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« J’aime encore le sport de haut niveau »

Il y a quarante ans, Wilfried Meert était encore journaliste. Il est ensuite devenu organisateur du Mémorial. Quel regard jette-t-il sur quarante ans de sport et de reportages ?

Le centre de Bruges, où il s’est établi il y a vingt ans et qui lui sert de quartier général depuis lors, respire toujours le calme et la beauté. C’est le constat que pose Wilfried Meert en pénétrant dans le restaurant Patrick Devos, un établissement réputé du centre-ville.

 » J’ai fait le tour du monde et je suis incapable de citer cinq villes où il fasse aussi bon vivre et où on a tout à proximité « , dit-il. Originaire de Ternat, dans le Brabant flamand, Meert est l’homme qui a fait du Mémorial Van Damme un grand événement. Aujourd’hui, il a cédé le témoin à Cédric Van Branteghem, un athlète qui a participé aux Jeux Olympiques, mais il est toujours là. Peu nombreux sont ceux qui se souviennent encore qu’avant cela, il avait derrière lui une longue carrière de journaliste sportif à Het Laatste Nieuws et à Sport 70 puis Sport 80, qui, en 1986, allait fusionner avec Sport Magazine.

Quand Carl Lewis entre dans une pièce, on ne voit plus que lui.  » Wilfried Meert

Avant de se consacrer à l’athlétisme, Meert a couvert à peu près tous les sports. Il a suivi neuf fois le Tour de France et trois fois le Giro. Il connaissait également les stades de football belges comme sa poche et il fut un des premiers à parler de volley-ball en Flandre.  » Het Laatste Nieuws avait déjà quelqu’un pour suivre le basket, alors on m’a confié le volley, un sport jeune, qui évoluait très rapidement. J’avais attiré l’attention du rédacteur en chef Louis Clicteur et il m’avait dit de lancer une rubrique. C’est ainsi que, chaque week-end, je traversais la Flandre, de Courtrai à Genk en passant par Maaseik.  »

Quelques athlètes qui ont marqué Wilfried Meert: Ivo Van Damme, Carl Lewis, Lance Armstrong, Usain Bolt.
Quelques athlètes qui ont marqué Wilfried Meert: Ivo Van Damme, Carl Lewis, Lance Armstrong, Usain Bolt.© INGE KINNET

Qu’est-ce qui vous frappe le plus quand vous comparez le sport aujourd’hui et celui d’il y a quarante ans ?

WILFRIED MEERT : Il n’y a pratiquement plus d’amateurisme. Aujourd’hui, l’encadrement est au top, presque partout dans le monde. D’un autre côté, le sport est moins accessible. Aujourd’hui, dans les journaux, on lit toujours les mêmes interviews des mêmes joueurs. Nous appelions directement les sportifs et, la plupart du temps, ils nous recevaient chez eux dès le lendemain. Après les matches de D1, nous entrions dans les vestiaires et nous parlions aux joueurs qui sortaient de la douche. Tout le monde était disponible. Au Tour, après chaque étape, nous allions voir Eddy Merckx dans sa chambre d’hôtel. Lorsque Rudi Pevenage a porté le maillot jaune puis le maillot vert au Tour, je suis allé le voir chaque jour dans sa chambre pour écrire un article. J’ai suivi le dernier Tour et le dernier Giro remportés par des Belges, Lucien Van Impe et Johan Demuynck. Celui-ci était entouré d’Italiens et il était tout content de pouvoir parler de temps en temps avec un Flamand. Pendant la course, nous roulions entre les coureurs. Nous étions dans le sillage de Merckx alors qu’il souffrait dans un col. Aujourd’hui, on prend l’autoroute et on rejoint directement la salle de presse.

 » L’athlétisme était mon sport préféré  »

Peu de gens savent qu’en plus de l’athlétisme, vous avez couvert de nombreux sports.

MEERT : À l’époque, nous avions une éducation multidisciplinaire. J’ai déjà fait le reportage d’un match de hockey sans en connaître les règles. Je suivais aussi le football. Pas les grands clubs mais le Cercle, le Beveren de la grande époque qui a décroché deux titres. J’ai aussi suivi neuf fois le Tour et trois fois le Giro. La première fois, on m’a sonné un lundi pour me demander si je savais que le Tour débutait deux jours plus tard. Un des reporters avait déclaré forfait et on voulait savoir si je pouvais le remplacer pendant trois semaines. J’avais un quart d’heure pour consulter ma femme et répondre. Deux jours plus tard, je prenais la route pour la France avec un chauffeur et deux collègues. Le chef a pris le Guide Michelin pour regarder où nous pouvions manger à Lille. Pour la première fois de ma vie, je me suis retrouvé dans un restaurant chic et j’ai mangé des huîtres. Mais le soir, à l’hôtel, il n’y avait qu’une toilette pour tout l’étage.

Quel était votre sport préféré lorsque vous étiez enfant ?

MEERT : L’athlétisme. J’admirais Gaston Roelants, qui avait décroché une médaille aux Jeux Olympiques de Tokyo en 1964. Mais j’allais aussi à Anderlecht avec mon père, qui était un grand admirateur de Jef Mermans. Nous habitions près du stade.

Après votre carrière journalistique, vous êtes passé de l’autre côté de la barrière. Vous avez d’abord travaillé à la fédération d’athlétisme puis à l’organisation du Mémorial. Avez-vous vu le sport d’un autre oeil par la suite ?

MEERT : C’est quand même un peu plus calme de ce côté-ci de la barrière. Un journaliste va de deadline en deadline, il subit une pression constante parce qu’il ne doit rien rater. Je suis heureux d’avoir connu les belles années. Écrire une belle histoire est beaucoup plus difficile aujourd’hui même si, à l’époque, il fallait transporter une lourde machine à écrire puis confier le texte à des femmes qui le télégraphiaient à l’aveugle entre des articles en français, en italien, en espagnol ou en anglais.

 » Au départ, le Mémorial ne devait être organisé qu’une fois  »

Pourquoi avoir franchi le pas ?

MEERT : En raison d’un concours de circonstances. Au cours de mon dernier Tour, en 87, j’ai commencé à avoir des palpitations et à transpirer. C’était la dernière nuit, nous étions déjà à Paris. On m’a transporté à l’hôpital en ambulance et le médecin m’a conseillé de surveiller mon rythme de vie. Un peu après, un collègue m’a appelé pour me dire que le secrétaire-général de la fédération d’athlétisme, qui était en place depuis quarante ans, prenait sa retraite. Il pensait qu’avec mes contacts dans le monde de l’athlétisme, c’était une place pour moi. Je me suis dit que ce serait plus facile à combiner avec l’organisation du Mémorial, dont je m’occupais déjà. C’est ainsi que j’ai mis un terme à 24 belles années après avoir débuté à Het Laatste Nieuws en tant que correspondant.

Wilfried Meert félicite Sebastian Coe qui vient d'améliorer le record du mile lors du Mémorial 1981.
Wilfried Meert félicite Sebastian Coe qui vient d’améliorer le record du mile lors du Mémorial 1981.© INGE KINNET

S’il n’y avait pas eu le Mémorial, vous auriez peut-être continué.

MEERT : Ça m’aurait évité de passer des heures au téléphone à la salle de presse après mon travail. Au départ, le Mémorial ne devait être organisé qu’une fois, en hommage à l’un de nos grands athlètes. Mais les gens et les athlètes s’y sont tellement amusés qu’il nous ont demandé de le refaire. Et pareil l’année suivante. Jusqu’à aujourd’hui.

Comment avez-vous rencontré Ivo Van Damme ?

MEERT : Son entraîneur, Mon Vanden Eynde, m’avait dit qu’il avait trouvé un successeur à Miel Puttemans. Un garçon qui a joué au Racing White de Woluwé jusqu’à l’âge de 18 ans, puis qui en a eu marre de prendre des coups et est passé à l’athlétisme :  » Je n’ai jamais vu un tel talent, une telle personnalité. Tu dois l’interviewer.  » C’était la première interview d’Ivo, au coin du Boulevard Emile Jacqmain, où Het Laatste Nieuws avait ses bureaux. Nous nous sommes bien entendus, d’autant que chez Ivo, on lisait Het Laatste Nieuws. Il m’a d’emblée demandé pourquoi nous ne faisions rien pour l’athlétisme. Jusqu’à un soir de juin 1976, où nous nous sommes retrouvés à sept journalistes belges spécialisés en athlétisme sur une terrasse à Rome, près de l’hôtel des athlètes. Ivo est venu se joindre à nous et nous a de nouveau demandé quand nous ferions quelque chose. Nous lui avons répondu :  » On fera quelque chose si tu cours bien aux Jeux de Montréal  » . Nous pensions en être débarrassés ( il rit)

 » Nous espérions 15.000 personnes mais ils étaient 45.000  »

Fâcheuse erreur.

MEERT : Pour ses premiers JO, Ivo a effectivement décroché deux médailles d’argent. Là, j’ai dit à mes collègues que nous devions tenir notre promesse. En octobre, nous nous sommes réunis dans l’idée d’organiser un meeting l’année suivante et de nous revoir en janvier pour lui trouver un nom. Quelques semaines plus tard, Ivo s’est tué en voiture en rentrant de stage. Nous sommes allés voir la fédération qui ne voulait pas bouger. Alors, nous avons monté notre propre ASBL :  » De Vrienden van de Atletiek  » ( Les Amis de l’Athlétisme, ndlr), composée de journalistes qui n’y connaissaient rien en matière d’organisation. Un d’entre nous, un avocat, a rédigé les statuts. Nous voulions absolument inviter les deux hommes qui avaient battu Ivo : le Néo-Zélandais John Walker, qui était en stage en Alsace, a directement dit oui, même s’il devait annuler sa participation à d’autres meetings. Et il nous a promis de tenter de battre le record du monde. La fédération cubaine, qui défendait les intérêts d’Alberto Juantorena, n’a répondu que très tard à notre télex :  » Alberto ne peut pas venir cette année mais si vous le refaites l’an prochain, il sera là.  »

Ce premier meeting fut mémorable.

MEERT : Nous espérions rassembler 15.000 spectateurs, mais les collègues rigolaient, ils disaient qu’on n’arriverait pas à 10.000 personnes. Nous avons cependant rapidement manqué de tickets, il a fallu apposer un cachet aux gens. Ils étaient 45.000, le stade était plein. Walker a loupé le record du monde pour une demi-seconde. Le père d’Ivo lui a remis sa médaille et il lui est tombé dans les bras en pleurant.

Quel souvenir gardez-vous d’Ivo Van Damme ?

MEERT : Sa mentalité. Aujourd’hui, Remco Evenepoel, Wout van Aert et les Belgian Cats sont ambitieux et ne le cachent pas. À l’époque, tout Belge était heureux d’aller aux Jeux, même s’il savait qu’il serait éliminé en série. Ivo, lui, disait qu’il voulait aller en finale et qu’ensuite, tout était possible. Il était le seul Belge à oser parler de la sorte. Comme son père avait été commandant de gendarmerie à Namur, il était parfait bilingue. Tout le pays était donc derrière lui. Il parlait facilement et disait des choses intelligentes.

Par rapport à il y a quarante ans, l’amateurisme a pratiquement disparu dans presque tous les sports.  » Wilfried Meert

 » Après Ivo, l’athlétisme belge a manqué de gagneurs  »

Après lui, l’athlétisme belge a connu un creux.

MEERT : Il y avait de bons athlètes, mais ce n’étaient pas des gagneurs. Il y a toujours eu du talent, mais nous n’avions pas la culture de la détection des pays de l’est et des États-Unis, où les athlètes talentueux se voyaient rapidement attribuer une bourse à l’université. La Belgique a toujours eu des athlètes isolés : Gaston Reiff, Emile Puttemans, Gaston Roelants, Eddy Annys, William Van Dijck, Ronald Desruelles et Fons Brydenbach. Mais il n’y a pas de moyens, pas d’institution. Ici, ça ne marche pas. Un Belge veut rentrer chez lui tous les soirs. Un Français de Perpignan qui a du talent s’en va à Paris, à l’internat. Il ne peut pas rentrer à la maison tous les soirs. Pourquoi dormirait-on à Louvain quand on n’a qu’une heure de route pour rentrer à Gand ? Il y a donc toujours eu des petits groupes, autour de Rudi Diels à Louvain, autour de Jacques Borlée à Bruxelles. Et quand un coach arrêtait, c’était terminé. Un coach de football ou de basket dégage du glamour et donc de l’argent. L’athlétisme est un sport solitaire et pas payé. Allez-y pour trouver un entraîneur qui, à soixante ans, se met dans le bois par grand froid pour voir passer deux fois ses athlètes sans toucher un euro. Et même si on trouve un bon coach, de quoi doit-on vivre avant d’atteindre le sommet ?

L'or olympique de Tia Hellebaut en 2008 : un fabuleux souvenir pour Wilfried Meert.
L’or olympique de Tia Hellebaut en 2008 : un fabuleux souvenir pour Wilfried Meert.© INGE KINNET

Au football, ils vont à l’internat et, très jeunes, ils rêvent d’argent.

MEERT : Le grand désavantage de l’athlétisme par rapport au football, au basket ou au hockey, c’est qu’on fait de l’athlétisme, on ne joue pas. Les jeunes d’aujourd’hui doivent pouvoir jouer. L’athlétisme n’est pas un jeu, la natation non plus. À un certain moment, on arrive à son plafond. C’est là que la plupart des gens décrochent. Tout le monde ne peut pas devenir Kim Gevaert. Seuls les meilleurs poursuivent, car il n’y a rien à gagner. Quel est le défi, si on sait qu’on n’ira pas plus haut ? Dans d’autres sports, c’est différent. Chaque jeune rêve de devenir Messi ou Hazard. S’il n’y parvient pas, il peut toujours devenir professionnel ou semi-professionnel. Il peut même jouer en provinciale ou le samedi après-midi, avec les copains. Il peut pratiquer son hobby chaque semaine, quel que soit son niveau. Un sauteur en hauteur qui ne franchit pas deux mètres ne sautera pas 1,70 m à plusieurs reprises le week-end. On ne saute pas des haies par plaisir. L’athlétisme, à un petit niveau, c’est impossible. Sauf le jogging.

 » J’aime les sportifs qui sortent du lot  »

Quelles sont les personnalités qui vous ont le plus marqué en quarante ans ? Et pourquoi ?

MEERT : J’aime les sportifs qui sortent du lot. Le sport de haut niveau et le charisme ne vont pas toujours de pair mais ça arrive. Comme avec Carl Lewis. Quand il entre dans une pièce, on ne voit plus que lui. Idem pour le perchiste ukrainien Sergueï Bubka, Sebastian Coe, l’ex-patron du Tour Félix Lévitan ou Raoul Mollet, qui a modernisé le COIB. Seulement, un Lewis est accessible au début mais une fois qu’il est hyper sollicité, on met des barrières autour de lui. L’agent d’Usain Bolt m’a dit un jour qu’il recevait en moyenne trente demandes d’interview par jour, du monde entier. S’il répondait favorablement à toutes, il n’aurait plus le temps d’être athlète. Donc, le manager dit stop. Car les Jamaïcains aiment s’amuser, il faut les protéger d’eux-mêmes. Jouer, rigoler… Sur leur Island in the sun, comme Harry Belafonte le chante, la vie est fun. Le caractère des athlètes dépend souvent de leur entourage. Bien entendu, les Scandinaves, comme Lasse Viren, sont plus renfermés : il fait noir six mois par an et ils restent chez eux.

Lasse Viren a été accusé de dopage sanguin. Faites-vous une croix sur ce genre de personnage ?

MEERT : Je n’ai pas vite l’impression d’être trompé. Il y a eu des périodes où tout le monde essayait quelque chose. Regardez les vieilles photos en noir et blanc des années ’50 ou ’60, où ils franchissaient la ligne avec la bave aux lèvres. Personne ne disait rien. Aujourd’hui, c’est pratiquement tolérance zéro. Je pense qu’on cloue trop vite les gens au pilori. Croyez-vous que les jeunes athlètes soviétiques avaient le choix, qu’ils savaient que les pilules bleues ou vertes qu’on leur donnait n’étaient pas des vitamines, mais des hormones ? Beaucoup sont pauvres, leur talent leur permet de gagner un peu d’argent pour eux, pour leur famille, pour leurs proches. Quand on leur dit de prendre quelque chose, ils le font. J’essaye toujours de tenir compte du contexte. Beaucoup d’athlètes ont une confiance aveugle en leur entourage. Le sport, c’est avant tout la confiance. Si on se pose des questions chaque jour, il est impossible de réaliser des résultats. Donc, un athlète s’entraîne dur et fait ce que son entraîneur ou son médecin lui disent. Sans cette confiance aveugle, ils ne peuvent pas arriver au sommet.

Wilfried Meert:
Wilfried Meert:  » Beaucoup d’athlètes ont une foi aveugle en leur entourage. « © INGE KINNET

 » Je comprends davantage Ben Johnson que Lance Armstrong  »

Ben Johnson, l’anti-héros des Jeux de 1988, est-il encore un grand athlète à vos yeux ? Ou juste un tricheur ?

MEERT : Un athlète de haut niveau mais un idiot. Il a fait des bêtises quand il était jeune, il venait d’une famille pauvre qui avait émigré au Canada depuis la Jamaïque. Il avait du talent et pouvait offrir à sa famille ce qu’elle n’avait jamais eu. Je suis plus compréhensif à son égard qu’à celui de Lance Armstrong, qui avait déjà gagné beaucoup d’argent et qui a trouvé un système pour gagner encore plus en roulant tout le monde.

Les Jeux Olympiques sont-ils encore ce que vous admirez le plus ?

MEERT : Oui. On ne peut pas viser plus haut. Tout ce qui est rare est important. On peut être champion chaque année mais champion olympique, c’est tous les quatre ans. Pour beaucoup d’athlètes, il n’y a qu’une chance, car une carrière est courte. C’est tout ou rien.

Quels sont les moments qui vous ont procuré le plus d’émotion aux Jeux ?

MEERT : La médaille d’or de Tia Hellebaut à la hauteur, aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008. Nous savions qu’elle pouvait décrocher une médaille, mais tout le monde était convaincu que, même si elle sautait très haut, Tia ne pourrait pas faire mieux que Blanka Vlasic. Le 4 X 100 mètres féminin à Pékin fut aussi un grand moment, tout comme les quatre médailles d’or de Carl Lewis aux JO de Los Angeles en 1984. J’ai bien connu Carl et ses parents. De chouettes personnes. Un jour, Carl m’a demandé s’il pouvait manger dans sa chambre, car s’il mangeait au restaurant de l’hôtel, il ne parvenait pas à finir son repas, tellement on l’accostait. Pareil pour Bolt. Au début, ils aiment qu’on s’intéresse à eux mais au 27e selfie de la journée, ça devient difficile.

Après autant d’années dans ce milieu, quelque chose vous étonne encore ?

MEERT : Oui. J’aime toujours beaucoup le sport de haut niveau et je ne me pose pas trop de questions. Quand Armand Duplantis franchit 6,17 m à la perche, je me dis que c’est formidable. J’ai une admiration sans bornes pour Remco Evenepoel depuis qu’il a lâché tout le monde à San Sebastián l’an dernier. Dans ces moments-là, je ne me demande pas s’il est clean, je refuse de me poser des questions.

 » Ça fait 20 ans que l’athlétisme offre les mêmes salaires aux femmes qu’aux hommes  »

Les athlètes masculins et féminins doivent-ils gagner la même chose ?

WILFRIED MEERT : Ça fait presque vingt ans que c’est le cas. Depuis la création de la Golden League, le prize money est le même chez les femmes que chez les hommes. Ce qui diffère, ce sont les primes de départ, mais c’est davantage une question de charisme. Pendant des années, j’ai accordé des primes de départ plus importantes à Merlene Ottey, Yelena Isinbayeva ou Jackie Joyner qu’à beaucoup d’hommes, car elles me garantissaient des résultats et du charisme. Elles attiraient du monde.

Les joueuses de football belge, qui viennent seulement d’obtenir la possibilité de travailler dans de bonnes conditions, doivent-elles toucher autant que leurs collègues masculins qui remplissent les stades et garantissent des droits de retransmission importants ?

MEERT : Pas encore. Dans certains pays arabes, les femmes n’ont pas le droit de faire du sport. En Afrique, certaines sont enceintes à quatorze ans et ne peuvent plus rêver d’une carrière. Pour moi, le critère, ce sont les résultats. Il y a trois ans, les Belgian Cats jouaient devant quarante spectateurs. Maintenant, elles attirent 4.500 personnes pendant trois jours d’affilée. Elles jouent en Russie, aux États-Unis, en Turquie…

Quel père aurait laissé sa fille partir à Ekaterinbourg il y a vingt ans ? Aujourd’hui, le sport de haut niveau s’est mondialisé, il y a davantage de possibilités. Les filles reçoivent des chances qu’elles n’auraient pas pu avoir par le passé.

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