» Je continue à payer le prix fort « 

Pour le milieu de terrain gantois et international, 2012 a commencé à l’hôpital : il a dû subir une deuxième opération. Il n’est plus au bord de la crise de nerfs mais a pensé tout arrêter…

Le 31 janvier 2011, il subit son accident de voiture. Le 7 avril 2011, c’est son opération au genou. Le 25 octobre 2011, il subit un gros contact à l’entraînement au niveau du tibia. Pauline, sa compagne depuis quatre ans et qu’il épousera le 9 juin à Mouscron ( » Il a demandé ma main le jour de la finale de la Coupe 2010 « ) précise :  » C’était juste après ton 27e anniversaire « . Le 2 janvier dernier, une nouvelle opération s’est imposée…

Pour Christophe Lepoint, l’année a donc commencé à l’hôpital. Alors que ses coéquipiers s’envolaient pour l’Espagne, il est resté en Belgique. Il passe actuellement ses journées chez le kiné Frank Wezenbeek.

Vous avez repris les entraînements trop vite ?

ChristopheLepoint : Pas du tout. Le genou était complètement guéri. J’ai été touché sur un contact. Et encore : pas un contact avec un coéquipier. J’ai essayé de contrer un tir.

C’était comme si le monde s’effondrait ?

Presque. Tout allait bien, jusqu’à ce moment-là. J’avais repris les entraînements collectifs depuis une quinzaine de jours. J’allais au duel, comme avant. Je ne nourrissais aucune appréhension. Il était prévu que j’accompagne le groupe en stage en Espagne. Et même, peut-être, que je rejoue avant la trêve. Et subitement, au centre d’entraînement, je me suis retrouvé à terre. Au propre comme au figuré. On a dû m’évacuer en civière, je ne pouvais plus marcher. Lorsqu’on m’a annoncé que je devrais subir une deuxième opération, j’ai songé à tout arrêter. J’ignorais ce qui m’attendait : combien de semaines, de mois, je devrais encore patienter avant de rejouer ? A quel type de rééducation je devrais m’atteler ?

 » Un psychologue ? Je n’en ai jamais eu besoin « 

Vous avez fait appel au psychologue ?

Je n’en ai pas ressenti le besoin. Mon désarroi n’a pas duré longtemps. Beaucoup de personnes m’ont remonté le moral : le kiné, le doc, ma femme, mes parents, mes beaux-parents. Des gens que je n’avais plus entendus depuis longtemps m’ont téléphoné. Sans eux, je ne serais peut-être plus footballeur. Je n’aurais sans doute pas trouvé le courage nécessaire pour une deuxième rééducation. Pendant les fêtes de fin d’année, je suis parti à Disneyland avec Pauline et mon fils de six ans, Marco. Cela m’a fait du bien de me changer les idées. D’autant qu’en été, à cause de ma première rééducation, je n’avais pas pu partir en vacances. J’ai la chance d’avoir une famille soudée. Cela n’a pas été drôle tous les jours pour ceux que je côtoie au quotidien, et pour Pauline en particulier. Lorsque je rentrais à la maison, j’avais rarement le sourire. J’étais souvent soupe-au-lait.

La date du 31 janvier approche. Comment l’appréhendez-vous ?

Sans état d’âme particulier. Je saurai simplement, ce jour-là, qu’il y aura un an que ma carrière s’est brusquement arrêtée.

Vous songez souvent à cette nuit fatale ?

Je regrette cette sortie, bien sûr. J’ai payé mon erreur au prix fort. Et je continue à la payer, puisque je ne suis toujours pas redevenu footballeur. Le mal est fait, je ne peux pas revenir en arrière.

Vous avez 27 ans, l’âge où un footballeur est généralement au sommet de son art.

Et je passe cette période dans les centres de rééducation, en effet. Un gâchis.

Vous étiez international au moment où l’accident s’est produit…

Heureusement, Georges Leekens ne m’a jamais laissé tomber. Il a pris de mes nouvelles lorsque je me suis retrouvé à l’hôpital. Et il a continué à s’informer de mon état de santé par la suite. Il semble disposé à me rappeler. Je ferai tout pour retrouver mon meilleur niveau. Je suis un battant, je n’ai pas l’habitude de lâcher. J’ai encore de belles années devant moi.

Vous avez déjà discuté avec Trond Sollied ?

Il prend de mes nouvelles, mais on n’a pas encore parlé de football. J’ignore s’il compte encore sur moi. L’équipe tourne bien pour l’instant. Même à 100 %, ce ne sera pas évident de récupérer ma place. Et rien ne dit que le club ne va pas encore étoffer davantage son entrejeu, car on se rend compte qu’il y a peut-être un beau coup à jouer, cette saison.

 » Je ne me fixe plus de délai, je laisse faire la nature « 

Vous vous êtes fixé un délai pour retrouver le terrain ?

La Faculté pense à un retour entre cinq semaines et deux mois. Je préfère ne pas trop me prononcer à ce sujet. Je laisserai faire la nature. Après mon opération précédente, je m’étais fixé un délai, sans cesse reporté.

Combien d’années de contrat vous reste-t-il ?

Deux ans et demi. Après ma première saison, qui avait été très prometteuse, le club m’avait offert une année supplémentaire. Une chance, peut-être. Si cet accident était survenu alors que j’étais en fin de contrat, c’eût sans doute été la galère.

Récemment, vous avez toutefois eu un différend avec Michel Louwagie…

Il a décidé de ne plus me payer, puisque j’étais couvert par la mutuelle. J’ai accepté. Je méritais d’être sanctionné pour l’erreur que j’ai commise. J’estime toutefois que j’ai fourni beaucoup d’efforts pour revenir, et qu’à partir du moment où j’ai repris l’entraînement, mon contrat avec Gand devrait reprendre effet. Louwagie m’a répondu qu’il reprendrait effet le jour où je rejouerai. Conséquence : je ne touche plus rien depuis trois mois. Ni mon salaire, ni l’argent de la mutuelle. ( NDLR : Louwagie, contactéenEspagne, reconnaîtqueLepointneperçoitpassonsalairepourl’instant, mais affirmequ’ilperçoittoujourslaprime àlasignatureassezimportante etpensetilégalementlamutuelleetl’assurance. Ilprécisequesoncontratreprendraeffet, nonpaslorsqu’ilrejouera, maislorsquelesentraînementsdegroupedémontrerontqu’ilredevientsélectionnable). Je ne vais pas partir en guerre pour cela, je préfère concentrer mes efforts sur ma rééducation.

Comment se passe-t-elle ?

Bien. Le moment de désarroi passé, j’ai vite repris mon courage à deux mains, et aujourd’hui, je suis plus déterminé que jamais. Je me sens même mieux qu’avant. Cette deuxième opération a permis de tout remettre en ordre : précédemment, je ressentais toujours une douleur. Je suis rassuré. Je sais que je reviendrai. Au centre de rééducation, on se remonte mutuellement le moral. Je ne suis jamais seul. Malheureusement, devrais-je dire. L’infirmerie de Gand n’a jamais désempli. Il y a eu Rafinha, Roy Myrie, Wallace Pereira, Zakaria M’Sila, Alpha Ba… Bientôt, je retrouverai le bassin. Cela ne m’enchante pas : j’ai eu ma dose en 2011. Mais lorsque je vois Alpha Ba, je me dis que c’était pire pour lui : il ne sait pas nager ! ( Ilrit)

 » Puisse la leçon servir à d’autres… « 

Yassine El Ghanassy a déclaré que votre situation le faisait réfléchir…

Si ce qui m’est arrivé peut servir de leçon à d’autres footballeurs, pas seulement à Yassine, je pourrai au moins me dire que mon accident n’aura pas été inutile.

Vu de l’extérieur, vous constatez une évolution dans les prestations de l’équipe ?

Sollied prône clairement un autre système de jeu. On fait mieux circuler le ballon. Avec Francky Dury et Michel Preud’homme, c’était un jeu plus direct. On a un gros potentiel offensif. Sur les flancs, c’est impressionnant, avec El Ghanassy et Christian Brüls. Et derrière, on est plus solide. La paire espagnole César Arzo-Melli veille au grain. Depuis mon arrivée à Gand, il y a trois ans, c’est sans doute la meilleure défense qu’on ait eue.

Gand champion, vous y croyez ?

Pourquoi pas ? Notre dernier match, contre Westerlo, n’a pas été brillant, mais nous avons malgré tout empoché les trois points. C’est peut-être un signe. Avec la formule actuelle, tout se joue pendant les play-offs. Où en serons-nous à ce moment-là ? Nos détracteurs disent souvent qu’on a du mal contre les grosses équipes. Ça semble s’être amélioré cette saison. Je n’oublie pas la Coupe de Belgique. C’est toujours un objectif très important pour Gand.

PAR DANIEL DEVOS – PHOTOS: IMAGEGLOBE

 » Lorsqu’on m’a annoncé que je devrais être réopéré, j’ai pensé tout arrêter « 

 » Au centre de rééducation, on se remonte mutuellement le moral. Je ne suis jamais seul. Malheureusement, devrais-je dire. « 

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