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 » Je dois être plus égoïste « 

Anderlecht peut en être certain : samedi, s’il marque, Isaac Thelin modérera sa joie. Le Suédois de 25 ans est cependant déterminé à prouver à Herman Van Holsbeeck et Cie qu’ils ont eu tort.

Isaac Thelin n’a pas mis longtemps à s’imposer à Waasland Beveren. Dans son premier match, contre Eupen, il a converti un penalty et délivré trois assists. D’emblée, le remplaçant de Zinho Gano a fait mieux que durant ses 25 matches pour Anderlecht, à la faveur desquels il n’a inscrit qu’un but.  » Jouer tout un match m’a fait du bien. Je n’entrais jamais que quelques minutes au jeu au Sporting.  »

Peut-on dire que tu es libéré depuis que tu es à Waasland Beveren ?

ISAAC THELIN : Philippe Clement m’a donné un conseil avant Eupen :  » Joue et amuse-toi.  » J’étais donc relax au coup d’envoi et ça s’est vu dans mon match. Ma première touche de balle a été bonne : j’étais lancé. Il ne faut pas sous-estimer l’aspect mental. Chaque lundi, j’entame une nouvelle semaine en sachant que je vais jouer le week-end. J’avais sans doute besoin d’un environnement moins concurrentiel. À 25 ans, il faut jouer. J’ai assez fait banquette à Bordeaux et à Anderlecht.

Tu as voulu tirer un penalty contre Eupen, dès le début. Parce que tu étais en confiance ?

THELIN : L’entraîneur m’a spontanément mis sur la liste des tireurs. Un attaquant ne demande que ça, évidemment ! Rudy Camacho est le numéro un mais il m’a gentiment cédé le ballon.

Tout le monde a été surpris qu’Anderlecht te transfère définitivement de Bordeaux pour te louer à Waasland Beveren.

THELIN : Je connaissais les projets d’Anderlecht, qui en avait discuté avec mon manager. J’étais disposé à signer un contrat de longue durée au Sporting et à jouer ailleurs mais avant d’accepter cette construction, j’ai eu un entretien avec Clement, pour être sûr que le courant passe entre nous. J’ai été surpris qu’il connaisse aussi bien mes points forts et mes points faibles. Mon style de jeu lui plaisait et j’allais apporter quelque chose à l’équipe. Quelques jours plus tard, j’ai dit oui.

Herman Van Holsbeeck a déclaré que tu avais eu suffisamment de chances et que tu n’étais pas un joueur pour Anderlecht. Ça te fait quelque chose ?

THELIN : Je me concentre sur Waasland Beveren. Je veux saisir ma chance ici. Au fond de moi, je sais que ma présence ici a une raison mais un club comme Anderlecht ne donne quand même pas un contrat de cinq ans à quelqu’un s’il n’est pas convaincu de son potentiel.

 » à Anderlecht, je me mettais trop de pression  »

Anderlecht t’a acheté pour te revendre plus tard avec un bénéfice. Les footballeurs sont devenus des produits.

THELIN : Les clubs détiennent le pouvoir. Si ça me gêne ? Bah, nous vivons notre rêve et nous sommes bien payés. Je ne vais donc pas me plaindre, surtout pas à la presse ! Vous voyez, je suis d’un naturel positif. À certains moments, j’ai été down mais j’ai continué à travailler dur.

Ce week-end, tu as l’occasion de montrer à Anderlecht qu’il t’a mal jugé.

THELIN : Les comptes sont vite faits : une victoire rapporte trois points, une défaite zéro. Ce n’est qu’un jeu. Je ne vais pas rapporter des points supplémentaires à Waasland Beveren parce que je joue contre mon ancien club.

Marquer le but de la victoire à la 90e ne serait-il pas la plus belle des revanches ?

THELIN : (sérieux) Je n’ai pas l’intention de fêter mon but avec exubérance. Pas plus que de provoquer le banc d’Anderlecht. Ça se retournerait contre moi. C’est simple : je suis sous contrat à Anderlecht et je dois respecter mon employeur.

À Anderlecht, tu recevais beaucoup de longs ballons et on te demandait de gagner des duels aériens. Tes qualités s’expriment-elles mieux dans le jeu de combinaisons courtes de Clement ?

THELIN : Je n’ai pas de préférence. Je joue mes matches, pour autant que je puisse me concentrer sur l’attaque. Je ne dis pas qu’Anderlecht ne jouait pas offensivement mais c’était différent… Ce n’est pas un hasard si j’ai immédiatement trouvé mes marques ici.

Tu devais beaucoup courir et travailler dans le football prôné par René Weiler.

THELIN : Ce n’était pas seulement le style de jeu. Je me mettais trop de pression. Que fait un avant qui reçoit vingt minutes ? Il veut se montrer, forcer les choses. C’est ce que j’ai fait : j’ai couru comme un fou, gaspillé mes forces et en un rien de temps, j’étais à bout de souffle. J’entends le même refrain depuis mon enfance : Isaac, tu dois être plus égoïste.

 » Mes statistiques sont mauvaises  »

Mais tu ne seras jamais un vrai killer. Tu as inscrit cinq buts durant ta meilleure saison à Malmö.

THELIN : C’est un aspect à améliorer, en effet. Mes statistiques sont mauvaises. Je ne compte pas mes mètres, ce que l’entraîneur et mes coéquipiers apprécient, mais ça ne figure pas sur mon CV. En fin de saison, les clubs ne regardent qu’une chose : combien de buts un attaquant a marqués. Je suis conscient qu’il ne sera pas facile de changer mon caractère mais je n’ai pas le choix si je veux améliorer mes stats. Je sais donc ce que j’ai à faire dans les dix prochaines années…

Zlatan Ibrahimovic a déclaré que tu avais un bel avenir devant toi.

THELIN : Je continue à croire que je peux devenir le footballeur que Zlatan a vu en moi. Je ne veux pas le décevoir. (Clin d’oeil) Ceux qui disent que tout est allé trop vite pour moi ont en partie raison. Je suis devenu titulaire de Norrköping en fin de saison et j’ai rejoint Malmö, le plus grand club suédois. J’ai joué contre la Juventus et l’Atlético Madrid en Ligue des Champions et six mois plus tard, j’étais transféré à Bordeaux. Jusque-là, ma carrière n’avait fait que progresser en ligne droite. Depuis, j’ai découvert le revers de la médaille… Je n’ai toutefois jamais songé à retourner en Suède. J’ai beaucoup travaillé pour faire carrière à l’étranger et je n’avais aucune envie de tout abandonner au premier passage à vide.

Bien que tu n’aies eu qu’un statut de joker à Bordeaux et à Anderlecht, tu es resté dans le noyau de la Suède. Quelles sont tes chances de sélection pour le Mondial ?

THELIN : Il y a six attaquants pour quelques places : John Guidetti, Marcus Berg, Ola Toivonen, Christoffer Nyman, Samuel Armenteros et moi. Le sélectionneur ne reprend pas nécessairement les meilleurs. Il convoque ceux qui sont complémentaires, selon lui. Il se moque donc que je joue pour le petit Waasland-Beveren.

par Alain Eliasy – photos belgaimage

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