prenez tout de même un risque.

C’est un challenge. Nous voulions créer quelque chose, ne pas aller vers un travail trop facile. J’aurais sans doute pu représenter une société mais tel n’était pas mon objectif.

Avez-vous eu beaucoup de propositions depuis votre fin de carrière?

Non, aucune. En fait, j’avais tellement été claire que les gens ont compris qu’il ne servait à rien de venir frapper à ma porte. De plus, tout le monde savait que j’étais enceinte et que je ne voulais pas travailler dans l’année qui suivait ma retraite sportive.

Qu’est ce qui vous a manqué après cinq années passées sur le circuit?

A un moment, on s’est ennuyé. On s’est rendu compte que nous n’étions pas capables de rester à la maison à se tourner les pouces. A notre âge, si on ne travaillait pas, que nous resterait-il dans la vie? C’est vrai, on a gagné beaucoup d’argent mais et après?

Vous auriez pu être rentiers?

Non, franchement, non. Même quand on a gagné beaucoup d’argent, si on ne fait rien, les sorties sont énormes. Je n’aurais pas pu continuer à vivre au même rythme si je ne travaillais plus. J’ai évidemment gagné des millions mais, maintenant que je n’ai plus de rentrées, j’ai encore pas mal de frais. Il ne faut pas oublier que, du jour au lendemain, tous mes contrats ont été stoppés.

Il n’y a pas de pension?

Si, mais je ne pourrai la toucher que lorsque j’aurai 50 ans…

Comment se passaient vos journées lorsque vous n’aviez rien à faire?

Il y a des jours où on se lève en se demandant ce que l’on va faire. Quand on a appris que notre premier projet à Roulers ne se ferait pas, nous avons vécu trois mois assez difficiles. On a réfléchi à toutes les possibilités qui se présentaient par rapport à nos désirs et il y avait vraiment très peu de choix. Donc, le moral n’était pas au beau fixe. D’autant, je le répète, que nous nous refusions de retourner dans le monde du tennis.

Pour quelles raisons?

Ce n’est pas la vie du tennis qui me dérangeait mais tout le monde sait que je n’aimais pas trop les gens qui faisaient ce monde. Je n’allais donc pas y retourner de plein gré. Depuis que je suis professionnelle et même avant, j’ai toujours trouvé malsain le système politique du tennis belge. J’ai, je crois, toujours été un peu rebelle dans le milieu même si je sais que j’ai profité du système. Je faisais partie de ce système mais je ne me sentais vraiment pas en symbiose avec lui.Femme d’affaires

Qu’est ce qui vous plaît dans ce nouveau projet?

Quand je jouais au tennis, c’était une passion et, ici, je ressens à nouveau de la passion pour cette nouvelle vie.

Quelle est-elle, cette nouvelle vie. Que fait, aujourd’hui, Dominique Van Roost?

Je suis devenue une femme d’affaires. J’ai beaucoup de contacts, ce qui n’était pas le cas quand j’étais pro. Les personnes que je rencontrais dans le tennis ne me parlaient que de mon sport alors qu’aujourd’hui, j’ai un réel contact avec les gens.

Les gens ne sont pas surpris de vous voir sous votre nouveau visage?

Si. Récemment, il y a encore un policier qui a dit à Bart qu’il était surpris que je sois gentille alors qu’il pensait que j’étais une chipie. Je ressens que les gens que je rencontre pensent souvent au départ que j’ai un caractère très compliqué, très sévère. Il est vrai qu’avec ce que l’on a écrit sur moi, ce n’est pas vraiment étonnant.

Après combien de temps vous pose-t-on la première question concernant le tennis?

En général, mes interlocuteurs attendent tout de même que nous ayons fini notre entretien professionnel mais, normalement, à la fin de chaque discussion, on en vient effectivement au tennis.

Et on vous dit, sans doute: -C’est pas mal, hein, ce que font Kim et Justine?

(Elle rit) Plus précisément, on me demande ce que j’en pense… C’est original, non? Mais tout de même, beaucoup me félicitent pour ma carrière.

Quand vous prenez le premier contact avec vos fournisseurs ou vos sponsors, il y a tout de même une surprise de vous voir intégrer le monde du golf plutôt que celui du tennis?

Non, je dois dire qu’en général, la surprise n’est pas visible.

Quel sera votre rôle dans la gestion de votre club?

Je m’occuperai de toute l’intendance du club, des fournisseurs, de l’horeca et de la communication. Bart, lui, s’occupera plus précisément du golf et de la gestion du personnel.

Pas si difficile que cela

Vous avez les compétences pour remplir ces missions?

Je les acquiers au fur et à mesure. C’est vrai que je regrette de n’avoir pas pu suivre des cours de comptabilité ou de gestion pendant ma vie professionnelle. A l’ATP, chez les messieurs, il y a des cours qui aident les joueurs lors de leur reconversion mais, chez les femmes, à la WTA, ce n’est pas encore le cas. Du moins, ce ne l’était pas quand j’étais pro. Du jour au lendemain, quand Bart est devenu mon entraîneur, il n’a plus vécu que pour moi et pour mon tennis. Il a fait de solides sacrifices et a réussi un super bon travail pour lequel je pense qu’il a été récompensé par les résultats que nous avons obtenus. Aujourd’hui, c’est terminé. Moi je sens que je consacre plus de temps à Bart et à ma famille alors qu’auparavant, tout était centré sur moi.

Vous avez éprouvé des problèmes pour retrouver vos marques?

On a mis un peu de temps mais ce n’était pas trop compliqué. Par contre, ce qui a été incroyable c’est que, du jour au lendemain, je n’ai plus ressenti le poids qui était sur mes poumons pendant toutes mes années de professionnalisme. C’était comme si je n’avais plus respiré pendant des années.

Deux ans plus tard, estimez-vous que vous étiez un peu trop parano?

En fait, j’avais bien trop peur. Je n’aurais jamais dû avoir peur, j’aurais dû me moquer de ce que les gens pensaient. Mais j’étais tellement susceptible que je suis devenue parano.

Vous le regrettez?

Oui, parce que cela m’a causé du tort. A moi-même. J’ai dû être plus agressive que je ne le suis vraiment car si j’avais été plus tendre, j’aurais été trop atteinte émotionnellement.

Ce poids, c’était le jeu ou la presse?

La presse. C’était terrible, terrible. C’est incroyable ce que l’on a écrit sur moi. Aujourd’hui, quand je lis les comptes rendus, je me demande pourquoi on m’a fait les pires emmerdements alors que, toutes les deux, elles font des trucs bien pires que moi et on ne leur reproche rien. Quand elles ratent un match, on ne dit rien. Moi, on m’enfonçait. Pourtant, elles ont une attitude 100 fois pire que la mienne. Quand j’ai confié mes affaires médiatiques à une tierce personne, je me suis fait assassiner dans les médias alors qu’elles sont bien plus protégées que je ne l’étais et on ne leur fait aucun reproche. C’est tout juste si on ne dit pas aujourd’hui que, finalement, Dominique Van Roost n’était pas aussi difficile que cela.Handicap 30

Cela vous énerve?

Bien sûr que cela m’énerve. Cela m’énerve parce que l’on m’interdisait des faits que l’on autorise sans réaction à Justine et Kim.

Mais en fait, vous le saviez, non, que vous prépariez le terrain pour Kim et Justine?

Oui, je le savais mais c’est tout de même énervant.

Revenons-en au golf, les gens vous demandent souvent si vous savez jouer?

On me demande effectivement si j’ai un handicap. Je réponds que je suis 30 et que je ne joue pas très bien. En fait, je suis mauvaise.

Vous n’êtes pas douée?

D’une part, je n’ai jamais eu le temps de jouer et, d’autre part, je ne cours pas après un meilleur handicap.

Mais vous êtes douée?

Oui, je pense, honnêtement.

Vous êtes moins nerveuse au golf que vous ne l’étiez au tennis?

Je suis moins nerveuse, certainement, mais si je commence à mal jouer, je râle. C’est terrible ce que je peux râler. En fait, je voudrais jouer très bien alors que je ne m’entraîne pas et que je n’ai aucune technique.

Lorsque vous étiez encore sur le circuit, Bart et vous aviez une double relation: mari/femme et coach/joueuse. Comment s’est passé le passage de l’un à l’autre? Le fait que le club va ouvrir douze mois par an veut-il dire que vous serez, Bart et vous, toute l’année au turbin?

Non, nous ne serons pas constamment présents. Nous ne voulons pas que les gens viennent pour nous mais bien pour la qualité du club. Nous avons un manager qui sera là quand nous serons absents.

Comment avez-vous été acceptés par le milieu du golf?

La plupart des gens du milieu estiment que nous n’y connaissons rien et que nous sommes des rigolos parce que nous ne sommes pas des leurs.

Vous vous êtes déjà disputés avec la fédé?

(Elle rit) Un peu oui.

Quel objectif poursuivez-vous avec votre club?

Le driving range et le club-house sont ouverts depuis le 15 juillet alors que le six trous le sera dans un an.

Vous aurez la possibilité de l’agrandir?

Oui, mais tel n’est pas le but.

Quelle sera la vie des Van Roost dans un an?

Nous habitons à Keerbergen, à une trentaine de kilomètres d’ici. Mon objectif est de gérer le golf et de passer un maximum de temps avec ma fille Ines. Je ne travaillerai pas tous les jours. Je suis aussi membre du comité des athlètes et du comité de sélection du COIB. On m’a fait aussi des propositions au niveau de la Communauté française mais c’est trop politique pour moi. Du moins pour l’instant.

Aucune chance, donc, de vous voir à la fédérationde tennis?

Non, rien du tout dans le tennis.

Bernard Ashed

« Les gens que je rencontre pensent souvent que j’ai un caractère très compliqué, très sévère »

« Kim et Justine font des trucs bien pires que moi et on ne leur reproche rien »

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