» J’ai perdu plus de 300.000 euros  » (Isaias)

A Walhain, Isaias (35 ans) se porte comme un charme et le sourire du nouvel entraîneur de ce club de Promotion D est un visa pour le bonheur et la joie de vivre. Le ciel n’a pas toujours été dégagé pour celui qui fut un grand médian doté d’une frappe ultra lourde. Il a exercé son talent dans une collection de clubs : Seraing, Metz, Gaziantepspor, Mouscron, Saint-Trond, Lausanne, Dessel, Liège, Battice, Lille (en Flandre), Deux-Acren, Molenbeek, Walhain. Un tel parcours aurait dû mettre à l’abri celui qui habite désormais à deux pas de la Barrière de Saint-Gilles, à Bruxelles. Ce n’est pas le cas.

 » J’ai tout perdu au jeu en quelques mois « , raconte-t-il.  » J’y ai laissé plus de 300.000 euros, soit toutes mes économies. Tout a commencé sur les hauteurs de Liège, à Boncelles, où je jouais surtout au bingo. Un footballeur a du temps libre, il s’ennuie, cherche des distractions. Ce que j’appelle le diable m’avait repéré. J’étais fort sur le terrain mais pas dans la vie de tous les jours. J’avais beaucoup d’amis qui me voulaient du bien en me prêtant un peu d’argent mais ils ne m’ont pas éloigné des nuits sans sommeil. J’étais jeune, je récupérais vite. Tout bascula pour de bon à Lausanne. Un équipier m’a emmené dans les casinos de Divonne-les-Bains. Je croyais que c’était le rêve. Ah, ils savent y faire pour recevoir les clients : champagne, restaurants, des cohortes de jolies filles, des chambres pour passer la nuit. Le luxe, la facilité pour des sportifs oisifs qui sont des proies faciles. On joue à tout, on fume, on boit, on perd tout, on emprunte de l’argent qu’il faut rembourser après s’être refait. Je ne pouvais plus me passer de cette drogue. J’ai perdu mes compagnes lassées par mes mensonges et mes promesses.

A un moment, j’étais une épave. Je ne le remarquais pas, les autres oui. Mon premier beau-père m’a beaucoup aidé, je l’en remercie encore. Un ami s’est occupé de moi : Wamberto. Sans lui, j’y aurais laissé ma peau. J’étais seul, j’avais besoin d’amour. J’ai songé à me suicider car je n’étais pas venu en Europe pour vivre ça. Je ne pouvais plus aider les miens qui étaient dans le besoin et j’étais incapable de payer un billet d’avion pour assister aux funérailles de mon père. Wamberto est très croyant et j’ai beaucoup prié avec lui. Je l’ai souvent rejoint dans son église à Amsterdam alors que j’avais à peine de quoi payer un plein d’essence. La foi a été ma bouée de sauvetage. Grâce à Dieu, j’ai laissé tomber pour toujours le jeu et l’alcool. J’essaye d’aider ceux qui n’ont pas encore échappé au diable. Je parle de mon cas pour que d’autres évitent ce piège. Les victimes sont plus nombreuses qu’on le croit… Je sais ce que Gilbert Bodart traverse. Mais, même si c’est dur, il y a une vie après l’enfer du jeu. Je suis marié, j’ai deux enfants et, finalement, j’en suis sorti plus fort qu’avant. Je suis heureux et je ne remettrai plus jamais cette richesse en jeu.  »

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