« J’aimerais rester en Belgique »

L’attaquant yougoslave va probablement quitter Mouscron. Pour remplacer Koller ou Radzinski à Anderlecht?

Avec un but à Charleroi et deux contre l’Antwerp, Nenad Jestrovic refait parler de lui. On le sent débarrassé de la blessure aux adducteurs qui l’avait gêné durant une partie du championnat. Il a retrouvé son efficacité du début de saison. Au moment où l’on aborde la dernière ligne droite de la saison, les supputations vont bon train concernant son avenir. Hugo Broos semble déjà ne plus se faire trop d’illusions sur ses chances de conserver son buteur à Mouscron. Vendredi, l’Excelsior se rend à Anderlecht. Une équipe dont Nenad Jestrovic est tombé sous le charme à l’occasion des matches de Ligue des Champions.

Vendredi, vous jouez à Anderlecht. Un match qui vous tient à coeur?

Nenad Jestrovic: En effet. Je suis impressionné par les prestations livrées par Anderlecht. Le Sporting réalise une saison remarquable et mériterait d’être champion. En règle générale, le déplacement au Parc Astrid motive toujours l’équipe adverse. Lors du match aller, au Canonnier, nous avions été battus de façon imméritée. A 1-0 en notre faveur, j’avais inscrit un but qui a été annulé pour un hors-jeu imaginaire. Sans cela, je suis persuadé que Mouscron aurait été la première équipe belge à vaincre Anderlecht cette saison. Bien avant La Gantoise. Mais qui sait? Nous sommes plus à l’aise à l’extérieur qu’au Canonnier. Peut-être deviendrons-nous la première équipe belge à battre Anderlecht au stade Constant Vanden Stock?

En foulant la pelouse du Parc Astrid, songerez-vous au fait que des clubs aussi prestigieux que Manchester United, la Lazio Rome et le Real Madrid sont tombés là?

En tout cas, je me réjouis à l’idée de fouler une pelouse qui a accueilli autant de grands noms. Je n’ai jamais eu l’occasion de jouer au stade Constant Vanden Stock. J’étais présent dans la tribune lorsqu’Anderlecht a battu Manchester United, comme toute l’équipe de Mouscron d’ailleurs. L’ambiance était incroyable. C’est un stade où l’on a envie de jouer. Et si je pouvais inscrire un but là-bas, ce serait encore mieux.

Qu’est-ce qui vous séduit le plus dans le chef d’Anderlecht?

C’est une bonne équipe, très solide, avec un entraîneur qui dirige très bien ses troupes. Les résultats obtenus en Ligue des Champions ne sont pas le fruit du hasard. Je suis séduit par le jeu collectif d’Anderlecht. Je suis aussi impressionné par les qualités individuelles de joueurs comme Bart Goor, Walter Baseggio et Alin Stoica. Cela doit être un plaisir d’évoluer dans un tel ensemble.

Comment l’attaquant que vous êtes juge-t-il Jan Koller et Tomasz Radzinski?

Ce sont les meilleurs attaquants du championnat de Belgique. Ensemble, ils ont inscrit 37 buts. Marcin Zewlakow et moi, nous en sommes à 32. Nous apprécions tous les deux les grands espaces. Jan Koller et Tomasz Radzinski sont différents. Peut-être plus complémentaires. Le Tchèque prend tous les ballons de la tête. Le Canadien tourne autour de lui et profite de la taille de son compère pour exploiter sa pointe de vitesse.

Jan Koller et Tomasz Radzinski risquent d’être fort sollicités sur le marché des transferts. Etes-vous déjà en train de vous dire que cela pourrait libérer une place pour vous?

J’admets que j’y songe. A choisir, je préférerais demeurer en Belgique la saison prochaine. Je n’ai vraiment pas l’esprit à l’étranger pour l’instant. Le championnat de Belgique me plaît et un transfert à Anderlecht me permettrait d’encore gravir un échelon.

Le football belge semble être une révélation pour vous.

Effectivement. Je suivais régulièrement le football belge à la télévision lorsque j’évoluais au FC Metz. J’avais déjà été impressionné par la prestation d’Anderlecht face à Bologne, en Coupe de l’UEFA. Le malheureux Elos Ekakia avait livré une superbe prestation. Anderlecht aurait cent fois mérité de se qualifier. J’avais aussi découvert Anderlecht lorsque le Sporting était venu disputer un match amical à Metz. Je me souviens du score final: 1-1. J’étais dans la tribune, ce jour-là. Mais je me m’attendais pas à ce que le niveau d’ensemble du football belge soit aussi élevé. C’est un championnat très difficile. Les scores souvent très étriqués en attestent. J’ai hésité à venir en Belgique au départ, car j’attendais une meilleure proposition de la part de l’Espagne, mais Hugo Broos a insisté pour que je vienne et je ne regrette pas de l’avoir écouté. Je suis très heureux de mon choix. Les gens sont accueillants et le football pratiqué en Belgique me convient. Certaines équipes jouent un peu trop défensivement à mon goût, mais ce n’est pas le cas de l’Excelsior. Je pense que Broos, de son côté, se félicite également de m’avoir enrôlé. Il m’a aidé, je l’ai aidé.

Je connaissais mes qualités. J’avais simplement besoin de jouer. Je n’ai pas été par hasard le deuxième buteur du championnat de Yougoslavie, avec 21 buts, alors que je n’avais que 20 ans. Je jouais à l’OFK Belgrade. Le meilleur buteur, cette saison-là, était Jovicic. Il défendait les couleurs de l’Etoile Rouge et est aujourd’hui à la Sampdoria. J’avais confié à ma femme que, si j’optais pour la Belgique, je ne tarderais pas à retrouver mes facultés. J’ai tenu parole: j’ai inscrit de nombreux buts, mais j’ai aussi distillé de nombreux assists et j’ai provoqué plusieurs penalties. Je remercie Hugo Broos de m’avoir fait confiance. A Mouscron, il réalise un boulot phénoménal avec des moyens limités. Je n’affirme pas cela pour le flatter, parce qu’il est mon entraîneur. C’est un homme très sérieux qui prend sa tâche très à coeur et qui vous donne envie de jouer.

Durant ma carrière, je n’ai pas souvent eu l’occasion de travailler avec des entraîneurs pareils. Joël Muller était bien trop défensif. J’avais réalisé une bonne première saison à Metz, au terme de laquelle j’avais espéré pouvoir partir à l’étranger, mais le club lorrain s’était opposé à mon départ. Aujourd’hui, je suis en Belgique et je m’y sens très bien. Mais nous sommes en train d’anticiper. Rien ne dit qu’Anderlecht serait intéressé par mes services.

Si cela ne s’appelle pas tendre la perche, ça y ressemble fort…

Pas du tout. J’affirme simplement que cela me plairait de jouer à Anderlecht. Quel est le joueur qui refuserait une proposition du Sporting?

Vous venez de le dire: vous affectionnez les grands espaces. Ceux-ci sont rares à Anderlecht…

J’adore partir de loin et provoquer mon adversaire en un-contre-un. J’ai inscrit de nombreux buts de cette manière: à Malines, à St-Trond, à Charleroi et récemment contre l’Antwerp. Mais je suis capable d’évoluer dans un autre registre également. Si on m’adresse de bons centres, je ne suis pas maladroit de la tête. Je ne suis pas un attaquant du style pivot, comme Jan Koller. Je me rapprocherais davantage du style de Tomasz Radzinski. Je suis plus grand que le Canadien, mais je n’ai pas beaucoup à lui envier au niveau de la vitesse.

Vous aimeriez rester en Belgique. Etonnant car tout le monde vous voit déjà en Espagne, en Italie ou en Turquie!

Si je reçois une proposition d’Espagne ou d’Italie, il est évident que je me mettrai à table pour discuter. La perspective de partir dans ces pays-là ne me rebuterait pas. Surtout si l’Excelsior et moi-même y trouvons chacun notre compte. Mais une belle proposition d’un club belge m’agréerait.

Si vous voulez améliorer votre situation par rapport à Mouscron, les possibilités en Belgique ne sont pas nombreuses.

En effet. Mouscron est un très bon club qui progresse énormément. Seuls Anderlecht, Bruges, le Standard et La Gantoise le précèdent au classement. Il me paraît évident que je ne quitterai pas Mouscron pour aller à La Gantoise. Je verrai en fin de saison. Plus je disputerai de bons matches, plus les propositions seront intéressantes.

Est-ce important pour vous de terminer meilleur buteur de la compétition?

J’affirme parfois le contraire, mais pourquoi le cacher? Le titre de meilleur buteur du championnat me tient à coeur. Que ce soit avec 25 ou 30 buts, peu importe. On retient toujours le nom du vainqueur. Jamais celui de ses dauphins. Et puis: si je suis le numéro 1 en Belgique, les propositions afflueront plus facilement que si je suis le numéro 2 ou le numéro 3. Elles seront plus intéressantes également. J’ai loupé plus de matches que Jan Koller et Tomasz Radzinski. Je n’ai disputé que 20 matches. Enfin: 20 matches et dix minutes à Charleroi. Et je compte 19 buts à mon actif. C’est presque un but par match.

En lisant la presse, il semble que votre départ soit déjà acquis. Vous auriez déclaré: « Je vais partir! »

Je n’ai pas déclaré cela. J’ai simplement affirmé que, si l’Excelsior recevait une bonne proposition pour moi, j’envisagerais mon départ. Mais je suis très heureux d’être à Mouscron. Je ne viens jamais à l’entraînement avec des pieds de plomb. Si je suis souvent souriant, ce n’est pas un hasard.

Une deuxième saison au Canonnier ne vous dérangerait donc pas?

(Hésitant). Je crois qu’il serait préférable, dans l’intérêt des deux parties, que nos chemins se séparent au terme de ce championnat. L’Excelsior pourrait obtenir une belle plus-value sur mon transfert, et de mon côté, j’améliorerais également ma situation financière. Sportivement aussi, je progresserais. Mouscron est un bon club, mais je me sens capable de jouer plus haut. J’aurai vingt-cinq ans le 9 mai: c’est l’âge idéal, ni trop jeune, ni trop vieux. J’ai perdu pas mal de temps en cours de route, mais il n’est pas trop tard. Mouscron m’a permis de relancer ma carrière et je lui en suis reconnaissant. Je sais que le montant de mon salaire représente une lourde charge pour l’Excelsior et je crois que le club, de son côté, préférerait aussi que je parte. Mais sait-on jamais? On en reparlera en fin de championnat.

Hugo Broos semble déjà ne plus se faire trop d’illusions sur ses chances de vous conserver dans son effectif.

Je suis encore sous contrat pour deux ans. Je n’ai pas demandé d’augmentation de salaire. Si une offre parvient à Mouscron, ce sera au club de décider.

Si vous partez, il faudra vous remplacer.

Hugo Broos a déjà démontré, dans le passé, qu’il avait le flair pour dénicher de bons attaquants.

Ces dernières semaines, on sent que vous avez totalement récupéré de votre blessure aux adducteurs.

Oui. Avant les trois semaines de repos que j’ai observées, je me suis aligné légèrement blessé. Il ne servait à rien de continuer à tirer sur la corde. C’est une blessure que je traîne depuis le début de la saison. Mais, lorsqu’on aligne les buts à la cadence qui était la mienne en début de saison, c’était difficile pour l’équipe de se passer de mes services. J’ai donc continué. Parfois, la gêne s’atténuait, mais elle ne disparaissait jamais totalement. J’avais d’ailleurs déjà dû faire l’impasse sur deux matches. Je crois que le fait d’avoir joué sur un terrain gelé à Bruges, en janvier, a aggravé la blessure. Le Docteur Declercq m’a conseillé trois semaines de repos. Une infiltration m’a été administrée. Après deux semaines, j’ai commencé un travail d’abdominaux en salle de musculation. Puis, j’ai repris avec le groupe. J’ai disputé un match avec la Réserve contre Charleroi. Puis, il avait été convenu que je jouerais une vingtaine de minutes en Première au Pays Noir. J’aurais déjà pu inscrire deux buts là-bas. Je n’en ai inscrit qu’un. Pas grave: l’équipe a gagné. Je suis soulagé car une blessure aux adducteurs est souvent très ennuyeuse pour un footballeur.

Daniel Devos

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire