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 » J’aime les équipes qui s’appuient sur l’enthousiasme « 

 » Il faut savourer les bons moments « , déclare Wouter Vrancken, qui a remporté plus de prix en un an à Malines que durant toute sa carrière de joueur.

Une communication claire et ouverte, c’est, en résumé, la clef du succès de Wouter Vrancken (40 ans) au poste d’entraîneur. Ses (anciens) joueurs, son ex-assistant Frederik Vanderbiest le disent et Vrancken le répète maintes fois pendant cet entretien d’une heure et demie.

De fait, on peut lui poser n’importe quelle question sans qu’il s’en offusque. Nous avons donc commencé par son flirt avec Genk, avant que le Racing n’embauche Hannes Wolf.  » Il n’y a eu qu’un coup de fil à mon agent « , explique-t-il tranquillement, sans trace de frustration.  » Tant que rien n’est concret, je n’y investis pas d’énergie. Parfois, on lance un nom pour détourner l’attention d’autres candidats.  »

Les rumeurs lui ont toutefois permis d’obtenir un meilleur contrat à Malines.  » Il m’en proposait déjà un nouveau. L’intérêt de Genk n’a fait qu’accélérer la procédure. C’est une marque d’appréciation mais aussi une sécurité pour le club comme pour moi. Mon indemnité de limogeage et de départ est plus élevée. On parle souvent de long terme mais franchement, ça n’existe pas en football. Si j’entame la saison prochaine avec un sur quinze, je serai sous pression.  »

Malines est dans le premier peloton. C’est surprenant sur base des statistiques. Vous marquez beaucoup à partir de peu d’occasions (9,3 par match, le deuxième plus mauvais score de JPL) et vous encaissez peu compte tenu du nombre d’occasions concédées (12,8 tirs, le deuxième plus mauvais chiffre). Cela te tracasse-t-il ?

VRANCKEN : Non. Ça souligne surtout la relativité des statistiques. Considère-t-on un tir des 25 mètres comme une occasion ? Et n’oublie pas que nous avons joué plus d’une mi-temps à dix, à Anderlecht, à Eupen et contre le Club. Ces trois matches ont une forte influence sur la moyenne. Ces statistiques démontrent tout aussi bien que nous méritions de gagner contre le STVV et Charleroi. Nous n’avons pas volé nos points. Au contraire, nous en méritons davantage au premier tour, sur base du football développé. Nous faisons preuve d’audace et d’initiative, nous voulons faire plaisir aux supporters.

 » L’intensité est cruciale  »

Il y a surtout beaucoup d’intensité dans le jeu.

VRANCKEN : Elle est cruciale en sport. Dans tout travail, en fait. On l’obtient en étant clair car on la perd dès que les joueurs sont en proie au doute. Ils doivent savoir que faire sans réfléchir. Nous travaillons constamment cet aspect.

Comment obtiens-tu cette intensité constante ?

VRANCKEN : Je parle beaucoup aux joueurs et je leur montre des vidéos. Surtout, je ne peux pas attendre en match quelque chose qui n’a pas été entraîné. Notre groupe est formé depuis un an et demi. Il connaît mes accents. Un engagement à 100% à l’entraînement est crucial. En plus, l’esprit de groupe est fantastique depuis le début et il entraîne les nouveaux.

Tu fais souvent référence au Liverpool de Klopp : énergie, interaction avec le public, rock.

VRANCKEN : J’aime les équipes qui s’appuient sur l’enthousiasme. Ça implique une certaine prise de risque, donc je nuance les statistiques de mon équipe dans cette optique aussi.

Malines parvient généralement à imposer son jeu à l’adversaire. L’équipe dispute un grand nombre de duels, surtout aériens.

VRANCKEN : Cela signifie que nous exerçons une bonne pression sur l’adversaire, le contraignant à faire de mauvaises passes ou à envoyer des longs ballons, des duels que nos défenseurs gagnent facilement. Un entraîneur ne doit pas s’occuper de toutes les données.

Quelles sont les données importantes ?

VRANCKEN : Le volume, l’accélération et la décélération. Avant tout en semaine, afin que chaque joueur soit en forme. Mais pour ça, je compte sur le préparateur physique. C’est lui qui analyse les chiffres. Je m’occupe davantage des aspects tactiques.

 » J’ai suivi des cours de psycho  »

Le départ de Fred Vanderbiest a-t-il eu un impact sur ton fonctionnement au quotidien ?

VRANCKEN : Oui. Fred était un T1 au poste de T2. Nous nous étions beaucoup rapprochés l’année passée mais le RWDM, son club, lui a présenté un projet fantastique. Bart Janssens est beaucoup plus calme mais ça ne veut pas dire que je dois changer de comportement. Je ne crois pas au petit jeu du bon policier et du mauvais.

Vanderbiest a vanté ton management de l’équipe. T’appuies-tu sur des études psychologiques ou sur ton instinct ?

VRANCKEN : Sur le bon sens commun. J’ai été joueur et je sais quand quelqu’un est déçu ou frustré. Il faut anticiper et présenter des arguments. J’ai connu trop d’entraîneurs qui n’osaient pas se lancer dans des discussions difficiles. Je m’oblige à sauter le pas.

Tu n’as pas besoin d’un psychologue ?

VRANCKEN : Non. Après ma carrière de joueur, j’ai suivi pas mal de cours de psychologie. J’en ai retiré des éléments mais l’essentiel est d’être normal. On a fatalement de meilleures relations avec un tel ou un tel mais ça ne veut pas dire qu’il jouit d’une plus grande attention ou que je lui fais des cadeaux.

Quelle part du joueur retrouve-t-on dans l’entraîneur Vrancken ?

VRANCKEN : Beaucoup. Je me livrais à fond. Je ne me laisse pas envahir par le doute mais je réfléchis pour m’améliorer.

Tu n’hésitais pas à provoquer ni à décocher de vilains coups.

VRANCKEN : Je suis plutôt calme sur le banc. A l’entraînement, par contre, je m’impose. En match, j’essaie de canaliser mes émotions mais il faut quand même fêter un but ou pouvoir dire quelque chose à l’arbitre. Avec respect, de part et d’autre. Je trouve qu’on essaie de retirer trop d’émotions du jeu, ce qui peut lui ôter son charme.

 » Je n’ai rien gagné comme joueur  »

Malines se demandait comment il allait être reçu en déplacement, suite à l’Opération Mains Propres. Comment cela se passe-t-il ?

VRANCKEN : Bien. Nous sommes la deuxième meilleure équipe en déplacement.

N’as-tu jamais craint que l’affaire n’entache ta réputation ?

VRANCKEN : Non. Je pense que tout le monde sait que peu de joueurs de ce noyau étaient au club durant la période concernée par l’opération. Moi y compris. Il serait donc ridicule de nous en tenir responsables. Je suppose aussi que des employeurs potentiels font bien leurs devoirs avant le recrutement.

Lors des réunions avec la direction, parle-t-on parfois de l’opération ?

VRANCKEN : Non. Joueurs et staff se concentrent sur le sport. C’est ce qui fait notre force. Les équipes qui se sont laissé entraîner dans des joutes verbales se sont tiré une balle dans le pied.

Le 31 décembre, quel regard porteras-tu sur l’année 2019 ?

VRANCKEN : Une année exceptionnelle. Nous avons gagné tout ce qui était à notre portée, malgré ce qui s’est passé. Grâce à mes joueurs en premier lieu. En fait, ma carrière d’entraîneur a été très rapide : quelques promotions en provinciale avec Gravelo, puis en nationales avec THES. Je n’ai eu un coup de frein qu’à Lommel car je sentais que j’avais besoin de franchir un nouveau cap. Je voulais savoir ce dont j’étais capable au plus haut niveau et j’ai accepté un poste d’adjoint à Courtrai.

T’arrive-t-il de regarder la médaille de la coupe ou du titre en D1B ?

VRANCKEN : Certainement. Elles sont accrochées dans mon bureau à la maison. Je n’ai rien gagné dans ma carrière de joueur, hein ! Il faut pouvoir savourer des moments pareils. Sinon, on ne pense qu’à la mission suivante et on finit par être rongé par le stress. Bien sûr, c’est mieux d’être sur le terrain mais j’essaie de créer au sein de mon staff une camaraderie de vestiaire.

 » Mes filles ont chopé le microbe Malinwa  »

Sors-tu parfois avec l’équipe ?

VRANCKEN : Non mais je suis heureux que les joueurs le fassent entre eux. Après la finale de la coupe, nous sommes allés à Knokke tous ensemble. Vanderbiest avait tout arrangé : le restaurant puis la sortie. Nous en avions besoin après une saison aussi turbulente.

Comment réagit ta famille à tes succès et à l’attention dont tu jouis ?

VRANCKEN : Mes filles ont chopé le microbe Malinwa. Elles ne s’intéressaient absolument pas au football mais maintenant, elles assistent à tous les matches à domicile et regardent même les matches en déplacement. J’ai aussi un fils de six ans mais il ne s’intéresse pas encore au football. En fait, il n’y a pas eu beaucoup de changements à la maison. Par moments, je me détache complètement du football. Je m’y oblige. A moins que ce soit ma femme. ( Rires). Il y a toujours bien un match à visionner, un thème sur lequel réfléchir mais alors, ça n’arrête jamais. Il faut placer des limites, profiter des moments de bonheur en famille. Ça peut être une simple balade. Je n’ai jamais eu de trou noir. J’étais tout aussi heureux durant la période entre mes adieux de joueur et mes débuts au poste d’entraîneur que durant mes carrières.

Tu as été employé commercial chez ING, représentant chez Masita et i2coach chez HR. Que t’ont appris ces expériences ?

VRANCKEN : C’est le dernier poste que je préférais, avec une chouette patronne. J’ai beaucoup appris à son contact. Elle était droite et faisait preuve d’une grande empathie envers son équipe. Geoffrey Peytier, un ancien joueur de Malines, était un de mes collègues. Il possède maintenant son propre call center. Je reste en contact avec beaucoup de gens de cette époque. J’ai découvert à quel point il était important et agréable de fonctionner dans un environnement qui pratique une communication ouverte.

Wouter Vrancken :
Wouter Vrancken :  » Nous voulons faire plaisir aux supporters. « © koen bauters

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