» J’ai progressé à Milan »

Surnommé Terminator ou Air Force One, l’Américain veut aider le FC Twente à conserver son titre après une période difficile mais enrichissante en Italie.

Les Espoirs du FC Twente affrontent le SF Lotte (score final : 2-2). A la 83′, Arnold Bruggink botte un coup de coin. Le ballon est catapulté dans les airs et Oguchi Onyewu place le ballon de la tête dans les filets. Le nouveau joueur de Twente marque de son empreinte un match qu’il a entamé avec un brin de maladresse. En seconde période, il a même joué à l’arrière gauche ! Le FC Twente loue Onyewu, propriété de l’AC Milan, jusqu’au terme de la saison, avec option d’achat.  » Le montant est assez considérable « , confie le président Joop Munsterman .

Une demi-heure plus tard, Oguchialu Jacob Onyewu est devant nous. Oguchialu signifie  » Dieu lutte pour moi « . Son surnom, Gooch , est plutôt héroïque aussi. Un large sourire amical, au-dessus d’un corps puissant et tout sauf amical, nous répond. Quand il ôte son T-shirt, il dévoile un impressionnant tableau de muscles, des os massifs et des tablettes de chocolat autour du nombril. Le footballeur de plus de 190 centimètres ressemble à une usine de transformation de viande.

 » Oh, j’ai déjà été plus musclé « , rigole l’Américain.  » Pendant tout un temps, j’ai consacré des heures à la musculation, jugeant devoir acquérir beaucoup de force pour réussir en football. Puis, le Milan Lab m’a examiné et les tests ont révélé que ces séances de musculation nuisaient à mon explosivité. J’ai donc changé le programme, avec succès. Je suis plus souple. Dans les tests de mobilité, j’étais même devenu deuxième, après Mathieu Flamini . Dans les sprints, j’étais toujours parmi les dix premiers.  »

Désillusion

Le mot est lâché. AC Milan. Empreint de confiance, Onyewu l’a rejoint en 2009, à la poursuite de son rêve américain en quittant le Standard. Un an et demi plus tard, il a perdu ses illusions et tourne le dos à la Botte. Durant sa première saison à Milan, le défenseur est monté au jeu en Ligue des Champions contre Zurich mais peu après, il s’est déchiré un tendon du genou gauche, durant le match de qualification pour le Mondial face au Costa Rica de Bryan Ruiz qu’il retrouve à Twente.

Et lorsqu’il a été rétabli, la saison était achevée et Leonardo , l’entraîneur qui l’avait embauché, avait cédé sa place à Massimiliano Allegri . Celui-ci a systématiquement fait appel à Alessandro Nesta et à Thiago Silva au c£ur de la défense. Onyewu n’a pas joué un seul match de championnat sous le maillot milanais.

 » Un joueur n’a pas de prise sur une série de variables. L’une d’elles est la blessure. Deux mois après mon arrivée à Milan, je me suis blessé au genou et j’ai été forcé de suivre les débats depuis la tribune pendant six mois. Un autre facteur est le choix de l’entraîneur, qui s’effectue en votre faveur ou non. J’ai essayé d’influencer ce choix à l’entraînement. Là, je contrôle mes prestations. Jour après jour, j’ai livré le meilleur de moi-même. Je ne pouvais faire plus. Je n’ai rien à me reprocher. « 

Si ce n’est, sans doute, d’avoir opéré le mauvais choix durant l’été 2009. Oguchi Onyewu s’était placé en vitrine et s’exposait ostensiblement à l’élite européenne. Le défenseur était devenu un des piliers du Standard, double champion de Belgique, et en mai, il avait déjà la possibilité de signer pour trois ans à Birmingham City. Un mois plus tard, Onyewu restait sur une formidable Coupe des Confédérations en Afrique du Sud. Il s’était notamment illustré en demi-finales contre l’Espagne, battue 2-0. D’autres clubs se manifestèrent. L’Ajax, le Real et Liverpool s’intéressaient à lui mais Onyewu a préféré l’Italie.

 » Après sept saisons en Europe, j’étais prêt à me mesurer à un niveau supérieur. Je ne pouvais pas rater une chance pareille. Alexis Lalas a joué deux saisons à Padoue dans les années 90 mais j’étais le premier Américain à jouer pour un ténor transalpin et j’en étais très flatté. Après coup, je m’y prendrais autrement mais je ne regrette rien. C’est impossible quand on est empreint d’un bon pressentiment en posant son choix. Je suis très croyant. Je me rends à l’église dès que je le peux et je crois fermement au plan ultime que Dieu a pour chacun. Ma période à Milan en faisait partie. Les expériences négatives vous rendent plus fort. J’ai beau ne pas avoir beaucoup joué à Milan et je manque toujours de rythme mais j’ai progressé car je me suis entraîné tous les jours avec et contre quelques des meilleurs footballeurs du monde. Comme je le disais, je suis aussi devenu plus explosif et plus rapide à Milan.  »

Le FC Twente est la prochaine station de son long voyage en Europe. Fils d’immigrés nigérians, Oguchi Onyewu a grandi très vite, de là à envisager une carrière en basket. Mais c’est le football qui va le révéler. Jeune, il joue au Sherwood College, à la Clemson University et dans diverses sélections de jeunes américaines. En 2001, il participe au championnat du monde – 21 ans en Argentine. Ses débuts de l’autre côté de l’Atlantique vont cependant connaître du plomb dans l’aile. Ce n’est qu’en 2004, lors de son passage de La Louvière au Standard que le géant prend son envol. L’actuel entraîneur de Twente, Michel Preud’homme (alors directeur technique du Standard), continue à qualifier la découverte du défenseur central en ces termes :  » C’est un des plus beaux moments de ma carrière. Toute la Belgique le voyait jouer et progresser mais personne n’osait le transférer.  »

Durant ses saisons rouches, il s’est aussi forgé la réputation d’un homme empreint de personnalité. Sur le terrain, le défenseur est spécialisé dans le recyclage des attaquants mais en-dehors, il s’érige en gardien des valeurs et des normes.

 » Le football est un sport de contact qui exige un engagement sans faille. N’oubliez pas que les attaquants ne sont pas des anges non plus. Je suis taillé pour un jeu physique, viril. Si je dois me comporter en ballerine, j’arrête immédiatement. Evidemment, le sport doit rester propre. « 

Le respect

Onyewu prend aussi des positions fermes. Ainsi, en 2006, il a refusé une offre du Real.  » Je ne veux pas rejoindre un club qui considère les footballeurs et les êtres humains comme des instruments de marketing « , expliqua-t-il.

En mai 2009, il secoue la Belgique en déposant plainte contre Jelle Van Damme , alors à Anderlecht, qui l’aurait traité à trois reprises de  » sale singe « . Et l’été dernier, Onyewu a proposé à Milan de lui offrir une année supplémentaire de contrat sans salaire, estimant n’avoir pas gagné son argent pendant un an, à cause de sa blessure.

C’est pour tout cela que Michel Preud’homme vante la forte personnalité de son nouveau joueur. Deux ans et demi après le départ de Preud’homme pour Gand, les deux hommes sont donc réunis à Enschede.

 » La présence de Michel me donne un surplus de confiance « , confirme Onyewu.  » Il est un maître tacticien et un grand entraîneur. Je suis aussi heureux de faire partie de ce club si spécial, si ambitieux. Je veux aider Twente à reconduire son titre et à aller loin en Europa League. C’est possible. J’ai vu Twente opposer une féroce résistance à l’Inter à deux reprises. Pour cela, l’équipe doit posséder un grand sens tactique et une belle technique. L’Europe a vu monter l’étoile de Twente. « 

Pourtant, pour un footballeur ambitieux, qui a eu le Real, l’Ajax et Milan à ses pieds, le FC Twente a toutes les caractéristiques d’un pas en arrière…

 » On ne raisonne en ces termes que quand on est mentalement faible « , rétorque Onyewu.  » J’avais la possibilité de rejoindre le Real, j’ai été à Milan et maintenant, je suis à Twente. Je préfère jouer à Twente que faire banquette à Milan. J’ai effectué un choix sportif. A Enschede, dans les mois à venir, j’espère me relancer. Ensuite, j’aviserai. Je sais qu’on ne manque pas de bons défenseurs centraux, ici, mais je ne redoute pas la concurrence. Les clubs qui veulent progresser doivent élargir leur noyau et l’accroître. C’est comme ça qu’une équipe progresse. Je veux adopter ce rythme. Où que je sois, je veux être le meilleur. « 

PAR PETER WEKKING, ESM

 » Je suis devenu plus explosif et plus rapide à Milan. « 

 » Si je dois me comporter comme une ballerine, j’arrête immédiatement. « 

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