J’essaie d’imiter Ronaldinho

Désormais lié à Genk jusqu’en 2013, mais toujours convoité par Anderlecht et le Standard, le néo-Diable reste d’un calme olympien.

Plus cool que lui, que tu meurs ! Alors que tout le monde tourne autour de lui, qu’on l’annonce tantôt à Anderlecht, tantôt au Standard, tantôt à l’étranger, il continue à se comporter comme un Junior UEFA, heureux de pouvoir fouler la pelouse chaque week-end. Rien ne semble pouvoir l’atteindre.

Quand on lui demandait il y a dix jours ce qu’il pensait de l’intérêt des grands clubs, il répond :  » Je verrai cela plus tard, j’ai d’abord deux matches importants à jouer contre Saint-Trond.  » Et toutes les sollicitations des médias, n’était-ce pas perturbant ?  » Non, ça va encore…  » Il en fallait apparemment beaucoup pour lui faire tourner la tête et face aux félicitations, il conservait un sens aigu de l’autocritique. Par exemple après le match à Westerlo :  » J’ai raté des passes, des contrôles, des frappes…  » Son credo :  » Il vaut mieux être critique envers soi-même qu’envers ses coéquipiers. « 

KevinDeBruyne, qui fêtera ses 19 ans fin juin, vient de boucler sa première saison complète en D1. L’an passé, il était encore un illustre inconnu. Il avait tout juste eu droit à deux montées au jeu notamment, à la fin d’un match à Charleroi alors que le score était déjà de 3-0. En préparation, durant l’été, il a inscrit un beau but en match amical contre Leverkusen, alors qu’il évoluait plutôt en pointe. Il a fêté sa première titularisation lors du déplacement à Zulte Waregem, comptant pour la deuxième journée du championnat 2009-2010. Mais c’est sous FrankieVercauteren, un entraîneur qui a pourtant la réputation d’être frileux à l’heure de lancer des jeunes, qu’il a explosé. Vercauteren l’a repositionné sur le flanc gauche, lui le droitier. Son meilleur match ? De son propre aveu, contre… Charleroi, durant les play-offs 2. Les Zèbres lui réussissent bien.

Est-ce Vercauteren qui l’a lancé ?  » C’est ce qu’affirment beaucoup de gens, parce que je suis désormais un titulaire régulier, mais j’avais déjà reçu ma chance avec les entraîneurs précédents. De toute manière : lorsqu’un entraîneur vous donne une chance, il faut encore être en mesure de la saisir. C’est trop simple de dire qu’un entraîneur vous fait confiance ou pas : cette confiance, on doit la mériter. C’est vous, par vos prestations, qui faites en sorte que vous restiez dans l’équipe ou pas. « 

Le flanc gauche, est-ce sa meilleure place ?  » J’ai longtemps joué comme deuxième attaquant, en position centrale. Chez les jeunes, j’avais déjà évolué sur le flanc gauche, jamais sur le droit. J’aime le flanc gauche. Et pas uniquement parce que cela me permet d’entrer dans le terrain pour armer mon tir : j’aime aussi déborder sur le flanc gauche. Cela peut paraître bizarre pour un droitier, et moi-même, je ne peux pas l’expliquer. C’est ainsi, point à la ligne. « 

Formé au football de rue

Mais qui est ce De Bruyne, révélation de la saison au Racing Genk et plébiscité par les supporters comme deuxième meilleur joueur de la saison derrière ThomasBuffel ?

 » C’est peut-être parce que je suis un petit jeune issu du centre de formation qu’ils ont eu un faible pour moi « , réagit-il, toujours humble. Pourtant, il n’est pas Limbourgeois, mais… Gantois. Né à Drongen, dans la banlieue de la cité d’Artevelde, il a joué à La Gantoise, jusqu’à ses 14 ans :  » A ce moment-là, des recruteurs de Genk m’ont repéré et m’ont proposé de rejoindre leur centre de formation, beaucoup plus réputé que celui des Buffalos à l’époque. J’ai dû quitter le toit familial, ce qui, à cet âge, n’est jamais évident. Mais je suis plutôt débrouillard, et les premiers moments de blues passés, je me suis vite émancipé. La première année, j’ai vécu en internat à l’école, puis j’ai été hébergé dans une famille d’accueil. Les entraînements, au centre de formation de Genk, étaient effectivement plus poussés que ceux de Gand. J’ai eu pas mal d’anciens joueurs comme entraîneurs, comme MarcEmmers, DomenicoOlivieri et même MikeOrigi. Parmi mes coéquipiers dans les équipes d’âge, il y avait TimothyDurwael et Arne Nilis ( NDLR : le premier joue de temps en temps avec Genk et le second, le fils de Luc, est en train de percer au PSV). Je garde quand même les Buffalos dans un coin de mon c£ur. Leur 6-2 contre Bruges m’a fait plaisir. Je ne devrais peut-être pas le dire, mais je préférais voir La Gantoise que le Club en Ligue des Champions.  »

Les gestes dont De Bruyne régale parfois l’assistance, c’est en jouant avec ses copains qu’il les a appris :  » Comme j’habitais un quartier résidentiel où la densité du trafic était faible, je jouais dans la rue. Lorsqu’il faisait beau, je n’arrêtais pas jusqu’à la tombée de la nuit. Quand on est petit, on n’est jamais fatigué. Dans ce contexte-là, loin des yeux d’un entraîneur qui vous fait des remarques, on ose tenter certains gestes auxquels on ne se risquerait pas dans le football organisé. J’essayais d’imiter les plus grands footballeurs. On essaie, on rate souvent, mais à force d’essayer, on finit par réussir. Les joueurs pour lesquels j’avais le plus d’admiration étaient StevenGerrard et Ronaldinho. Surtout le Brésilien, d’ailleurs. Une technique à base de souplesse plutôt que de rapidité. Mon geste favori ? Sans doute le flip-flop que j’ai réussi contre le Standard : faire une feinte avec l’extérieur du pied, puis repartir avec l’intérieur du pied. L’adversaire s’attend à ce que vous partiez d’un côté et vous partez de l’autre. Mais bon : il faut aussi choisir son moment pour tenter ce genre de truc. Le show c’est bien, mais il faut être efficace.  »

Le mini-foot l’a aussi aidé

De Bruyne a aussi joué au mini-foot.  » Dans les équipes d’âge de Gand, on n’y était pourtant pas très favorable, car on estimait que c’est mauvais pour les tendons ou les genoux. J’ai quand même pratiqué le mini-foot, de 11 à 15 ans, et je ne le regrette pas. Je n’ai jamais rencontré de problèmes physiques, et j’ai pu développer ma technique sur des espaces réduits, travailler les démarrages également. « 

Quel regard porte-t-il sur sa saison ?  » Ce serait malvenu de faire la fine bouche. Au bout du compte, je peux évidemment être satisfait. Elle n’a pourtant pas démarré au quart de tour. Les débuts ont été laborieux. L’équipe ne tournait pas, et dans ce contexte, c’est difficile pour un jeune de trouver ses marques. Je me suis amélioré au fur et à mesure que l’équipe a trouvé son rythme de croisière. « 

La philosophie de Genk, qui voulait que toutes les équipes d’âge pratiquent le même système de jeu que l’équipe Première, s’est un peu perdue : si les jeunes continuent à jouer en 4-4-3, l’équipe A joue en 4-4-2.  » Mais je trouve que le 4-4-2 nous convient bien « , estime De Bruyne.

Les gens qui le conseillent le plus ?  » Un peu tout le monde, mais surtout Buffel. Il occupe le même rôle que moi, mais sur l’autre aile, et son expérience m’est précieuse. « 

25 centimètres en trois ans

A Genk, où de nombreuses nationalités différentes se côtoient, les entraînements se donnent en anglais… et parfois en français. Pas de problème pour Kevin :  » J’ai un peu appris ces langues à l’école, mais surtout dans l’entourage familial. Ma mère a fait ses études en Angleterre, où mes grands-parents maternels habitent d’ailleurs toujours. Sa s£ur et son frère ont fait leurs études en français et habitent à Paris. Lorsqu’on se retrouve pour les fêtes de Noël, on passe du néerlandais à l’anglais, et de l’anglais au français. A force d’entendre ces intonations, je les ai mémorisées. « 

Et de ses premiers pas de footballeur à La Gantoise, que reste-t-il ?  » Pas grand-chose. Aucun de mes jeunes coéquipiers de l’époque n’a atteint la D1, et avec le temps et l’éloignement, on s’est un peu perdu de vue. Mais à Drongen, on trouve désormais pas mal de supporters du Racing Genk. Ils ont pris l’accent limbourgeois, là-bas. ( Ilrit). De mon côté, En attendant, Georges Leekens l’a sélectionné chez les Diables Rouges en vue du match amical contre la Bulgarie, alors qu’il pensait se rendre en Croatie avec les U19. Après, ce seront les vacances en Crète. Je ne suis pas vraiment un habitué des sélections nationales. Peut-être en raison d’une croissance tardive : plus jeune, j’étais très petit. C’est vers 15 ans, lorsque j’étais déjà à Genk, que j’ai commencé à grandir subitement : j’ai pris 25 centimètres en trois ans. J’ai seulement été sélectionné en U18 et des U19. La seule fois où j’ai été sélectionné pour les Espoirs, j’étais blessé : c’était lors du match contre Malte, à Lokeren, et j’avais été remplacé en dernière minute par NillDePauw.  »

par daniel devos – photos: belga

C’est Vercauteren qui l’a lancé en le repositionnant sur le flanc gauche, lui le droitier…

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